L’armée américaine se tourne vers les systèmes d’IA pour réprimer la dissidence en ligne à l’étranger

L’armée américaine souhaite que l’intelligence artificielle accomplisse ce que les propagandistes humains ne peuvent pas faire : créer et diffuser des campagnes d’influence à la vitesse de l’internet tout en supprimant systématiquement les voix dissidentes à l’étranger, selon des documents internes du Pentagone obtenus par The Intercept.

La liste de souhaits classifiée révèle l’ambition du SOCOM de déployer des « systèmes d’IA agentielle ou d’agents multi-LLM » capables d’« influencer des publics cibles étrangers » et de « supprimer les arguments dissidents » avec un minimum de supervision humaine. La branche militaire recherche des prestataires capables de fournir des systèmes automatisés fonctionnant à une échelle et à une vitesse sans précédent.

« L’environnement informationnel évolue trop rapidement pour que les militaires puissent s’engager de manière adéquate et influencer un public sur Internet », indique le document.

« Disposer d’un programme conçu pour soutenir nos objectifs peut nous permettre de contrôler les discours et d’influencer les publics en temps réel. »

Comme le rapporte The Intercept, les systèmes d’IA proposés iraient bien au-delà de la simple génération de contenu. Le SOCOM envisage une technologie capable de « scraper l’environnement informationnel, d’analyser la situation et de répondre par des messages conformes aux objectifs MISO ». Plus controversé encore, ces systèmes « supprimeraient les arguments divergents » et « accéderaient aux profils, réseaux et systèmes des individus ou groupes qui tentent de contrer ou de discréditer nos messages ».

Le Pentagone prévoit d’utiliser ces capacités à des fins de manipulation sociale globale, en créant « des modèles complets de sociétés entières afin de permettre aux planificateurs MISO d’utiliser ces modèles pour expérimenter ou tester divers scénarios multiples ».

Les systèmes généreraient des messages ciblés destinés à « influencer cet individu ou ce groupe spécifique » sur la base des renseignements recueillis.

Le porte-parole du SOCOM, Dan Lessard, aurait défendu cette initiative en déclarant que « toutes les capacités basées sur l’IA sont développées et utilisées dans le cadre du programme Responsible AI du ministère de la Défense, qui garantit la responsabilité et la transparence en exigeant une supervision et une prise de décision humaines ».

La décision du Pentagone intervient alors que ses adversaires déploient des technologies similaires. Selon un récent article du New York Times, la société chinoise GoLaxy a développé des systèmes d’IA capables de « remodeler et d’influencer l’opinion publique au nom du gouvernement chinois ». La société a « mené des campagnes d’influence à Hong Kong et à Taïwan, et collecté des données sur des membres du Congrès et d’autres Américains influents ».

Cependant, les experts s’interrogent sur l’efficacité de la propagande générée par l’IA. Emerson Brooking, de l’Atlantic Council, a fait remarquer que « la Russie utilise des programmes d’IA pour automatiser ses opérations d’influence. Le programme n’est pas très performant ». Il a averti que « l’IA a tendance à rendre ces campagnes plus stupides, et non plus efficaces ».

Le Pentagone a déjà mené des opérations d’influence secrètes avec des résultats mitigés.

En 2022, des chercheurs ont révélé l’existence d’un réseau de comptes sur les réseaux de communication virtuelle géré par le Commandement central américain qui diffusait des messages anti-russes et anti-iraniens, mais qui n’a pas réussi à susciter l’intérêt, devenant ce que Brooking a qualifié d’« embarras pour le Pentagone ».

Les détracteurs s’inquiètent des implications plus larges des systèmes de propagande automatisés. Heidy Khlaaf, ancienne ingénieure en sécurité chez OpenAI, a mis en garde contre le fait que « présenter l’utilisation de l’IA générative et agentielle comme un simple moyen d’atténuer l’utilisation qu’en font les adversaires est une représentation erronée de cette technologie, car les utilisations offensives et défensives sont en réalité les deux faces d’une même médaille ».

 

yogaesoteric
9 septembre 2025

 

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