Un vieux sage dit (2)

Lisez la première partie de cet article

Un sage prit la parole et dit : « C’est ainsi qu’il faut concevoir notre relation aux personnes et aux choses : un juste équilibre entre attachement et détachement. Il est tout à fait naturel que nous nous attachions à ceux que nous aimons. Il n’y a pas d’amour sans attachement. Mais il nous faut aussi apprendre à cultiver l’esprit de détachement, qui nous rappelle que nul être ne nous appartient, que chaque personne suit sa propre destinée. Ne laissons jamais le poison mortel de la possessivité envahir notre âme. Si nous ressentons de la jalousie, ce qui est aussi naturel, travaillons sur le détachement. Et acceptons l’idée de la séparation. Demain, celui ou celle que nous aimons devra peut-être nous quitter ou mourir. Il nous faut donc apprendre à nous attacher de tout notre coeur aux êtres qui nous sont chers, tout en cultivant le détachement de l’esprit, qui crée une certaine distance avec nos émotions et nous rappelle sans cesse que tout est impermanent, éphémère, que nul ne nous appartient. Gardons aussi à l’esprit que nous sommes seuls, que nous sommes nés seuls et que nous mourrons seuls. Ne cherchons pas à fuir cette solitude existentielle en nous attachant de manière excessive, dans une sorte de fusion, avec un autre être. Sachons que nous devrons tôt ou tard être séparés et apprenons à aimer en nous attachant de manière juste.

 

Il en va de même pour tout : profitons de ce que la vie nous donne d’agréable – santé, maison, travail, honneur – mais ne nous y attachons pas de manière excessive. Soyons prêts à perdre ce qui nous a été donné. Cette attitude juste procure ce qu’on appelle l’“équanimité” : une distance sereine face aux événements de la vie, agréables ou douloureux. Celui qui parvient à cette équanimité est le plus libre des hommes. Rien ne peut atteindre sa sérénité. Il pourra certes ressentir tristesse et colère, plaisir et déplaisir, crainte et espoir, mais plus rien ne troublera le fond de son âme, qui demeure dans la paix. Plus aucune émotion ne le submergera au point de lui faire perdre cette joie et cet amour qui le relie à l’Âme du monde. “Un conquérant sans pitié ni scrupules s’avançait avec ses troupes dans un pays ravagé. Tous les habitants fuyaient devant lui. Ceux qui restaient, trop malades ou trop vieux pour se déplacer, les envahisseurs les massacraient, faisant partout place vide. Le conquérant franchit la porte d’un monastère abandonné, traversa la cour, entra dans plusieurs cellules inoccupées et soudain s’arrêta. Un moine d’une cinquantaine d’années se tenait là, assis en lotus, immobile et calme, les yeux mi-clos. Le conquérant s’avança alors vers le moine qui semblait ne pas le voir, tira son sabre, en plaça le tranchant sur la gorge du moine et lui dit : ‘Tu cherches à me braver ? Tu prétends ne pas avoir peur ? Ne sais-tu pas qui je suis ? Ne sais-tu pas que je peux te transpercer avec ce sabre sans même cligner de l’oeil ?’ Le moine ouvrit les yeux, regarda tranquillement l’homme redoutable et lui dit : ‘Et toi ? Ne sais-tu pas qui je suis ? Ne sais-tu pas que je peux me laisser transpercer par ton sabre sans même cligner de l’oeil ?’” »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez l’émerveillement. Ne cessez jamais d’admirer la beauté, l’harmonie et la bonté du monde. Ne cessez jamais, tels d’éternels enfants curieux de tout, de vous interroger. “L’étonnement est le début de la sagesse”, disait un ancien maître de la sagesse, car il nous conduit à nous interroger et à découvrir l’invisible derrière les choses visibles. Il nous mène à la vérité. Il nous transporte jusqu’à l’Âme du monde. Fuyez au contraire l’indifférence à vous-mêmes, aux autres et au monde. Fuyez l’insensibilité, ne soyez jamais blasés, satisfaits ou repus. Car alors votre esprit s’endormira. Il se satisfera de quelques certitudes et ne saura plus questionner le monde. Il sera telle une vieille souche sans sève et votre vie sera sans saveur, sans intelligence et sans joie. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez l’effort. Travaillez sans cesse à vous améliorer et à réaliser quelque chose qui vous transforme. Oeuvrez pour vous-mêmes, pour les autres et pour le monde. Créez, agissez, ne laissez jamais passer une journée sans avoir accompli la moindre tâche, fût-elle tout intérieure. Prenez garde à la paresse ! Le repos est nécessaire après l’activité. Mais la paresse n’est pas le repos : c’est l’absence de force et de motivation. C’est le refus de l’effort qui donne l’illusion du bien-être et du repos. Quel mensonge ! Notre corps et notre âme ont besoin d’activité, de travail, d’action pour s’épanouir. La paresse fatigue plus qu’elle ne repose. Elle nous alourdit et nous décompose. Sans action, sans effort, sans réflexion et sans activité, nous pouvons parfois encore être de quelque utilité, mais plus pour nous-mêmes. Nous avons cessé de croître et de prospérer. Nous nous sommes résignés au déclin de notre être et nous survivons en attendant la mort, sans même la désirer. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la douceur. Soyez doux et tendres envers vous- mêmes et envers les autres. Les fruits de la douceur sont la paix du coeur et la paix du monde. Ne répondez jamais à la violence par la violence, à l’insulte par l’insulte, à la colère par la colère. La violence conduit à la destruction de soi-même et du monde. Parfois, il est juste que vos colères puissent s’exprimer. Mais apprenez à les maîtriser, à les arrêter au bon moment. Ne vous laissez pas posséder par elles, car elles pourront vous conduire à des actes que vous regretterez amèrement. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la bonne humeur, la gaieté, l’humour ! Rien n’est pire qu’un homme sans humour, qui ne voit dans l’existence que le sérieux, le tragique ou l’utile. L’humour ne sert à rien, mais il n’y a rien de plus indispensable à une existence heureuse. L’humour ne nie pas le tragique, mais le détourne, crée un recul avec la douleur, et peut transformer les larmes en rire. Essayez de rire chaque jour, à commencer de vous-mêmes ! La bonne humeur et la gaieté entretiennent un regard positif sur la vie et nous permettent de mieux accueillir les événements difficiles qui surviennent.

