18 mars 2004, 12 ans plus tard

par Maria Nicola

12 ans sont passés depuis l’Opération „Christ”, mais il n’y a toujours pas de clarification. Une attaque armée brutale, surdimensionnée, contre des pratiquants de yoga non-violents qui ne se sont pas rendus coupables de violation de la loi, qui n’étaient même pas enquêtés à ce moment-là pour une infraction quelconque.

Toute cette action des organismes d’enquête, action d’une brutalité grotesque, visant d’effrayer les pratiquants de yoga, de les terroriser pour les déterminer de faire des déclarations pour prouver que dans l’Ecole yoga MISA se dérouleraient des activités illicites. Tous les biens des 16 bâtiments des pratiquants de yoga avaient été confisqués dans l’espoir de trouver des preuves pour inventer une accusation contre eux, leurs collègues ou leurs instructeurs de yoga.

Le résultat? Aucune déclaration incriminante, aucune preuve, aucune accusation possible. Pour couvrir cet échec évident, mais aussi les abus inacceptables des organismes d’enquête, d’autres dossiers ont été fabriqués sur la base des faux témoignages.

12 ans plus tard, les yogis continuent à pratiquer le yoga, l’Ecole de yoga continue à fonctionner avec succès, mais personne ne semble intéressé à expliquer ce qui s’est passé le 18 Mars 2004 et à faire justice aux yogis accusés injustement, stigmatisés par la presse et terrorisés par les organes d’enquête. Si pas pour eux, alors au moins pour la société civile roumaine, dans l’espace de laquelle a eu lieu cet abus et qui, faute de clarifications et de sanctions, s’expose au risque de récidive.


18 mars 2004, en chiffres

 
300 procureurs et gendarmes des troupes antiterroristes ont fait des raids violents dans 16 résidences de certains pratiquants de yoga sur la base des mandats de perquisition illégales. Plus de 80 pratiquants de yoga ont été malmenés par des gendarmes, menacés avec des armes, ramassés et détenus pour interrogatoire. 5 camions de preuves ont été détenus. Les interrogations brutales ont duré plus de 12 heures pour la plupart de ceux détenus qui ont donné des déclarations, dit-on, en tant que témoins, sans leur indiquer le but de l’enquête et sans les autoriser à consulter un avocat, ou faire un appel ou aller aux toilettes. Sur les 80 déclarations recueillies sous pression (les procureurs voulaient contraindre yogis de faire des déclarations contre Gregorian Bivolaru), une seule pourrait être spéculée comme possible mise en accusation de Gregorian Bivolaru – déclaration conçue par les procureurs que la mineure Madalina Dumitru a été forcée de signer.

Ce qui a suivi? Des enquêtes qui ont coûté plus de 5 millions d’euros. A leur suite, Gregorian Bivolaru a été accusé d’une relation sexuelle présumée avec une mineure. Après deux décisions favorables qui ont constaté que les faits incriminés et les victimes n’existent pas, la HCCJ rouvre le procès invoquant « le droit à la défense » de Gregorian Bivolaru (qui a été acquitté) et le condamne à six ans d’emprisonnement.

Par la suite, a commencé un processus de « traite des personnes » où ont été accusés 48 yogis d’avoir « traité » 7 plaignants qui ont demandé des dommages-intérêts de millions d’euros. 70 bâtiments ont été mis sous séquestre. Dans le dossier envoyé à la cour sont restés seulement 22 accusés. Le Tribunal de Cluj a décidé que les faits n’existaient pas et a acquitté l’ensemble des 22 yogis.

Le bilan de l’action de 300 gendarmes et procureurs: une seule déclaration arrachée par intimidation d’un témoin peut être utilisée pour poursuivre Gregorian Bivolaru. Après avoir dépensé 5 millions d’euros, Gregorian Bivolaru est condamné abusivement pour « acte sexuel avec un mineur ».
 

18 mars 2004, dans la presse

 
Les médias ont rapporté abondamment l’Opération « Christ » comme « la plus grande opération contre le crime organisé de la Police roumaine ». Les accusations véhiculées étaient à propos de la traite des personnes et le trafic de drogue, le crime organisé, etc. Des enregistrements vidéo filmés pendant les raids par les organismes d’enquête ont été diffusés sur les chaînes TV, accompagnés par des déclarations officielles qui promettaient la présentation des preuves à l’appui de ces allégations, ainsi que des informations sur le déroulement de l’enquête. Les enregistrements vidéo des perquisitions et les accusations se répètent obsessionnellement dans les médias pendant plusieurs jours.

