Un vieux sage dit (1)

« La Connaissance de Soi est le Commencement de la Sagesse. » Aristote

 


Les 3 portes de la sagesse…

Un Roi avait pour fils unique un jeune Prince courageux, habile et intelligent. Pour parfaire son apprentissage de la Vie, il l’envoya auprès d’un Vieux Sage. « Éclaire-moi sur le Sentier de la Vie », demanda le Prince…

Le vieux sage dit « Mes paroles s’évanouiront comme les traces de tes pas dans le sable. », répondit le Sage. « Cependant je veux bien te donner quelques indications. Sur ta route, tu trouveras 3 portes. Lis les préceptes indiqués sur chacune d’entre elles. Un besoin irrésistible te poussera à les suivre. Ne cherche pas à t’en détourner, car tu serais condamné à revivre sans cesse ce que tu aurais fui. Je ne puis t’en dire plus. Tu dois éprouver tout cela dans ton coeur et dans ta chair. Va, maintenant. Suis cette route, droit devant toi. »

Le Vieux Sage disparut et le Prince s’engagea sur le Chemin de la Vie. Il se trouva bientôt face à une grande porte sur laquelle on pouvait lire :

« CHANGE LE MONDE »

« C’était bien là mon intention », pensa le Prince, « car si certaines choses me plaisent dans ce monde, d’autres ne me conviennent pas. » Et il entama son premier combat. Son idéal, sa fougue et sa vigueur le poussèrent à se confronter au monde, à entreprendre, à conquérir, à modeler la réalité selon son désir. Il y trouva le plaisir et l’ivresse du conquérant, mais pas l’apaisement du coeur. Il réussit à changer certaines choses mais beaucoup d’autres lui résistèrent. Bien des années passèrent.

Un jour il rencontra le Vieux Sage qui lui demande : « Qu’as-tu appris sur le chemin ? »

« J’ai appris », répondit le Prince, « à discerner ce qui est en mon pouvoir et ce qui m’échappe, ce qui dépend de moi et ce qui n’en dépend pas. »

« C’est bien », dit le Vieil Homme, « utilises tes forces pour agir sur ce qui est en ton pouvoir. Oublie ce qui échappe à ton emprise. » Et il disparut.

Peu après, le Prince se trouva face à une seconde porte. On pouvait y lire :


« CHANGE LES AUTRES »

« C’était bien là mon intention », pensa-t-il. « les autres sont source de plaisir, de joie et de satisfaction mais aussi de douleur, d’amertume et de frustration. » Et il s’insurgea contre tout ce qui pouvait le déranger ou lui déplaire chez ses semblables. Il chercha à infléchir leur caractère et à extirper leurs défauts. Ce fut là son deuxième combat. Bien des années passèrent.

Un jour, alors qu’il méditait sur l’utilité de ses tentatives de changer les autres, il croisa le Vieux Sage qui lui demanda : « Qu’as-tu appris sur le chemin ? »

« J’ai appris », répondit le Prince, « que les autres ne sont pas la cause ou la source de mes joies et de mes peines, de mes satisfactions et de mes déboires. Ils n’en sont que le révélateur ou l’occasion. C’est en moi que prennent racine toutes ces choses. »

« Tu as raison », dit le Sage, « par ce qu’ils réveillent en toi, les autres te révèlent à toi-même. Soit reconnaissant envers ceux qui font vibrer en toi joie et plaisir. Mais sois-le aussi envers ceux qui font naître en toi souffrance ou frustration, car à travers eux la Vie t’enseigne ce qui te reste à apprendre et le chemin que tu dois encore parcourir. » Et le Vieil Homme disparut.

Peu après, le Prince arriva devant une porte où figuraient ces mots :

« CHANGE-TOI TOI-MÊME »

« Si je suis moi-même la cause de mes problèmes, c’est bien ce qui me reste à faire », se dit-il. Et il entama son 3ème combat. Il chercha à infléchir son caractère, à combattre ses imperfections, à supprimer ses défauts, à changer tout ce qui ne lui plaisait pas en lui, tout ce qui ne correspondait pas à son idéal.