Une mère sermonne son garçon : “Écoute, si tu es sage, tu iras au ciel, et si tu n’es pas sage, tu iras en enfer.” Le garçon réfléchit quelques secondes : “Et qu’est-ce que je dois faire pour aller au cirque ?” »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la foi et la confiance. Ce sont les deux bâtons sur lesquels vous appuyer pour avancer dans la vie. S’il n’avait foi et confiance en sa mère, le petit enfant ne pourrait prendre aucun risque. Il ne pourrait grandir intérieurement, il ne saurait se confronter au monde. Adultes, nous pouvons considérer que l’Âme du monde est notre mère. Elle veille sur nous avec bienveillance et nous donne la force pour avancer. Ayons foi en elle, ayons confiance en la vie, et prenons le risque de connaître, de marcher, de partir, de changer. La vie nous guidera toujours vers le meilleur. Chassons de notre esprit l’inquiétude qui le paralyse et nous empêche de grandir. Chassons l’anxiété qui nous ronge l’âme. Chassons le doute qui nous rend incapable de faire confiance à nos propres capacités ; qui nous rend incapables de nous appuyer sur les autres et de saisir les mains tendus ; qui détruit la foi spontanée que tout enfant a en la vie et qui est un don si précieux. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la générosité. Soyez généreux envers la vie et la vie sera généreuse envers vous. Un ancien Maître de la sagesse disait : “Il y a plus de joie à donner qu’à recevoir.” Découvrez cette loi profonde du coeur humain : plus vous serez ouverts et généreux, plus vous serez heureux. À l’inverse si vous êtes mesquins, avares, égoïstes, votre coeur se fermera. Vos possessions et vos richesses ne vous apporteront aucun bonheur profond, aucune joie véritable. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez le courage et la force. Apprenez à dépasser vos peurs. Confrontez-vous à elles et, petit à petit, vous apprendrez à les vaincre. Certaines disparaîtront totalement, d’autres subsisteront mais ne vous paralyseront plus. Vous découvrirez que vous êtes plus forts qu’elles. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la bienveillance et la bonté. Il y a des forces de bonté enfouies dans le coeur de tout être humain. Réveillez-les ! Voyez comme elles sont puissantes ! La bonté transforme toute amertume en douceur et toutes ténèbres en lumière. Ne jugez pas les autres. Soyez compréhensifs et patients. Voici l’histoire d’un homme très religieux et d’une prostituée qui vivent dans la même rue. Lui prie sans cesse, mène une vie pieuse et austère et enseigne le chemin de Dieu. Il croit être un saint. Un jour, il vient sermonner la prostituée qui vend son corps pour survivre. “Tu es une grande pécheresse. Ton destin sera terrible.” La pauvre femme supplie Dieu de lui pardonner. Mais elle doit continuer à exercer son métier, n’ayant pas d’autre moyen de subsistance. L’homme religieux et la prostituée meurent le même jour. Les anges viennent chercher la femme et l’emportent au ciel tandis que les démons réclament l’âme du religieux… »