Les preuves n’apparaissent pas. Il se produit, à la place, un glissement progressif des premières accusations vers la médiatisation de sujets de scandale tels que la thérapie avec de l’urine et le sexe en groupe. Par exemple, Sorin Ovidiu Balan, qui a assisté aux perquisitions de 18 Mars et qui déclarait frénétique à la télé que « l’Opération Christ est la plus grande action contre le trafic de drogue, le trafic humain et la prostitution », quelques semaines plus tard, son discours change et il raconte pathétiquement avoir vu avec ses yeux collée sur le mur dans la salle de bain du bâtiment perquisitionné une note suggérant de « boire du pipi ».

Tout finit par pétiller dans un plaidoyer de haine que MISA serait une secte et le SRI intervient pour ajouter une connotation de « menace pour la sécurité nationale ».
Les milliers d’articles de presse qui ont présenté l’opération « Christ » ont omis à l’unisson de présenter le point de vue des victimes. Presque aucun journaliste n’a pas soulevé la question que, après toutes ces perquisitions et toute l’agitation il n’a pas présentée aucune preuve et n’a été donnée aucune explication. Les journalistes ne semblaient pas remarquer que l’opération « Christ » est un fiasco, une enquête inutile, une mise en scène, une terrible injustice.

Un acte inacceptable dans un pays démocratique, un grave abus a été manifestement commis en violation du droit démocratique et des droits de l’homme. Au cours des 12 dernières années, une seule station de télévision a présenté une enquête journalistique sur Mars 18 raids. L’émission Reflector (Réflecteur) de la télévision roumaine – TVR a diffusé des entrevues avec les victimes les perquisitions, effectuées par le journaliste Marius Georgescu. Après cette émission, TVR a été accusée par le Conseil national de l’audiovisuel (CNA) pour la présentation inéquitable parce que le reportage n’a pas présenté le point de vue de l’accusé (sic). Cependant, les enquêteurs brutalité était visible dans les images diffusées sur toutes les chaînes de télévision chez 18 Mars de 2004.


18 mars 2004, dans les sténogrammes de PSD et d’autres révélations
 
Suite à la publication des sténogrammes secrètes de PSD dans la presse, à l’automne 2004, le PSD a perdu l’élection présidentielle (le candidat du PSD Adrian Nastase, était premier ministre à l’époque et aussi le chef du parti). Les sténogrammes du PSD présentent différents machinations du parti au pouvoir et la corruption pourri de son leadership. Mais elles sont aussi une preuve évidente que l’opération « Christ » a été lancée sur l’ordre politique de Adrian Nastase. Paradoxalement, bien que certains médias aient publié les sténogrammes de PSD et commenté généreusement, les journalistes n’ont accordé aucune importance aux révélations sur l’opération « Christ ».

Il y a aussi quelques très rares exceptions. Ion Cristoiu a écrit quelques articles qui exposent directement l’implication des services secrets et la participation des dirigeants de PSD dans l’action contre les pratiquants de yoga. Toujours Ion Cristoiu a interrogé Adrian Nastase dans le cadre d’une émission de télévision sur le sujet et obtenu de lui une réponse révélatrice: le cas MISA et l’Opération « Christ » a été une grosse erreur du gouvernement Nastase.

Sur le côté opposé du registre publicistique, le chercheur Gabriel Andreescu a publié deux volumes extrêmement bien documentés sur le cas de MISA, qui analysent avec des preuves la persécution contre les yogis pendant le régime communiste et le régime post-révolutionnaire. Les événements de 2004 sont traités avec soin, avec rigueur, interrogeant les témoins et présentant des documents officiels. Les résultats très intéressants de la recherche de Gabriel Andreescu ont été totalement ignorés par les médias.


18 mars 2004, dans les rapports officiels

 
Diverses organisations pour la défense des droits humains ont présenté le cas MISA avec la plus grande préoccupation, car il montre que la situation de la société roumaine est loin d’être une démocratie fonctionnelle. Parmi celles-ci, nous mentionnons le rapport élaboré en 2006 par l’association indépendante la Société pour la Justice (SoJust) et le rapport d’APADOR-CH sur la situation du respect des droits de l’homme en Roumanie en 2004.

L’association CICNS (Centre d’Information et de Conseil des Nouvelles Spiritualités) de France, ONG dotée du statut consultatif spécial auprès de l’Organisation des Nations Unies, a présenté le cas MISA comme une attaque typique sur une véritable écoles spirituelles. Le cas MISA a été présenté dans diverses conférences internationales sur les droits de l’homme, telles que les conférences spécialisées de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) ou des ateliers de la Commission européenne. Plusieurs députés européens ont soulevé la question des violations des droits de l’homme et des lois dans les actions du 18 Mars 2004, et l’Etat roumain a été interrogé à plusieurs reprises sur les exactions commises dans l’opération « Christ ». La réponse des autorités roumaines a éludé à chaque fois la clarification de ce cas. Au cours des dernières années, des associations indépendantes comme Soteria International et LAYMS continuent de faire venir régulièrement le cas MISA à l’attention des instances internationales.

