Le chantage sentimental (II)
Des tendances qui se trouvent derrière cette attitude et comment les éliminer définitivement par une véritable connaissance de soi
par Georgiana Dăneţ
Devise : „Je sais qui je suis vraiment, c’est pourquoi personne ne peut me manipuler”
Lisez ici la première partie de l’article
Les „symptômes” du chantage
Le monde du chantage sentimental produit de la déroute. Certains chantagistes recourent à des menaces directes, d’autres transmettent des signaux mêlés, agissant avec gentillesse la plupart du temps et recourant au chantage seulement occasionnellement.
Le plus souvent le chantage sentimental est subtil et se produit dans le contexte d’une relation où il existe une grande partie bonne et positive.
Afin de pouvoir démasquer le phénomène du chantage sentimental, il est nécessaire de poser le „diagnostique”, tout comme un médecin met le diagnostique d’une maladie. Dans le cas du chantage sentimental il existe six „symptômes” clairs :
1. La sollicitation
Michel et Jeanne sont dans une relation d’amour. Il lui propose de s’installer chez elle. „Pratiquement je passe moitié de mon temps ici et la moitié de mes affaires sont ici chez toi”.
2. La résistance
Jeanne lui réponse qu’elle n’est pas prête pour ce pas et qu’elle préfère qu’ils continuent à habiter séparément.
3. La pression
Voyant que Jeanne ne fait pas ce qu’il voulait, Michel ne cherche pas à comprendre ce qu’elle ressent. La discussion devient unilatérale et bientôt se transforme en un sermon. Il transforme le refus de Jeanne en une liste de ses défauts à elle et son propre désir et sa sollicitation en des questions positives : „Je ne veux que du bien pour nous. Je veux te l’offrir. Si tu n’étais pas si focalisée sur toi-même, tu pouvais t’ouvrir un peu plus.” Ensuite, la pression augmente de façon mélodramatique, en terminant par cette demande : „Tu ne m’aimes pas autant que tu veuilles que j’emménage chez toi ?”
4. Les menaces
„Si tu ne peux pas t’engager par rapport à moi, après tout ce qu’on a été l’un pour l’autre, peut-être qu’il est temps que chacun de nous rencontre quelqu’un d’autre.”
5. Le fait de céder
Comme Jeanne a peur de perdre Michel, elle accepte que celui-ci emménage chez elle.
6. La répétition
Il suit une période calme. Jeanne est toujours mécontente à cause de la situation, mais heureuse de ne pas avoir „perdu” Michel et d’avoir regagner son „amour”. En même temps, Michel a appris que s’il exerce des pressions sur Jeanne et va la faire se sentir coupable, il obtient ce qu’il veut, et Jeanne a appris que la voie la plus rapide de mettre fin aux pressions de Michel est de céder.
Manipulation versus communication
Bien que les symptômes du chantage sentimental soient très clairs, le plus souvent on cède sans s’en rendre compte. Cela se passe parce que le chantage sentimental pousse à la limite un comportement qu’on rencontre en permanence : la manipulation.
Nous nous manipulons tous réciproquement de temps en temps et nous sommes tous manipulés à un moment donné. Voilà un exemple inoffensif : „Est-ce que quelqu’un peut ouvrir la fenêtre, s’il vous plaît”, au lieu de : „Veux-tu ouvrir la fenêtre, s’il te plaît ?” Pourquoi ne demande-t-on pas directement ? Parce que demander comporte des risques : risques que l’on nous refuse quelque chose ou risque d’être rejetés, de fâcher ou de déranger. Il est (apparemment) plus facile de laisser les autres comprendre ce que l’on veut, par exemple : „Chéri, le chien semble vouloir sortir…”
Il y a une grande différence entre exercer notre droit de fixer des frontières entre les relations interhumaines, même si cela peut conduire au conflit, et le chantage sentimental. Lorsqu’on fixe des frontières dans une relation, on définit sa position, on exprime ses besoins bénéfiques, on exprime sans équivoque ce qu’on accepte ou pas dans la relation en question, on offre à l’autre la chance de dire „oui” ou „non”.