 

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez l’esprit de vérité. Chassez les ténèbres de l’ignorance par la recherche sincère de ce qui est vrai. Ne mentez pas, car le mensonge est un des principaux poisons de l’âme. Il détruit en vous le sens du vrai ; il fausse toute relation et vous empêche de progresser. Parfois, cependant, l’amour peut conduire à taire des vérités trop douloureuses qui blesseraient inutilement un être. Mais soyez attentifs à ne pas vous servir de ce juste prétexte pour vivre dans le mensonge, ou surprotéger des personnes qui préféreraient connaître la vérité, sur leur état de santé, sur une infidélité ou un état amoureux, par exemple. N’ayez pas peur de la vérité, même si elle vous fera parfois souffrir. La vérité vous conduira vers des pays inconnus, vers des horizons nouveaux. Il vous faudra quitter le confort de vos habitudes mentales et de vos certitudes. Mais la vérité libérera votre esprit de toutes ses servitudes. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la souplesse. La vie est en devenir permanente. La souplesse vous permet de vous adapter au mouvement de la vie. Elle vous permet de réagir avec justesse à un événement imprévu, à une attitude d’autrui qui vous surprend. Soyez souples comme le roseau, qui sait plier lorsque le vent est fort, mais qui ne rompt jamais. La rigidité, au contraire, vous rend inaptes au flux de la vie. Elle vous fixe dans des attitudes et des principes qui peuvent parfois se révéler inappropriés aux circonstances ou à l’évolution de votre être. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la justice, cette vertu suprême sans laquelle rien ne vaut. Car quelle valeur a le courage d’un tyran ? La justice sous-tend toute action morale. Sans justice, aucune vie commune n’est possible. Sans règles qui apparaissent comme moralement justes, qui se veulent équitables et bien appliquées, sans discernement du vrai et du faux et sans sanction de la faute, aucune société n’est viable. Rien, sans doute, ne nous met plus en colère que l’injustice. Tant enfant qu’adulte. Car nous ressentons toujours l’injustice comme inacceptable. Mais distinguons bien l’injustice qui vient des hommes et contre laquelle nous devrons toujours combattre de toutes nos forces, de l’injustice que nous percevons de la vie. La vie nous apparaît en effet parfois injuste : telle personne est mieux lotie par le destin que telle autre ; nous avons fait un travail formidable et il n’est pas reconnu ; un homme mauvais va avoir une longévité et une chance incroyables, alors qu’un homme bon mourra précocement ou sera durement frappé par le sort. Il y a bien, en effet, une injustice apparente dans la vie. Mais pour nous qui croyons en l’immortalité de l’esprit, nous pensons que nul ne peut savoir ce qui est peut-être advenu dans une vie passée et ce qui adviendra certainement dans une vie future. Nous croyons que la justice de la vie ne peut se mesurer à l’aune de cette seule existence terrestre. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez l’humilité. Être humble, ce n’est pas avoir une mauvaise opinion de soi, c’est avoir une juste opinion de soi-même et être à sa place. Être humble, c’est savoir qu’on est toujours perfectible, qu’on a encore besoin de progresser, qu’on a besoin des autres. L’orgueilleux, au contraire, pense n’avoir besoin de personne. Il se croit supérieur aux autres et a une fausse image de lui-même. Bien souvent, l’orgueilleux commet de grandes erreurs de jugement, car il est aveuglé par le soleil de son ego. L’orgueilleux est ridicule. »