Après bien des années de ce combat où il connut quelque succès mais aussi des échecs et des résistances, le Prince rencontra le Sage qui lui demanda : « Qu’as-tu appris sur le chemin ? »

« J’ai appris », répondit le Prince, « qu’il y a en nous des choses qu’on peut améliorer, d’autres qui nous résistent et qu’on n’arrive pas à briser. »

« C’est bien », dit le Sage.

« Oui », poursuivit le Prince, « mais je commence à être las de ma battre contre tout, contre tous, contre moi-même. Cela ne finira-t-il jamais ? Quand trouverai-je le repos ? J’ai envie de cesser le combat, de renoncer, de tout abandonner, de lâcher prise. »

« C’est justement ton prochain apprentissage », dit le Vieux Sage, « mais avant d’aller plus loin, retourne-toi et contemple le chemin parcouru. » Et il disparut.

Regardant en arrière, le Prince vit dans le lointain la 3ème porte et s’aperçut qu’elle portait sur sa face arrière une inscription qui disait :

« ACCEPTE-TOI TOI-MÊME »

Le Prince s’étonna de ne point avoir vu cette inscription lorsqu’il avait franchi la porte la première fois, dans l’autre sens. « Quand on combat on devient aveugle », se dit-il. Il vit aussi, gisant sur le sol, éparpillé autour de lui, tout ce qu’il avait rejeté et combattu en lui : ses défauts, ses ombres, ses peurs, ses limites, tous ses vieux démons. Il apprit alors à les reconnaître, à les accepter, à les aimer. Il apprit à s’aimer lui-même sans plus se comparer, se juger, se blâmer.

Il rencontra le Vieux Sage qui lui demanda : « Qu’as-tu appris sur le chemin ? »

« J’ai appris », répondit le Prince, « que détester ou refuser une partie de moi, c’est me condamner à ne jamais être en accord avec moi-même. J’ai appris à m’accepter moi-même, totalement, inconditionnellement. »

« C’est bien », dit le Vieil Homme, « c’est la première Sagesse. Maintenant tu peux repasser la 3ème porte. »

A peine arrivé de l’autre côté, le Prince aperçut au loin la face arrière de la seconde porte et y lut :

« ACCEPTE LES AUTRES »


 


Tout autour de lui il reconnut les personnes qu’il avait côtoyées dans sa vie ; celles qu’il avait aimées comme celles qu’il avait détestées. Celles qu’il avait soutenues et celles qu’il avait combattues. Mais à sa grande surprise, il était maintenant incapable de voir leurs imperfections, leurs défauts, ce qui autrefois l’avait tellement gêné et contre quoi il s’était battu.

Il rencontra à nouveau le Vieux Sage. « Qu’as-tu appris sur le chemin ? » demanda ce dernier.

« J’ai appris », répondit le Prince, « qu’en étant en accord avec moi-même, je n’avais plus rien à reprocher aux autres, plus rien à craindre d’eux. J’ai appris à accepter et à aimer les autres totalement, inconditionnellement. »

« C’est bien », dit le Vieux Sage, « c’est la seconde Sagesse. Tu peux franchir à nouveau la deuxième porte. »

Arrivé de l’autre côté, le Prince aperçut la face arrière de la première porte et y lut :

« ACCEPTE LE MONDE »

« Curieux », se dit-il, « que je n’aie pas vu cette inscription la première fois. » Il regarda autour de lui et reconnut ce monde qu’il avait cherché à conquérir, à transformer, à changer. Il fut frappé par l’éclat et la beauté de toute chose. Par leur perfection. C’était pourtant le même monde qu’autrefois. Était-ce le monde qui avait changé ou son regard ?