18 mars 2004, en Justice

 
Les plaintes des victimes des abus du 18 Mars 2004, ont eu un trajet sinueux dans la Justice. Après un non lieu à poursuivre donné par le procureur Elena Sandu en mai 2005, les plaintes des yogis joignent le Conseil Supérieur de la Magistrature, qui décide en Janvier 2006 que les procureurs n’étaient pas coupables de quoi que ce soit. La décision de CSM est un apogée de l’injustice et de l’impertinence, même l’insolence, car il y est fait mention que les yogis avaient truqué seuls les abus en cause, plus précisément que les vidéos diffusées sur les chaînes des télévisions le 18 Mars 2004 seraient des scénettes mises en scène et interprétées par des acteurs yogis. La décision de CSM affirme aussi que tous les documents incriminants à l’encontre des yogis parus dans la presse (documents émanant des dossiers d’enquête) avaient été donnés à la presse par les yogis et non pas par les procureurs.

Initialement, les plaintes contre des gendarmes ont également été rejetées jusqu’à ce que le dossier arrive au procureur militaire Dan Voinea. Son enquête a inclus des entrevues avec des gendarmes participant à l’opération « Christ » et a exposé à la fois la violation de la procédure pénale et la violence des raids. Même avant la fin de l’enquête, le général Dan Voinea a été retiré non seulement de cette enquête, mais aussi en tant que chef des Parquets militaires. Le dossier a été repris par un autre procureur militaire, le colonel Silvestru Boeru en Février 2008, qui l’a fermé avec non lieu à poursuivre, en dépit des preuves recueillies par Voinea. L’appel des yogis a été rejeté et l’affaire a été définitivement classée.

Après des centaines de déclarations, des plaintes, des audiences, mais aussi de centaines de meetings des yogis, les coupables des abus de 18 Mars 2004 sont confortablement protégés par ce que l’ancien président de la Roumanie appelait un « système pourri ».

Justice pour 18 mars 2004?

 
Gregorian Bivolaru reçu à la fin de 2005, l’asile politique en Suède. Avant l’acceptation de sa demande d’être protégé par l’État suédois en tant que réfugié politique, la Suède a rejeté deux demandes d’extradition de la part des officiels roumains. La justice suédoise a signalé ainsi, de manière assez directe, les violations de la loi dans le cas Bivolaru, y compris au sujet de l’opération « Christ ».

En 2015, le Tribunal de Cluj a acquitté les 22 yogis accusés à tort de trafic de personnes dans le dossier produit à la suite de l’opération « Christ ». La motivation de la décision du tribunal a mis en évidence notamment les abus, la violence, l’illégalité des raids du 18 Mars 2004. De toute évidence, la presse n’a publié même pas une partie de ce document révélateur.

Plus de 11 ans après ces raids, qui peuvent être vus plus comme un assaut armé brutal contre les pratiquants de yoga, le tribunal affirme catégoriquement: « Lors de l’effectuation de ces perquisitions ont été violées toutes les dispositions de la procédure pénale régissant cette institution valables à la date de 18/04/2004. »

Le document souligne que le cirque médiatique était tout simplement un écran de fumée pour cacher le fait qu’il n’y avait pas de preuves et des accusations contre les yogis. La manipulation des médias a visé donc à compenser le fait que les procureurs n’avaient découvert aucune infraction qui puisse être incriminée:
« La grande majorité des informations publiées dans les journaux sur les étudiants de MISA n’ont rien à voir avec la réalité, compte tenu de leur vrai style de vie. […] Par les médias il a été poursuivi l’incitation à la haine et à la violence des lecteurs et des téléspectateurs, visant ainsi à rendre ” justifiée ” la nécessité des actions précédentes prises par les autorités contre les pratiquants de MISA et n’ont pas eu le ” résultat ” attendu », montre le document qui motive le verdict du Tribunal de Cluj d’acquittement des yogis.

Ces deux décisions en justice (de la Cour suprême de Suède et du Tribunal de Cluj) confirment la taille des abus du 18 Mars 2004. Il est donc nécessaire, mieux vaut tard que jamais, de faire justice et de dire la vérité sur le 18 Mars 2004.


 

yogaesoteric
24 mars 2016

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