Descentes avec gendarmes en cagoule dans un monastère de Câmpulung
12 moines ont disparus sans trace en une nuit. Les explications officielles n’apportent aucune clarification
d’Angela Anghel
Au printemps de l’année 2003, un groupe de commando des troupes antiterroristes est descendu au monastère de Negru Vodă de Câmpulung Muscel. 12 moines ont disparu durant la nuit et personne n’a pu donner aucune explication cohérente. Un seul journal local d’Argeş a eu le courage de relater les faits et de démarrer une enquête. Après plus de quatre ans, ce cas est encore entouré de mystère.
Les événements se sont déroulés peu de temps après le lancement de la „Proclamation du Mouvement Orthodoxe de Résurrection Monacale”. Ce mystérieux mouvement formé, selon les déclarations qui circulent sur l’Internet, de 500 moines, religieuses, staretz, prêtres orthodoxes et ayant le support de certains moines du Mont Athos, qui protestent contre ceux qui dirigent à présent l’Église Orthodoxe Roumaine. L’œcuménisme est démasqué comme hérésie par la Proclamation qui attaque aussi la présence des maçons se trouvant à la direction de l’Église.
Commando au monastère. Des phénomènes paranormaux ou conspiration?
Le monastère de Negru Vodă de Câmpulung Muscel a été bâti en 1215 par le régnant Radu Vodă. En 2003 ici vivaient 12 moines, dirigés par le staretz Vichentie Punguţă.
Une nuit de la Semaine Illuminée (avant la fête des Pâques), les troupes du Département d’Interventions Antiterroristes (DIA) prennent d’assaut le monastère. Tous les moines sont embarqués de force, sans aucune explication, dans les voitures garées devant la porte. Destination? Inconnue! Le jour suivant est apporté au monastère un groupe de religieuses, qui soutiennent avec force qu’elles vivent là depuis toujours. Cette chose est infirmée par la présentation faite sur l’internet du monastère de Negru Vodă, où on affirme que c’est un monastère de moines.
Après une semaine, quelques uns de ceux qui ont été arrêtés par les commandos en pleine nuit apparaissent au monastère de Curtea de Argeş, mais ils ont „interdiction de parler”. Du père Vichentie on dit qu’il est parti en Amérique „en pèlerinage”. Mais les moines orthodoxes ne vont pas en Amérique en pèlerinage, parce que là-bas ’il n’existe pas d’endroit sacré pour les orthodoxes.
Le mensonge des religieuses, disant qu’elles habitent depuis toujours au monastère de Negru Vodă, était pourtant trop gros. Bien plus tard, les représentants de l’Episcopat ont fourni quelques déclarations officielles, mais leur version non plus n’apportent pas plus de lumière sur ce qui s’est passé. Leurs explications, données en 2006 à l’unique journal qui a eu le courage d’investiguer le sujet, sont fragiles et pleines de contradictions. La position officielle de l’Église, qui devrait protéger les moines contre les abus des autorités de l’État, prouve son implication dans ces événements.
L’ancien staretz du monastère de Negru Vodă, expédié ou auto-exilé à l’étranger, parvint à envoyer des documents terrifiants sur la descente de 2003. Ces documents ont circulé de la main à la main et peuvent maintenant être lus sur l’Internet.
La version officielle: au monastère de Negru Vodă ont été effectuées des… réparations?! nettoyage?!
Les porte-paroles de l’Évêché de Muscel, ainsi que l’épître Calinic Argeşeanul admettent, finalement, trois ans plus tard, qu’il y a eu lieu un déplacement de la communauté de moines. Mais c’est temporaire, se disculpent-ils. „Il y a trois ans, au monastère de Negru Vodă de Câmpulung ont été effectués des travaux de réparation. À cette occasion, les moines ont été transférés dans d’autres endroits de culte du département,” déclare en 2006, pour un journal électronique d’Arges, le conseiller de l’épître Ovidiu Vlăsceanu.
Le Protopope de Muscel, Eugeniu Matei, veut le soutenir, mais il parle d’une action de nettoyage du monastère: „Pendant la période de janvier à septembre 2003, les moines du monastère de Negru Vodă ont été repartis dans d’autres endroits de culte du département, parce que dans le cadre du complexe monacal ont été effectués des travaux de nettoyage. Pendant cette période, à Negru Vodă ont été apportées des religieuses pour préparer le repas aux ouvriers.” Pourquoi les moines ne pouvaient pas préparer le repas des ouvriers et a-t-il été nécessaire de faire venir des religieuses, pratique jamais rencontrée dans un autre cas de restauration d’un monastère, demeure encore un mystère. De même que, en parlant d’une période de quelques mois où le transfert a été effectué, Eugeniu Matei distrait l’attention du fait que les 12 moines ont été transférés en une seule nuit et qu’ils ne sont plus jamais revenus au monastère.