Comment peut-on savoir si, dans une situation conflictuelle, une personne est intéressée plutôt à gagner à tout prix que de résoudre le problème?
Si quelqu’un veut résoudre sincèrement un conflit avec nous de façon correcte et délicate, alors :
– il parlera ouvertement avec nous du conflit ;
– il voudra connaître nos sentiments et nos pensées ;
– il sera prêt à apprendre pourquoi on s’oppose à son désir ;
– il acceptera sa part de responsabilité dans le conflit.
Mais, si le principal but de la personne est de gagner (même si c’est un but inconscient) alors :
– elle essayera de nous dominer ;
– elle ignorera nos protestations et les explications offertes ;
– elle insistera sur le fait qu’elle a un caractère ou des raisons supérieures aux nôtres, nous présentant avec une habileté digne d’une meilleure cause presque tous les „textes ésotériques pompeux” qu’elle détient ;
– elle évitera d’assumer une responsabilité quelconque pour les problèmes qui existent entre elle et nous.
Pour mieux comprendre le phénomène du chantage, on peut se demander combien de flexibilité et de tolérance on manifeste dans la relation en question. Chaque jour, sans trop de bruit et de traumas, on négocie des milliers de détails de notre existence, pour nous mettre en accord avec l’autre; il y a un rythme de donner et d’offrir, un sentiment de l’équilibre et de la justesse. Mais, si cela ne se passe plus, alors nous devenons „figés” dans un rôle que l’autre nous impose. Il n’y a plus de place pour la flexibilité. Il n’y a plus d’équilibre du pouvoir. Là où dans le passé, il n’était pas besoin d’un „payement” pour l’amour et pour le respect, entrer dans les grâce du chantagiste dépendra de plus en plus si vous lui accordez ce qu’il veut.
Les typologies des chantagistes
Il existe quatre typologies de chantagistes :
1. „Si tu m’aimais vraiment, alors…”. Ce sont les punitifs, ceux qui nous communiquent exactement ce qu’ils veulent et les conséquences que nous avons à affronter si nous ne leur cèdons pas. Chez les punitifs toute résistance, aussi petite qu’elle soit, déclenche leur furie. Ils exprimeront toujours leur furie par la violence, avec des menaces directes et du scandale – les punitifs actifs – ou par une furie dissimulée, se retirant derrière la fâcherie non exprimée – les punitifs passifs. „Les choses se passent comme je veux, sinon va-t-en !” c’est la devise du punitif. Quoi que vous ressentiez ou quels que soient vos besoins, le punitif prévale, il vous annule. „Si tu continues avec le yoga, alors je divorce”, „Si tu avances le divorce, tu ne verras plus tes enfants” etc. Ils peuvent nous rendre la vie un cauchemar ou tout au moins désagréable. Ils semblent ne pas réaliser quel impacte ont leurs mots, combien ils nous menacent souvent par la désapprobation ou à quel point ils racontent aux autres combien nous sommes méchants.
2. „Ne me quitte pas, sinon…”. Ce sont les autopunitifs, ceux qui mettent en évidence ce qu’ils vont se faire à eux-mêmes si n’obtiennent pas ce qu’ils veulent. Par exemple, le petit terroriste de six ans qui pendant une attaque de colère, annonce à haute voix : „Si tu m’oblige à aller dormir et tu ne me laisses pas regarder à la télé, je vais retenir ma respiration jusqu’à ce que je devient tout rouge”. Les autopunitifs matures sont plus sophistiqués, mais le principe est le même. „Lorsque tu t’exprime ainsi, j’ai envie de mourir !”, „Si tu me quittes, je vais me suicider !”, „Ne dis plus une telle chose, cela me rend fou !”. La tragédie, l’hystérie et un air de crise (que TU as bien sûr provoqué, dans leur vision), entourent les autopunitifs. Toutes les difficultés réelles ou imaginaires auxquelles ils sont confrontés, tous leurs mauvais états sont à cause de vous. Ils ont le talent spécial de vous faire sentir responsables de ce qu’il leur arrive. Soudain vous vous retrouvez le seul adulte de la relation, qui doit courir lorsqu’ils ont envie de pleurer, pour améliorer leur état et mettre les choses au point.