Il croisa le Vieux Sage qui lui demanda : « Qu’as-tu appris sur le chemin ? »

« J’ai appris », dit le Prince, « que le monde est le miroir de mon âme. Que mon âme ne voit pas le monde, elle se voit dans le monde. Quand elle est enjouée, le monde lui semble gai. Quand elle est accablée, le monde lui semble triste. Le monde, lui, n’est ni triste ni gai. Il est là ; il existe ; c’est tout. Ce n’était pas le monde qui me troublait, mais l’idée que je m’en faisais. J’ai appris à accepter sans le juger, totalement, inconditionnellement. »

« C’est la 3ème Sagesse », dit le Vieil Homme, « te voilà à présent en accord avec toi-même, avec les autres et avec le Monde. »

Un profond sentiment de paix, de sérénité, de plénitude envahit le Prince. Le Silence l’habita.

« Tu es prêt, maintenant, à franchir le dernier Seuil », dit le Vieux Sage, « celui du passage du silence de la plénitude à la Plénitude du Silence. » Et le Vieil Homme disparut…

Un Vieux Sage dit… L’Homme jeune marche plus vite que l’ancien, mais l’ancien connaît la route…

Un sage prit la parole et dit : « Pour entendre la musique de l’Âme du monde, nous avons besoin de silence. Si notre esprit est sans cesse préoccupé, agité, actif, il ne pourra avoir accès à sa source profonde. Accordons à notre esprit chaque jour des moments de calme. De ce profond silence jailliront les plus beaux fruits de l’âme : paix, douceur, joie, amour, compréhension, lumière. Le recueillement est la respiration de l’âme. Car notre esprit a autant besoin de silence que notre corps a besoin d’air. Combien d’âmes étouffent dans la vie moderne trépidante et ne peuvent trouver l’espace et le calme nécessaires à leur équilibre et à leur croissance ! »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez le contentement et la sobriété. Peu de choses suffisent au bonheur de l’homme. Or nous sommes devenus esclaves de notre convoitise qui nous fait désirer toujours plus. L’exaspération du désir rend l’homme perpétuellement insatisfait. Apprenez à vous contenter de ce que vous avez déjà et débarrassez-vous de tout ce qui est superflu. Retrouvez le goût des choses simples et ne cherchez pas à posséder ce que les autres possèdent. Voilà une des grandes clés du bonheur ! » Un sage dit…

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la gratitude. Remerciez la vie pour tout ce qu’elle vous donne de bon. La santé, l’amour, l’amitié, le travail. Et lorsque vous perdez ces choses précieuses, remerciez encore la vie des obstacles qui vous sont envoyés pour vous faire grandir, pour vous apprendre l’humilité ou le détachement, pour vous faire voir ce que vous ne vouliez pas voir. Vivre dans la gratitude, c’est vivre le coeur grand ouvert, en résonance avec l’Âme du monde. Alors tout est grâce. »

Un sage prit la parole et dit : « Un soir, un vieux sage s’adresse à son petit-fils en ces termes : “Mon enfant, il y a une lutte entre deux loups à l’intérieur de chacun de nous. L’un est mauvais et l’autre est bon.”

Le petit-fils réfléchit quelques instants, puis demande à son grand-père : “ Quel loup va gagner ?

– Celui que tu nourris. ” »

Un sage prit la parole et dit : « Nourris ce qu’il y a de bon, de juste, de lumineux en toi. Affame ce qu’il y a de mauvais, de négatif, d’obscur. Car c’est en pratiquant la vertu qu’on devient vertueux et c’est en développant nos mauvais penchants qu’on devient vicieux. Plus nous vieillissons, plus il devient difficile de nous transformer, d’éliminer les poisons qui nous détruisent ou de développer les qualités qui sommeillent en nous. Alors ne tardez pas, ô enfants des hommes ! Prenez dès à présent, et chaque jour, bien soin du jardin de votre âme. Arrosez-le, cultivez-le, enlevez les mauvaises herbes avant qu’elles n’envahissent tout. Restez attentifs à faire pousser les bonnes graines, aussi petites soient-elles. Soyez patients et persévérants. Bientôt vous en récolterez les fruits… »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la prudence. Ne soyez pas téméraires, impulsifs. Réfléchissez avant d’agir et mesurez les conséquences de vos actes. Mais la prudence n’est ni l’absence d’audace ni la frilosité. Être prudent signifie simplement faire preuve de lucidité et de responsabilité avant d’agir. Ce qui peut éviter bien des déboires. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la tempérance, cette juste mesure dans les plaisirs des sens. Évitez les deux extrêmes de l’ascétisme et de la débauche. L’ascète et le débauché ne respectent pas leur corps. Le premier le détruit par le manque et le second par l’abondance. »