Un sage prit la parole et dit : « Cultivez la tempérance, cette juste mesure dans les plaisirs des sens. Évitez les deux extrêmes de l’ascétisme et de la débauche. L’ascète et le débauché ne respectent pas leur corps. Le premier le détruit par le manque et le second par l’abondance. »

Un sage prit la parole et dit : « Lorsque l’âme se relie à sa source, elle peut entrer en dialogue avec elle de nombreuses manières : ce que les religions appellent “prière”. Le dialogue avec la source peut prendre la forme de l’adoration pour les croyants qui vénèrent un Dieu personnel. Cette dépendance au divin nourrit et fortifie l’âme des croyants, plus que tout rituel ou acte religieux extérieur. La prière peut aussi prendre la forme de demande ou de louange. Elle peut rester aussi un “coeur à coeur” silencieux dans lequel l’homme savoure l’amour qui émane de l’Âme du monde, quel que soit le nom qu’il lui donne. Nul besoin de croire en Dieu ou en une quelconque divinité pour prier, pour remercier, pour demander, pour sentir son coeur vibrer à l’unisson du Coeur du monde. Toute parole, toute pensée, tout regard adressé à la force mystérieuse qui anime l’univers nous relie à l’Âme du monde et porte des fruits. »

Un sage prit la parole et dit : « Lorsque vous êtes relié à l’Âme du monde, celle-ci vous inspire des idées soudaines que nous appelons “intuitions”. L’intuition est là pour nous guider au-delà de la logique rationnelle. Lorsque cette dernière est insuffisante pour évaluer une situation, l’intuition peut nous avertir d’un danger, nous guider dans une voie nouvelle, nous indiquer le caractère positif ou négatif d’une rencontre. L’intuition peut prendre aussi la forme d’une inspiration artistique ou intellectuelle. L’Âme du monde inspire à l’artiste ou au penseur une forme ou une idée. Apprenez à développer ce sens intérieur en vous reliant à votre source. Accueillez les inspirations créatrices. Laissez-vous guider par votre intuition. Vérifiez-la sur de petites choses et vous apprendrez progressivement à la reconnaître et à l’écouter. Vous pourrez alors l’utiliser pour des choix plus essentiels. »

Un sage prit la parole et dit : « Soyez vigilants, ô enfants des hommes, à toutes vos pensées. Elles sont aussi importantes que vos actions. Les pensées créent une énergie et expriment une intention. Cette énergie et cette intention ne sont jamais sans effet, tant à l’intérieur de vous-même, que dans l’univers. Une mauvaise pensée contre une personne, par exemple, a des répercussions, tant pour elle que pour vous-même. La personne peut être atteinte et blessée sans qu’aucun acte n’ait été posé, ni aucune parole prononcée. De même votre âme sera assombrie par l’énergie négative produite par la pensée. À l’inverse, une pensée aimante et positive pourra aider une personne à distance et rendra votre âme plus lumineuse. Les pensées que vous formulez à l’égard de vous-même ou de votre vie ont les mêmes effets positifs ou négatifs. Plus vous “broyez du noir”, et plus votre vie ira mal. Mais développez des pensées positives, optimistes, confiantes, et votre existence s’embellira, des événements heureux surgiront, des difficultés se résoudront. »

Un sage prit la parole et dit : « Une jeune fille, effrayée par la violence du courant, n’ose pas traverser la rivière à gué. Un vieux moine lui propose de la porter sur l’autre rive, sous les yeux réprobateurs d’un jeune moine. La jeune fille accepte. À la fin de la journée, lorsqu’ils arrivent en vue du monastère, le jeune moine dit à l’ancien : “Ce que tu as fait est honteux et interdit par notre règle !

– Qu’est-ce qui est honteux ? Qu’est-ce qui est interdit ?

– Comment ? Tu as oublié que tu as porté une belle jeune femme ?

– Ah oui…, se souvient le vieux moine en riant. C’est vrai. Mais il y a plusieurs heures que je l’ai laissée sur l’autre rive, tandis que toi, tu la portes toujours sur ton dos !” »

Lisez la troisieme partie de cet article
 
 



yogaesoteric


25 mars 2019

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