L’Eleuthérocoque – Un adaptogène à découvrir ou redécouvrir (1)

 

Noms latins :

Eleutherococcus senticosus (Max.) = Ancathopanax senticosus (Rupr. et Max.)

Noms français :

Eleuthérocoque
Eleuthéro
Buisson du Diable
Ginseng des pauvres
Giseng russe
Ginseng sibérien
Racine de la Taïga

Noms anglais :

Eleuthero
Siberian ginseng

Noms chinois :

Wuchaseng
Ci-Wu-Jia

Étymologie

Son nom vient du grec « Eleutheros » qui signifie : libre… Un beau programme en perspective !

Botanique

Originaire d’Asie du nord et de Russie, l’Éleuthérocoque est fréquent depuis la Sibérie orientale, aux provinces chinoises de Shanxi et Hebei, au nord du pays, à la Corée du sud et jusqu’au Japon. Parmi la trentaine d’espèces d’Eleuthérocoques existante, seules quelques-unes sont utilisées en phytothérapie. C’est le cas de l’Eleutherococcus senticosus. Il est plus répandu que ses cousins de la même famille (Panax ginseng et Panax quinquefolius) car il tolère des climats plus froids. Il peuple les forêts de feuillus et de cèdres, pousse en plaine ou en moyenne montagne.

Cet arbuste vivace aux épines acérées peut mesurer de 1.5 à 3 mètres de hauteur. Les branches jeunes sont couvertes d’épines qui disparaissent sur les branches plus âgées, recouvertes d’une écorce grise pâle ou brunâtre. La tige porte des feuilles caduques, alternes, composées-palmées de 3 à 5 folioles et recouvertes, sur les deux faces, par de nombreuses épines. Elles sont aussi longuement pétiolées. Les fleurs de l’Éleuthérocoque sont petites et groupées en ombelles globuleuses terminales. Elles ont la particularité d’être de couleur différente selon leur sexe. Ainsi, les fleurs mâles sont violacées et les fleurs femelles sont plutôt jaunâtres comme celles qui sont hermaphrodites. Les fruits de l’Éleuthérocoque sont des baies (drupes) de couleur noire et charnues contenant 5 graines. Ses racines sont jaune grisâtres à brun clair et ridées longitudinalement.

Culture et Cueillette

Sa culture demande des sols humides et bien ensoleillés. On récolte la racine à l’automne (plus rarement les feuilles) car c’est à ce moment que la plus grande concentration des substances actives se trouve dans les racines afin de préparer l’hiver. Tu auras donc tout intérêt à la récolter peu avant que ses feuilles ne tombent. Pour son utilisation, la racine est séchée puis réduite en poudre.

Ne pas confondre avec Acanthopanax Gracilistylus qui a d’autres propriétés.

Les professeurs Shan, Yoshita, Sugiura, Yamashita ont trouvé expérimentalement que la variété Gracilistylus agissait sur l’activité des cellules T et B en supprimant la production d’interféron-gamma et immunoglobuline, ouvrant ainsi la voie à des applications thérapeutiques dans les maladies auto-immunes et allergiques. 

Histoire

L’Éleuthérocoque fait partie des plantes les plus anciennes (environ 4.000 ans) de la médecine chinoise qui fait grand usage de la famille des Araliacées.

Pour les médecins chinois, cette plante tonifie le « Qi » (l’énergie vitale) de la rate et de l’estomac, réchauffe les reins qui aident, à leur tour, le « Yang » (le principe masculin) à réchauffer la rate. Il augmente aussi, selon eux, le « Qi » du cœur et calme le « Shen » (l’esprit). Il fortifie le sang et débloque les stases. Les médecins chinois l’utilisent aussi en prévention et en tonique général.

La médecine chinoise attribue à sa racine le pouvoir d’accroître la longévité, d’améliorer l’appétit (contre l’anorexie ou en convalescence), le tonus et la mémoire et de participer à la bonne santé de l’organisme, en général. Il est aussi utilisé pour traiter les douleurs lombaires, celles des reins et des genoux, donc, tu l’as compris, les rhumatismes en général mais aussi pour contrer la fatigue.