MIREM, Le Mouvement Orthodoxe de Résurrection Monacale
Le „nettoyage” dont les représentants de l’évêché parlent est une symbolique. Les commandos sont intervenus en force parce qu’on croyait qu’à Negru Vodă se trouvait un noyau du Mouvement Orthodoxe de Résurrection Monacale (MIREM). Celui-ci est, selon son statut: „l’une des réactions nées des dernières évolutions à l’intérieur de l’Église Orthodoxe Roumaine, et aux décisions prises par ses chefs qui sont totalement contraires aux enseignements des Saints Pères de l’Église.”
La proclamation lancée au printemps de 2003 par le Mouvement Orthodoxe de Résurrection Monacale est probablement venue comme un coup pour l’Église Orthodoxe Roumaine (BOR). Cette proclamation affirme que plus de 500 moines, religieuses, prêtres, staretz sont „pétrifiés” en apprenant les décisions des chefs de l’Église, qui sont en contradiction avec la croyance séculaire orthodoxe et sont, d’ailleurs des véritables hérésies. La proclamation demande à la Patriarchie que BOR se retire du Conseil Œcuménique et demande que l’Église prenne position contre les politiques de globalisation ainsi que contre l’entrée de la Roumanie dans l’UE.
Il est très possible que les événements du Monastère de Negru Vodă du printemps 2003, événement qui se sont déroulés une semaine après le lancement de la Proclamation, ne soient pas du tout fortuits. Il est très possible que la Patriarchie ait sollicité le soutien des services secrets pour détecter la composition de MIREM et pour exterminer ce Mouvement. Il est certain que ce but n’a pas été atteint, ce mouvement n’a pas été annihilé. Trois ans et demi après sa création, il continue d’exister et nous comprenons la discrétion qui l’entoure d’un côté comme la prudence de ceux qui font partie de MIREM et comme la tentative de dissimulation des faits, de la part des officiels.
Les actions de MIREM sont en prépondérance orientées vers la maçonnerie et l’œcuménisation de l’Église Orthodoxe Roumaine. Entre autres, il a pris position contre l’introduction en Roumanie de nouvelles cartes d’identité avec micro puces. Il a démasqué, avant l’élection du nouveau patriarche, le métropolite Daniel de Moldavie comme étant franc-maçon. Il a organisé des manifestations publiques à la Patriarchie dans ce sens et a placardé des affiches dans les principales villes. La presse a relaté assez peu ses actions, en ridiculisant et en minimalisant l’importance de ce mouvement formé de 500 moines, comme il le fait à chaque fois qu’elle a à faire avec ceux qui ne sont pas reconnus par la maçonnerie.
L’Église doit pourtant donner des explications pour le cas de Negru Vodă
En revenant au cas du monastère de Negru Vodă, des explications ont été demandées, mais elles n’ont pas été données. Nous citons quelques fragments de ce qui a circulé sur l’Internet: „À notre demande de rendre publique l’opinion avises des épîtres officiels en ce qui concerne la disparition nocturne de la communauté de Negru Vodă, il nous a été opposé un refus avec la déclaration suivante: «Nous n’avons rien à déclarer». Ce genre de faits est intolérable, inimaginable, et à ne pas passer sous silence! Il est clair que c’est un abus, une violation flagrante des droits de vivre dans un pays orthodoxe, mais qui est celui qui permet cela ? Qui a tout organisé ? Qui se trouve derrière toute la mise en scène, car les acteurs on les connaît ? Y-avait-il là-bas un nid de terroristes qui préparait des attentats contre l’Orthodoxie et que seulement des troupes spéciales auraient pu annihiler? Difficile à imaginer ! Nous ne voulons pas lancer des affirmations sans fondements, mais comme une coïncidence, la descente a eu lieu une semaine après la Proclamation du Mouvement Orthodoxe de Résurrection Monacale. Si les forces de l’ordre ont cru qu’à Negru Vodă se trouvait le centre du Mouvement ils se sont amèrement trompés. Ce qui nous inquiète est justement la façon « communisto-sécuritaire » de l’opération qui rappelle la sinistre opération de 1959, lorsque les moines ont été „légalement“ évacués des monastères par le décret 410 (qui, notez-le bien , n’a toujours pas été abrogé !) signé par les « chefs rouges » avec l’accord et le soutien dissimulé et manipulé des prélats de l’époque.
Le problème que nous formulons est de conscience:
• Que feriez-vous, lecteur de cet article – moine ou non – mis dans la situation d’être déclaré par les officiels comme purement et simplement disparu ou même jamais né, et de vous retrouver avalé par les caves de la Sécurité en étant soupçonné de propagande orthodoxe anti-oecuméniste ? D’être condamné, pour ces soupçons, selon le décret x, à la prison ou à être interné dans un hospice pour des „actions terroristes de déstabilisation de la Roumanie“!
• Que feriez-vous en apprenant que tous vous ont oublié, que tout le monde s’en fiche, que tous ont peur des représailles et se taisent, que ceux qui en sont responsables ne veulent pas s’occuper de vous.