 

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la patience. La vie nous éduque à la patience. Elle nous apprend à savoir attendre le bon moment pour agir, la maturation du temps pour récolter, la vertu de l’attente. La brûlure de l’impatience nous fait commettre bien des erreurs et nous plonge dans un état d’agitation intérieure qui trouble notre esprit. De même, cultivez la persévérance, c’est-à-dire la patience dans le travail et dans l’effort. Agissez avec constance jusqu’au but que vous vous étiez fixé et ne cédez pas au moindre obstacle ou découragement. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez l’esprit de service. Il n’y a aucune honte à servir les autres. Au contraire, l’homme noble aime servir le monde. Il aime mettre ses dons et ses capacités au service d’autrui et de la vie. Mais fuyez l’esprit de domination qui maintient l’homme dans l’esclavage de son ego. Celui qui aime dominer détruit son âme car il la nourrit du malheur d’autrui, de l’asservissement du monde et de la destruction de la vie. Un ancien Maître de la sagesse disait : “ À quoi sert à l’homme de conquérir l’univers, s’il vient à perdre son âme ? ” »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez le pardon et la miséricorde. Il est difficile d’être toujours juste, vrai, bon, fidèle, vertueux. Nous chutons parfois et avons du mal à mettre en acte nos principes. Il nous arrive de blesser les autres et nous avons besoin de leur pardon pour permettre à la relation de continuer de grandir. Apprenons de même à pardonner et donnons toujours une chance à celui qui regrette son acte. La vie agit de même pour nous. Elle est miséricordieuse et nous donne toujours plusieurs chances. Le pardon et la miséricorde ouvrent encore plus notre coeur. Une blessure transformée par l’amour du pardon devient source d’une vie nouvelle. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la tolérance. Ne soyez pas convaincus que vous seuls possédez la vérité. Le monde est divers, les sensibilités sont variées et ce qui est bon pour l’un ne l’est pas forcément pour l’autre. De même, ce qui est tenu pour vrai dans telle culture n’est pas forcément vrai dans telle autre. L’esprit de tolérance nous permet d’élargir notre compréhension de la vie et du monde. Il ne signifie pas pour autant que tout se vaut. La démocratie vaut mieux que la tyrannie, la justice que l’injustice, l’amour que la haine. Mais il y a parfois des manières différentes de vivre et de comprendre certaines vérités universelles, sans pour autant les contredire. Quant aux vérités ultimes, celles qui concernent Dieu ou l’Absolu, nul ne peut en avoir une claire compréhension, nul ne peut prétendre les posséder, car elles échappent à notre entendement. Ce qui est transmis dans chaque culture ou civilisation n’est toujours qu’un point de vue partiel et limité. Ceux qui sont enfermés dans une posture dogmatique sont sûrs du contraire et leur coeur ne peut accueillir la vie avec humilité et autrui dans un véritable respect. »

Un sage prit alors la parole et dit : « Écoutez, ô enfants des hommes, le sixième noble enseignement sur le juste comportement. Vivre est un art. Il faut apprendre à vivre. Adopter les attitudes justes pour progresser et se réaliser pleinement. Fuyez les extrêmes. La sagesse est dans la mesure et dans la subtilité. Le monde n’est ni à conquérir ni à mépriser ; la vérité n’est ni blanche ni noire ; le corps et la matière ne doivent être ni adulés ni rejetés. Comme disait un ancien maître de la sagesse : “ La vertu réside dans le juste milieu, entre deux extrêmes. ” »

Lisez la deuxième partie de cet article
 

yogaesoteric

18 mars 2019

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