3. „Tu es le seul qui peut m’aider…”. Ce sont les martyres, les accusateurs talentueux et colporteurs de culpabilités, qui nous aident à détecter leurs désirs et qui concluent toujours que NOUS devons faire tout notre possible pour les accomplir. „Tu t’en fiches de moi” est le syntagme souvent répété par ces chantagistes, qui ne disent pas directement, mais nous font comprendre que si on ne fait pas ce qu’ils veulent, ils souffriront et que nous sommes les seuls coupables. „Laisse-moi, dorénavant je vais me débrouiller seul, je ne vais plus jamais dépendre des autres…”. Les martyres ou les victimes sont préoccupés par leur mal-être et vont interpréter le fait que vous ne lisez pas leurs pensées comme une preuve que vous vous fichez d’eux. Ils mettent en scène un mélodrame digne de leur décerner un prix. Il y a aussi des victimes qui partagent avec joie les détails de leur situation et qui attendent de nous que nous améliorions la situation. S’ils ne se sentent pas bien, cela signifie pour eux que nous ne leur avons pas offert l’essentiel pour leur bonheur.
4. „Je pourrais améliorer ta situation, si tu…”. Ce sont les tentateurs, ceux qui nous soumettent à une série de testes et qui avancent la promesse d’une chose merveilleuse si on se conforme à leur désir, qu’ils ne vont jamais tenir une fois qu’ils obtiendront de nous ce qu’ils voulaient. Ce sont les personnes qui pratiquent le chantage le plus subtil. Ils nous promettent la proverbiale carotte au bout du bâton, les récompenses semblent copieuses, mais tout s’évanouit lorsqu’on s’en approche. Beaucoup de tentateurs font du trafic avec des récompenses sentimentales, des châteaux de sable embaumés d’air d’amour, d’acceptation, d’intimité familiale et de blessures guéries.
Chaque typologie de chantagiste opère avec un vocabulaire spécifique. Beaucoup de chantagistes combinent ces typologies ou font appel à plusieurs. Mais tous les styles de chantage sentimental ont le même effet dévastateur sur notre bien-être. La plupart des personnes qui utilisent le chantage sentimental ne sont pas des monstres (encore). Dans la vision des sages, ce qui les fait agir ainsi sont les influences de certains démons qui opèrent évidemment avec ces énergies maléfiques et, justement pour cela, il est impérieusement nécessaire qu’ils stoppent la complicité avec eux et qu’ils les éloignent de leur être.
Les points de vulnérabilité spéculés par les chantagistes
Analysons de près de quoi est formé le „brouillard” dans lequel les chantagistes sont entourés.
La peur
La peur d’abandon est la première crainte qu’on ressent lorsqu’on est petit. Celle-ci est suivie par d’autres. La peur de la colère, par exemple, active en nous la réaction de lutte ou de fuite.
Les conditions posées par les chantagistes sont toujours faites à la mesure de nos craintes. Ils nous disent : fais comme je veux, sinon : je vais te quitter ; je vais te désapprouver ; je vais arrêter de t’aimer; je vais me mettre en colère contre toi /je vais faire du scandale ; je vais te rendre malheureux ; je vais te contredire ; je vais te défigurer, en accentuant toujours seulement tes mauvais côtés ; tu vas être renvoyé etc. Certaines craintes ont déjà créé des reflex inconditionnels. Peut-être qu’il n’est plus nécessaire que quelqu’un nous crie dessus, il suffit qu’il se taise et fronce ses sourcils, pour nous faire réagir comme dans l’expérience de Pavlov avec le chien.