La plante sera aussi prescrite si le sommeil est perturbé par les rêves, en cas de faible concentration ou de dépression légère mais aussi pour soigner les bronchites et les affections cardiaques.

De plus, la MTC (médicine traditionnelle chinoise) l’utilise pour des problèmes dus à une circulation périphérique médiocre avec des signes de stagnation du sang.

Enfin, Ci-Wu-Jia est souvent utilisé pour soutenir la santé des personnes âgées, des femmes et même de jeunes personnes comparativement aux autres Ginsengs.

Les Russes ne « découvrent » l’Éleuthérocoque qu’en 1855, lorsque deux scientifiques l’identifient, pour la première fois, lors d’un voyage au nord de leur pays. Mais c’est surtout vers la fin des années 1950, où l’on recherchait un substitut au Panax ginseng qui devenait trop onéreux et trop rare, victime d’une cueillette excessive, que de nombreuses recherches furent faites sur l’Éleuthérocoque qui semblait posséder de grandes vertus médicinales. Ce sont les docteurs Brekhman et Lazarev qui commencèrent ces études sur des substances produisant un état de résistance générale non-spécifique définissant, ainsi, le concept d’« adaptogène » : la plante permettait à l’organisme de s’adapter aux divers stress tout en provoquant un minimum d’effets indésirables. Elle exerçait une action régulatrice sur de nombreux organes ou fonctions physiologiques. Ces nombreuses études cliniques ont montré non seulement une amélioration physique et mentale chez des personnes stressées mais aussi un effet immunostimulant.

L’Éleuthérocoque ayant la réputation d’accroître les performances sportives, il est devenu très populaire auprès des athlètes de l’Union soviétique ce qui expliquerait leurs exceptionnelles performances… Il est estimé que, pour l’année 1976, environ 3 millions de Russes consommaient de l’extrait d’Éleuthérocoque, incluant les cosmonautes russes qui étaient en orbite autour de la Terre. L’Éleuthérocoque porte d’ailleurs, pour cette raison, le surnom de « plante secrète des Russes » !

Autre anecdote : de l’Éleuthérocoque a été distribué à la population soviétique à la suite de la catastrophe de Tchernobyl, en raison de sa possible efficacité sur les radiations et les intoxications chimiques…

C’est seulement vers 1975 que l’Éleuthérocoque a commencé à être utilisé comme plante médicinale en Europe de l’Ouest et en Amérique du Nord. Les données recueillies par les Russes ont été publiées en anglais dans les années 1980. Que ces études aient été plus ou moins bien menées ou que le concept même de substance adaptogène s’insère mal dans les protocoles de recherche de la médecine moderne, aucun essai n’a encore permis de comprendre le fonctionnement exact de ses propriétés. La magie des plantes…

La Commission E et l’O.M.S. reconnaissent l’Éleuthérocoque comme un tonique qui peut soutenir et stimuler l’organisme en cas de fatigue et de faiblesse lorsque la capacité de travail ou de concentration est amoindrie ou au cours d’une convalescence. En Allemagne, il est reconnu pour favoriser l’augmentation des lymphocytes T.

Constituants

Si tu es herbaliste ou amateur éclairé, ce chapitre te confortera dans ce que tu sais déjà. Sinon, cela te guidera dans un début d’explication de ses propriétés. On te rappelle, néanmoins, qu’il est bon de ne pas oublier la notion de Totum… Selon ce que tu veux faire de la plante, on t’indique la meilleure extraction en relation avec les composants.

Les structures appelées « éleuthérosides » n’appartiennent pas à un groupe chimique homogène et certains d’entre eux ne sont même pas des hétérosides. Aucune structure proche des ginsénosides, caractéristiques du Ginseng, n’a été identifié dans cette plante. On trouve cependant des éleuthérosides à structure stéroïdiques comme dans le Ginseng.

La racine contient :

– des saponosides triterpéniques (extraction eau/vinaigre/alcool)

> Éleuthérosides A – G : Les propriétés adaptogènes de l’Éleuthérocoque dont sa faculté de stimuler le système nerveux central, avec un fort effet anti-hypnotique, et son effet sur les glandes endocrines (surrénales et glandes sexuelles) sont attribuées, entre autres, à ces hétérosides triterpéniques tétracycliques apparentés aux saponosides.

