Agni (le feu digestif) & Ama (les toxines) selon la Tradition Ayurvédique (1)
Représentation de l’AMA
Représentation d’AGNI
Agni est l’élément Feu, qui gouverne toute transformation. La fonction première d’agni est la digestion, l’absorption, l’assimilation, et la transformation de la nourriture et des sensations en énergie. Si vous rendez grâce à votre agni, vous serez béni et doté d’une santé parfaite.
Agni est la principale source de vie. Sans agni, la vie n’est pas possible. En Ayurveda, il y a la coutume de dire qu’un homme est aussi vieux que son agni. Si agni est en condition optimale, le système immunitaire du sujet est sain. Quand le feu métabolique est robuste, une personne peut vivre une vie longue et en santé. Quand agni ralentit, la santé de la personne se dégrade. Quand son feu vital est éteint, la mort suit rapidement. Avez-vous déjà touché un corps sans vie ? Les corps morts sont froids parce qu’il n’y a pas d’agni. Un corps vivant est chaud. Un yogi en samadhi et une personne morte se ressemblent. Dans les deux cas, le cœur et la respiration s’arrêtent. En samadhi, une personne semble inconsciente, et les pupilles sont dilatées. Mais il y a une différence : même en samadhi profond, le corps est chaud à cause d’agni, tandis qu’un corps sans vie est froid comme la mort.
Agni est également en lien avec la maturation. Un pot d’argile non cuit ne dure pas très longtemps, mais si vous cuisez le pot, il devient solide et peut alors durer très longtemps. La fonction d’agni n’est pas seulement la digestion, mais aussi d’apporter la maturation aux tissus. La tonicité de chaque tissu (dhatu) est maintenue par son agni. Le mot « tonique » vient de l’anglais « tone » (= tonicité), et la plupart des toniques attisent agni.
Le concept des toniques est très vieux en Ayurveda, et la tonification des tissus est entretenue par agni. Si nous maintenons un agni en équilibre, nous pouvons vivre une vie longue et en pleine santé. L’Ayurveda est la science de la longévité, et l’une de ses importantes thérapies est rasayana chikitsa (thérapie du rajeunissement). Rasayana signifie littéralement « entrer dans le rasa dhatu » (plasma), et donc attiser agni.
La médecine Ayurvédique se focalise sur la qualité et l’état d’agni. La médecine interne Ayurvédique est appelée kaya chikitsa, ou traitement des maladies qui affectent le corps, l’esprit et la conscience. Kaya signifie corps, et chikitsa signifie thérapie. Kaya vient de ka, qui signifie « terre », et ya signifie « circulation » ; ainsi kaya est « ce au sein duquel circule les substances nutritives ». Agni remplit le rôle de maintien de la circulation conjointement aux trois doshas.
Si notre agni est robuste et sain, il apporte du parfum à la vie. Quand agni est déséquilibré, l’opposé apparaît. Quand une personne a une odeur dégoûtante ou une mauvaise haleine, cela indique un agni perturbé. Une telle personne peut utiliser du parfum, mais il subsiste un parfum et une fragrance du corps, qui est agni.
Les fonctions normales d’Agni
Pakti – digestion, absorption, et assimilation de nourriture et expérience sensorielle ; produit nutrition, savoir et compréhension.
Darshanam – responsable de la perception visuelle.
Matroshna – matra signifie mesure ; ushna signifie température. Agni maintient une température normale.
Prakruti varna – maintient la constitution et la couleur du teint.
Shauryam – donne confiance, courage, et intrépidité.
Harsha – crée joie, gaieté, bonne humeur, rire et contentement.
Prasada – donne clarté mentale ; apporte l’intégrité.
Raga – crée affection, intérêt, enthousiasme, et qualité colorée.
Dhatu poshanam – nutrition tissulaire.
Ojah kara – production d’ojas ; nécessaire pour l’immunité.
Tejah kara – production de tejas ; nécessaire pour le maintien de la semi-perméabilité des membranes et pour l’activité métabolique cellulaire.
Pranakara – production et utilisation du prana (force vitale) dans la respiration générale et cellulaire.
Buddhi – fournit la capacité de raisonnement au mental ; la pensée logique ; la discrimination.
Medhakara – maintient l’intelligence et le flux de la communication cellulaire.
Dhairaym – donne patience, stabilité, et confiance en soi.
Dīrgham – maintient l’espérance de vie.
Prabha – crée un teint lumineux et une bonne mine.
Bala – fournit force et vitalité.