L’obligation
Nous entrons tous dans la vie adulte avec des règles et des valeurs bien établies, par exemple : le devoir, l’obédience, la loyauté, l’altruisme, la bonté, le sacrifice de soi etc. Nous avons des idées profondément imprimées sur ces valeurs et souvent nous croyons qu’elles sont les nôtres, alors qu’elles nous ont été inoculées par l’influence de nos parents, de la religion, par les convictions de la société, par la presse et les êtres humains autour de nous. Souvent nos idées sur le devoir et l’obligation (noblesse oblige) sont rationnelles et forment le fondement éthique et moral de notre vie. Mais, il arrive trop souvent que l’équilibre entre la responsabilité envers nous-mêmes et le devoir envers les autres soit rompu.
Les chantagistes ne réflechissent pas trop lorsqu’il est temps de mettre à l’épreuve notre sens de l’obligation, mettant en évidence ce qu’ils ont fait pour nous, et ce à quoi ils ont renoncé pour nous faire plaisir. Ils forcent la note et nous communiquent, qu’on aime cela ou pas, que c’est notre responsabilité de faire exactement ce qu’ils veulent. Certains chantagistes recherchent sélectivement le passé pour trouver une raison quelconque pour laquelle on leur doit ce qu’ils souhaitent. Le geste aimable que nous avons reçu d’un chantagiste à un moment donné se transforme plutôt en liste de crédit avec intérêts qu’en un cadeau inconditionnel.
La culpabilité
Le regret sincère fait partie de l’instrument intérieur de la conscience d’une personne sensible et responsable. C’est comme le compasse qui nous indique si on a violé le code moral et éthique ou les lois divines, ou si nous sommes en train de les violer au niveau de l’intention, avant d’agir concrètement. La culpabilité ou le regret est une réponse naturelle et adéquate à un acte nuisible, illégal, cruel, abusif, malhonnête, contraire au divin et disharmonieux.
L’homme supérieur est toujours l’homme de „mea culpa” et l’homme inférieur est celui qui culpabilise toujours les autres, même lorsqu’il répète avec obstination ses propres fautes. Mais, dans le cas de la culpabilité injustifiée, la personne en cause s’enterre dans des culpabilisations, des accusations et des auto flagellations paralysantes.
Ce processus, exprimé d’une manière simple, se manifeste ainsi :
1. j’agis,
2. l’autre personne se fâche,
3. je prends toute la responsabilité pour la fâcherie de l’autre, que j’ai un certain rapport avec elle ou pas,
4. je me sens coupable,
5. je ferais tout pour remédier à la situation de sorte que je me sens mieux.
Un des moyens les plus rapides à la portée des chantagistes pour créer en nous la culpabilité injustifiée est le fait de recourir à la culpabilisation : „qu’il soit claire, tout cela n’est que ta faute !” Ils vont dire : „Je suis dans un très mauvais état (et c’est uniquement par ta faute)”, „Je suis très malade (et c’est uniquement par ta faute)”, „Je sais que je suis trop paresseux (et c’est uniquement par ta faute)”, „Je sais que j’ai des problèmes avec la continence sexuelle (et c’est uniquement par ta faute)”, „J’ai eu une mauvaise journée au bureau (et c’est uniquement par ta faute)”, „Mon mari est mort (et c’est uniquement par ta faute)”, „Je ne réussis pas du tout à pratiquer la technique de LAYA YOGA (et c’est uniquement par ta faute)”.
Présentée ainsi, la liste avec ce négoce sentimental sonne absurde. Mais certains assument la culpabilité lorsque la personne qui leur est chère se fâche. Les chantagistes sont très heureux de nous expliquer, en utilisant tous les textes ésotériques qu’ils portent dans leur bagage, comment et pourquoi nous portons toute la responsabilité d’une certaine situation (et en général des échecs de toute sorte) et pourquoi il ne portent aucune responsabilité ou, éventuellement, une très petite.
Lisez ici la troisième partie de l’article
yogaesoteric
avril 2016
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