• Que feriez-vous si votre confesseur avait disparu durant la nuit – parti, paraît-il pour évangéliser les esquimaux ?
Quant aux choses liées à la croyance, les orthodoxes et l’Orthodoxie de la Roumanie se trouvent en plein espace totalitaire. À tout mot d’opposition prononcé, Big Brother a préparé des milliers de contre-coups, certains en forme de gourdin. Mais qui a peur des caves, des chaînes, des témoignages ? Les anciens qui ont traversés cette période ont donné les conseils suivants: „Notre temps est passé, vous êtes ceux qui doivent porter allumée jusqu’au bout la flamme de l’Orthodoxie. Nous avons subi les caves communistes, justement pour que vous, nos héritiers, ne traversiez plus cet enfer. Ne vous laissez pas emporter par un héroïsme gratuit. Ne dénigrez pas les moines apostats. Le temps n’est pas encore venu.“ Mais lorsque le moment sera venu, nous nous en rendrons compte, car alors „la laideur manifestera de façon visible son orgueil dans les endroits sacrés“. Pour le moine c’est quelque chose de normal d’affirmer la vérité sans se vanter, on peut aider le peuple sans créer de la dissidence, de la panique et de la révolte et sans „jeter des pierres“ dans la hiérarchie. Pour le « monachisme » contemporain, l’annihilation de la communauté du monastère de Negru Vodă est seulement un nuage qui annonce l’orage qui va venir. Donc, qui est le suivant ?”
Mais qui est le suivant?
C’est ainsi, avec des mots presque prophétiques, que les documents qui dévoilent les abus de 2003 prennent fin. À présent sont connus dans les milieux orthodoxes plusieurs cas „qui ont suivi”. Le plus récent est celui du monastère de Petru Vodă en Bucovine, où le staretz Iustin Pârvu a été remplacé par un maçon. Cela a donné naissance à d’amples protestations de la part des moines et des croyants, qui ont été étouffés à l’aide de la police. On envisage même d’éliminer des moines „reconnus” ceux qui ne sont pas d’accord avec la maçonisation et l’oecuménisation de l’Église Orthodoxe.
Un autre cas est celui du père Calistrat du monastère de Bârnova, qui a osé „admonester” en public Daniel, le métropolite de la Moldavie (à l’époque où il n’était pas encore Patriarche), lui tirant, pour blaguer, la barbe, fait qui a conduit à ce qu’il lui soit interdit de participer aux sacrements pour une période illimitée.
Le père Amfilohie Brânză du monastère de Diaconeşti de Bacău, disciple du père Cleopa, est lui aussi menacé de ne plus être moine parce qu’il a dit en public à un évêque qu’il faut „écouter plus Dieu que les chefs de toute sorte”. Et comme celui-ci n’était pas été d’accord avec cette affirmation, Amfilohie lui a demandé de façon inévitable: „Votre sainteté, êtes-vous maçon?”. Et l’évêque, en laissant de côté tout ménagement, lui a répondu: „Ecoute mon garçon, tu ne sais pas de quoi tu parles, prend le plus grand maçon et habille-le en vêtement de moine et tout le mal en lui va fondre”. Le père Amfilohie n’a pas cédé: „Si vous êtes maçon, Votre Sainteté, je ne vais plus vous mentionner durant les saints services, parce que beaucoup de saints et de synodes ont condamné la maçonnerie!”
Pendant que ce genre de prêtes et moines qui prennent position contre la maçonnerie sont écartés, persécutés ou font l’objet de différentes interdictions, nous remarquons comment de plus en plus de représentants de l’Église Orthodoxe Roumaine ne se cachent plus et participent aux rituels maçonniques. Récemment nous avons pu voir comment durant l’enterrement de Florian Pittiş le rituel maçonnique a reçu la bénédiction d’un prêtre orthodoxe. Une cérémonie pour nommer quelques chevaliers de Malte s’est déroulée à Arad dans une cathédrale orthodoxe et une autre a eu lieu à Suceava avec la participation d’un prêtre orthodoxe.
***
La façon d’agir ainsi que l’ampleur des forces utilisées durant la descente du monastère de Negru Vodă en 2003, totalement disproportionnées par rapport au nombre et le mode de vie de ceux qui ont été attaqués sont similaires à celles de l’„Opération Christ” démarrée un an plus tard contre le Mouvement d’Intégration Spirituelle dans l’Absolu. Une autre ressemblance bizarre est le fait que les descentes ont eu lieu, dans les deux cas, un peu avant la fête de Pâques. Même le nom choisi pour cette opération est significatif. Il existe d’ailleurs de nombreuses similarités avec des cas dans d’autres pays. Tout cela prouve qu’il s’agit d’actions concertées organisées contre tout courant spirituel qui ne se laisse pas endoctriner et contrôler par la Franc-maçonnerie.
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yogaesoteric
2008
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