De nombreux facteurs, tels qu’un style de vie nuisible, une alimentation préjudiciable, de mauvaises combinaisons alimentaires et des émotions refoulées, peuvent provoquer une aggravation des doshas corporels. Cela perturbe rapidement agni, avec pour résultat que la nourriture ne peut pas être digérée efficacement. La nourriture non digérée se transforme en une substance morbide, toxique et collante, appelée ama.
Ama est la cause première de nombreuses maladies. La présence d’ama dans le système conduit à la fatigue, et à la sensation de lourdeur. Cela peut induire la constipation, l’indigestion, des flatulences, de la diarrhée, une mauvaise haleine, une perturbation des goûts, et de la confusion mentale. La langue se recouvre d’une épaisse couche, et il peut y avoir des douleurs généralisées dans le corps, et de la raideur.
De par l’importance capitale d’agni dans le maintien de la santé, il est important d’avoir un agni équilibré, appelé sama agni.
Les quatre variétés d’Agni
Sama Agni (métabolisme équilibré)
Quand tous les doshas sont en équilibre selon la constitution, alors agni maintient son état d’équilibre et fournit un métabolisme équilibré. Une personne qui a un agni équilibré peut manger presque n’importe quel type de nourriture en toute saison sans aucun signes ni symptômes défavorables. La digestion, l’absorption et l’élimination sont toutes normales. Ceci constitue l’état de parfaite santé. Aucune nourriture ni aucun environnement ne peut contrarier les personnes dotées d’un sama agni. Elles ont un esprit calme, paisible et aimant, et une vision claire de la conscience et du bonheur. Une bonne santé, la longévité, un surplus d’ojas, tejas et prana, et une bonne immunité sont toutes des vertus d’un agni en équilibre.
Vishama Agni (métabolisme irrégulier)
En conséquence d’un vata aggravé, agni peut subir des changements drastiques. Il devient erratique, et produit un appétit irrégulier, une digestion variable, une distension abdominale, de l’indigestion, des gaz, de la constipation, et des coliques. Même une petite quantité de nourriture produit des gaz. A terme, cela peut aboutir à une diarrhée, une sensation de lourdeur après le repas, et des borborygmes dans les intestins. La personne atteinte peut avoir la peau sèche, les articulations qui craquent, des douleurs de sciatique, des maux de dos, ou de l’insomnie. Emotionnellement cela peut déboucher sur de l’anxiété, de l’insécurité, de la peur, et d’autres problèmes neurologiques ou mentaux. L’individu peut avoir des envies de nourriture frite, chaude et épicée. La qualité froide de vata diminue agni, et la qualité mobile le rend fluctuant, aboutissant à un métabolisme irrégulier. Eventuellement ama est produit et peut se voir sur la langue sous la forme d’une couche brun-noir. La bouche sèche, les gencives récessives, les spasmes musculaires, et la plupart des autres troubles vata se mettent en place parce qu’il y a vishama agni.
Tikshna Agni (aiguisé ; hyper-métabolisme)
A cause des attributs chaud, aiguisé/tranchant, et pénétrant de pitta, agni peut devenir intense quand pitta dosha est augmenté. Cela cause un hyper-métabolisme. Dans cette condition, l’individu a le désir de manger fréquemment de grandes quantités de nourriture. Après la digestion, il pourra avoir la gorge, les lèvres et le palais secs, de même que des brûlures d’estomac, des bouffées de chaleur, et de l’indigestion acide. Les qualités liquide, acide/aigre, et chaude de pitta peuvent produire de l’hyperacidité, des gastrites, de l’hypoglycémie, de la colite, de la diarrhée, et de la dysenterie. Une douleur dans le foie, des nausées, des vomissements et diverses conditions inflammatoires peuvent survenir. Tikshna agni dans certains cas peut mener à la colère, à la haine et à l’envie. La personne juge et critique tout et tout le monde. Le sujet peut être victime de fringales intenses pour les sucreries. Selon l’Ayurveda, la plupart des troubles pitta ont leur origine en tikshna agni.