– des composés phénoliques (extraction eau/vinaigre/alcool)

> Dérivés phénylpropaniques (coniférine, syringine ou éleuthéroside B) : La présence de syringine expliquerait l’effet hypoglycémiant de la plante.

> Acides phénoliques (acide chlorogénique, acide caféique)

> Coumarines (isofraxidine)

> Lignanes (sésamine ou éleuthéroside B4, liriodendrine ou éleuthéroside E, syringa-résinol-diglucoside ou éleuthéroside D)

– des glycanes : polysaccharides (extraction eau/vinaigre)

> Eleuthéranes (A à G) : Ces polysaccharides sont de haut poids moléculaire. Ce sont des immunostimulants (action sur les macrophages et les lymphocytes), préventifs des maladies bactériennes et virales, surtout employés dans le but d’augmenter la résistance de l’organisme de manière aspécifique.

– des terpénoïdes (extraction eau/vinaigre/huile/alcool)

> Saponines

* Eleuthérosides I à M (β-hérédine ou éleuthéroside K, hédérasaponine B ou éleuthéroside M)
* Senticosides A à F (glycosides de l’acide oléanolique)

> Stérols

* Éleuthéroside A (Daucostérol)
* Sistostérol

– des provitamines A (caroténoïdes) : Bêta-carotène (extraction huile)
– des vitamines : C (extraction eau/vinaigre/alcool) et E (extraction huile)
– des acides aminés (extraction eau/vinaigre/alcool), des minéraux et des oligo-éléments : Calcium, Phosphore, Potassium, Magnésium, Sodium, Aluminium, Fer, Brome, Cuivre, Zinc, Chrome, Germanium (extraction eau/vinaigre).
– des résines (extraction alcool).

Propriétés

L’Éleuthérocoque est un adaptogène, comme le Ginseng. Il améliore la capacité de l’organisme à s’adapter aux différents stress ou agressions qu’il peut rencontrer : physiques, psychiques, intellectuelles, énergétiques, climatiques, bactériens… lui permettant de ramener à la normale des constantes physiologiques perturbées par ces conditions difficiles.

L’Éleuthérocoque a, néanmoins, une action plus physiologique que son cousin, le Panax ginseng, qui est plus indiqué dans les troubles psychosomatiques. C’est donc l’adaptogène des sportifs ou de la préparation à une activité intellectuelle intense comme chez les étudiants, par exemple. Chez les émotifs, on lui préfèrera le Panax ginseng.

Son intérêt vient aussi de deux caractéristiques principales :

– une action continue même après l’arrêt de la prise (de 3 à 4 semaines) ;
– une amélioration des réactions de défense de l’organisme mais sans s’y substituer.

1) Un adaptogène (propriété principale)

Agissant contre le stress, l’Éleuthérocoque équilibre le système nerveux central en agissant, au besoin, soit comme un stimulant soit comme un tranquillisant. Il augmente l’ACTH et la LH. Un de ses composants, la syringine, augmente les corticostéroïdes en 3 mois. En normalisant la synthèse des neurotransmetteurs, il permet aussi de lutter contre l’insomnie et la névrose. L’Eleuthérocoque a été expérimentée sur des souris privées de sommeil pendant 72 heures. La privation de sommeil entraîne des modifications comportementales comme : un temps d’attente réduit pour rentrer dans une chambre noire, des troubles de la locomotion, une difficulté à évaluer un labyrinthe en Y. L’Eleuthérocoque rétablit de manière significative l’ensemble des modifications comportementales et biochimiques.

Enfin, il stimule la synthèse de l’A.D.N. et des enzymes réparatrices cellulaires : c’est probablement ce qui lui confère la propriété de ralentir le vieillissement puisqu’il agit contre le stress oxydatif (4). Ce n’est toutefois pas la Fontaine de Jouvence ! On l’utilisera donc pour combattre le stress et les tensions nerveuses mais aussi en cas de problèmes de sommeil et/ou psychiques. Il augmente le sentiment de bien-être général.


Lisez la deuxième partie de cet article

 

yogaesoteric
30 septembre 2019

 

Also available in: English

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