Khajuraho: les temples de l’amour
On dit que la beauté existe dans les yeux de celui qui regarde, c’est ainsi que le même aspect peut être perçu différemment par des personnes différentes. Les scènes pleines d’érotisme qui remplissent les murs des temples de Khajuraho sont un tel “aspect”, qui pour certains peut être la source de certains états extatiques pleins de mystère, et pour les autres un phénomène difficile à expliquer. Elles présentent des couples dans diverses postures érotiques et suscitent un tel état de sacralité, qu’il semble venir d’un autre monde.
Situés au centre de l’Inde, dans une petite ville nommée Khajuraho, les renommés “temples de l’amour”, expression d’une civilisation ancienne, ont transformé cet endroit dans un important point touristique de ce pays. Les temples de Khajuraho ont été construits entre 950 et 1050 après J.C., pendant la dynastie Chandel, ils étaient considérés comme l’apogée de l’architecture indienne de cette période. Au début ont été construits 85 temples, parmi lesquels seulement à peu près 22 ont été préservés jusqu’à nos jours. Longtemps ces temples ont été ignorés, ils ont été redécouvert à peine au XX-ème siècle.
Il existe trois types de temples, appartenant aux différentes cultures: les temples de la partie d’ouest, qui sont consacrés aux dieux Shiva et Vishnou, les temples appartenant à la culture vaishnava du côté nord, et les jaïnistes de la partie de sud. Nous ne pouvons pas ignorer le fait que les sculptures et les statues couvrent chaque partie du plafond et des mûrs des temples, l’atmosphère ainsi créée étant impressionnante.
Considéré comme le plus ancien d’entre tous, Chaunsat Yoghini, fait partie du groupe des temples occidentaux, celui-ci étant consacré à la déesse Kali. Kandariya Mahadeo, est le plus grand temple, étant consacré au dieu Shiva et ici plus de 900 statues peuvent être admirées. Un autre temple qui a été bien préservé, est consacré au dieu du soleil, Surya, est le temple Chitragupta. Toujours du groupe des temples de l’ouest font partie les temples Vishwanath, Lakshamana, Matangeshwara. Du groupe de l’est font partie les temples Parsavanatha, Ghantai, Adhinata, et les trois temples hindous: Brahma, Vaamana et Javari. Duladeo, Chaturbhuj sont des temples appartenant au groupe du sud.
Le thème dominant des sculptures murales de ces temples est l’adoration de la femme et de ses myriades de facettes. Mais les sculptures que nous pouvons admirer ici contiennent aussi des représentations de certains animaux de la mythologie indienne, des danseuses et des musiciens, de diverses divinités, des couples exemplifiant diverses postures érotiques. Certaines statues de ces temples mesurent approximativement un mètre de hauteur et sont des représentations des divinités Shiva et Shakti, les principes masculin et féminin, yang et yin.
Cependant les scènes érotiques sont celles qui ressortent à l’évidence, et sont caractéristiques du tantrisme. La philosophie tantrique englobe l’univers entier avec tous ses niveaux de manifestation, ne nie rien de ce qui existe et accorde une importance particulière à l’astrologie, à la biologie, à l’anatomie et même à la sexualité. La fusion amoureuse, considérée comme étant, en essence, une unification des principes cosmiques masculin et féminin, occupe une place particulièrement importante dans certaines des techniques et des procédés tantriques.
Le Tantra Yoga met à la base des techniques d’évolution spirituelle le contrôle de l’énergie sexuelle, qui est sublimée dans des énergies psycho-mentales et spirituelles. Le Tantra soutient que l’état de sagesse et de libération spirituelle peut apparaître de l’expérience directe des sens se trouvant sous le contrôle lucide du pratiquant. Le texte traditionnel “Kularnava Tantra” affirme que “personne ne réussira à détenir la perfection spirituelle en utilisant des méthodes difficiles et ennuyeuses, car la perfection peut être acquise facilement en nous servant de la satisfaction de tous les sens”. Un autre texte traditionnel, “Mahanirvana tantra”, affirme que: “sur la voie du Tantra il existe en même temps la possibilité de l’expérience frénétique des plaisirs humains et de l’obtention de l’état de sagesse, ainsi que d’atteindre les capacités paranormales qu’elle confère spontanément”. Un aspect central de la pratique et de la philosophie tantrique est la transfiguration. Dans un couple tantrique, les deux amoureux doivent voir derrière la présence concrète de l’être aimé le mystère fascinant du principe Féminin ou Masculin, Shakti ou Shiva, et ces statues sont des symboles de ces principes.
L’essence de l’amour tantrique est la sacralité de l’acte amoureux entre homme et la femme. Le Tantra est assez peu connu en Occident, malgré sa célébrité, de nombreux occidentaux comprenant de façon erronée que son but serait l’exacerbation 
des impulsions sexuelles, ce qui n’est pas du tout vrai. L’éros tantrique transfigurateur permet aux deux amoureux d’atteindre des centaines d’orgasmes extatiques sans décharge énergétique. Le point culminant est, au-delà du plaisir érotique, le sentiment de la béatitude, de l’extase.
Dans le monde actuel obsédé par le sexe, les gens ont oublié que le but de l’union érotique est la communion avec Dieu, que l’éros est une modalité d’évolution, et ce n’est pas la satisfaction des désirs érotiques qui est importante. Pour cette raison, pour certains, les scènes pleines d’érotisme découvertes sur les parois des temples ont quelque chose d’incompréhensible.
Réminiscences d’une culture tantrique ancienne, ces “temples de l’amour” représentent pour la conciliation spiritualité-sexualité les seules preuves vivantes. Mais pour certains ils restent une énigme, et pour les autres un conseil à découvrir la beauté et la spiritualité de l’érotisme accompagné par un amour infini.
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