Manda Agni (émoussé/engourdi ; hypo-métabolisme)
Les molécules d’eau et de terre de kapha dosha sont lourdes, lentes, et fraîches, ce qui inhibe les qualités légères, tranchantes, et chaudes d’agni. En conséquence, un excès de kapha peut rendre agni émoussé, aboutissant à un métabolisme lent. Une personne avec manda agni peut jeûner à l’eau pour quelques jours et quand-même prendre quelques kilos. L’individu ayant ce type d’agni ne peut pas digérer correctement même un régime normal. Même sans manger, il y a de la lourdeur dans l’estomac, des refroidissements, de la congestion et de la toux. Une salivation excessive, la perte de l’appétit, des allergies, de la nausée, et des vomissements de mucosités peuvent survenir. Certaines personnes peuvent montrer de l’œdème, de l’obésité, de l’hypertension, et du diabète. Il y aura de la léthargie, un sommeil excessif, une peau moite et froide, et une faiblesse généralisée dans le corps. Au niveau mental, il peut y avoir de l’attachement, de l’avarice, et de la possessivité. Le sujet peut avoir de fortes fringales pour les aliments chauds, tranchants, secs et épicés. Presque tous les troubles kapha trouvent leur source en manda agni.
Résumé pratique
Fonction d’agni
Agni nous aide à digérer tout ce qui entre dans le corps par le biais des 5 sens :
– matière nutritive (nourriture, boissons, huile de massage, etc…)
– histoires, images, impressions, toute info qui entre par l’un des 5 sens, et qui sera traitée par le corps
– réactions émotionnelles de l’entourage auxquelles nous assistons, de même que nos propres réactions émotionnelles
– toutes sortes d’informations, nos pensées, notre connaissance
Surcharges pour Agni
Au niveau alimentaire et hygiène de vie :
– trop manger
– repas lourd à digérer : friture, trop gras, trop « dense » (oléagineux secs, fromages à pâte (semi-)dure, plats pas assez cuits,…), conserves, plats précuits, nourriture « vieille » (préparée il y a plus de 24h) ou trop cuite.
– excès d’aliments crus et/ou de fruits
– aliments trop froids (glace, boissons sortant du réfrigérateur…)
– trop de produits laitiers (sauf le lait cru, et le lassi)
– consommer des desserts après les repas (il vaut mieux les consommer seuls, en dehors des repas, ou les éviter)
– produits pour la peau qui contiennent des huiles minérales (paraffine, stéarine, etc., qui obstruent les pores et l’asphyxient)
– excès de produits sucrés
– dormir pendant la journée, surtout après les repas
– manque de sommeil
– surmenage, stress
– se lever après le lever du soleil
Au niveau des 5 sens :
– images de télévision trop éblouissantes (films d’action, couleurs trop vives…)
– films trop « prenants » (thriller, suspense, etc.)
– musique trop forte et/ou trop rythmée
– pollution sonore (train, avion, rue, etc.)
– excès de rapports sexuels
– (excès d’)odeurs synthétiques, parfums, etc.
Au niveau des émotions :
– choc émotionnel
– décès
– perte
– grosse déception
– émotions négatives
– tensions et incertitudes
– émotions réprimées, non exprimées
– instabilité
– problèmes familiaux
Au niveau mental :
– excès d’information
– trop de mails, de courrier,…
– excès d’études
Fortifiants d’agni
– Alimentation : herbes et épices (ail, basilic, cannelle, cardamome, clou de girofle, curcuma, estragon, eucalyptus, fenouil, fénugrec, gingembre frais et sec, laurier, menthe, noix de muscade, oignon, safran, sarriette, sauge, thym, cumin, cayenne, graines de moutarde, poivre noir), privilégier les aliments frais et non transformés.
– Les sens : lumière solaire (bains de soleil), chaleur (frictions du corps à l’huile), le silence, les couleurs chaudes (pas trop vives), les goûts acide, salé et piquant.
– Les émotions : l’humour (rire est très bénéfique pour agni, surtout après les repas), et le pranayama (exercices de respiration tels que ceux pratiqués pendant le yoga).
– Le mental : clarifier ses idées, mettre de l’ordre dans ses pensées.
Signes de manque d’agni
– Alimentation : troubles digestifs (douleurs, ballonnements, crampes, hyperacidité gastrique, diarrhée, vomissement de bile ou de glaire, glaires dans les selles, estomac paresseux, grondements, constipation, gaz, odeur de selles putride…), langue « chargée » (recouverte d’une couche de mucus plus ou moins épaisse, à vérifier le matin au réveil), appétit variable, diminué ou perturbé.
– Les sens : sensation d’être dépassé, de ne pas savoir face face (« Laissez-moi tranquille ! »)
– Les émotions : difficulté à les gérer, attitude « fight or fly » (« se battre ou s’enfuir »)
– Le mental : désintérêt pour l’information et l’environnement
Lisez la deuxième partie de cet article
yogaesoteric
19 mars 2020
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