L’étrange action à distance de la physique quantique tente une percée dans le domaine du visible


Des scientifiques ont réussi pour la toute première fois à montrer une intrication quantique entre des objets macroscopiques. C’est un phénomène qu’Albert Einstein a nommé « spooky action at a distance » (action effrayante / étrange à distance). Les scientifiques affirment que cette première démonstration « à grande échelle » a permis de faire un grand pas en avant dans la compréhension de la physique quantique.

L’intrication quantique relie les particules de telle sorte qu’elles s’influencent instantanément les unes les autres, même sur de grandes distances. En surface, ce lien puissant défie la physique classique et, en général, notre compréhension de la réalité, ce qui explique pourquoi Einstein l’a trouvé si « spooky ». Mais le phénomène est devenu depuis lors une pierre angulaire de la technologie moderne.

Pourtant, jusqu’à présent, il a été démontré que l’intrication quantique ne fonctionne qu’à la plus petite échelle, dans des systèmes basés sur la lumière et les atomes, par exemple. Toute tentative d’augmenter les dimensions a entrainé des problèmes de stabilité, la moindre perturbation de l’environnement rompant la connexion. Mais de nouvelles recherches changent tout cela, en démontrant que cette « action à distance » peut être une réalité entre de plus grands/ massifs objets.

Non pas massif pour nous, mais par rapport aux échelles atomiques utilisées auparavant pour démontrer l’intrication quantique, chaque membrane de tambour utilisé dans cette expérience mesurait 15 micromètres de large, soit environ la largeur d’un cheveu humain et chacune composée de milliards d’atomes.

Selon les chercheurs :
« Nos travaux élargissent qualitativement la gamme des systèmes physiques intriqués et ils ont des implications pour le traitement de l’information quantique, les mesures de précision et les tests des limites de la mécanique quantique. »

S’appuyant sur des recherches remontant jusqu’en 2014, les nouvelles expériences ont utilisé deux membranes de « tambours » vibrants pour représenter des objets massifs, ou des « oscillateurs mécaniques massifs » pour employer le terme technique.


Image d’entête : représentation des tambours de 15 microns de large préparés sur des puces de silicium utilisées dans l’expérience. Les membranes vibrent à une fréquence ultrasonore élevée, et l’état quantique particulier prédit par Einstein a été créé à partir des vibrations.

Pour atteindre leurs résultats, l’équipe a refroidi un circuit électrique supraconducteur juste au-dessus du zéro absolu, soit environ -273 degrés Celsius. Ceci a ensuite été contrôlé et mesuré à l’aide de champs micro-ondes faibles.

Grâce à l’application des micro-ondes, les membranes du circuit pouvaient vibrer à une fréquence ultrasonore élevée, produisant les vibrations qui formaient l’état quantique particulier qui avait confondu Einstein dans les années 1930.

Selon Matt Woolley de l’université de Nouvelle-Galles-du-Sud en Australie qui a participé à l’étude :
« Il est, bien sûr, extrêmement satisfaisant de voir la vision que vous avez exposée se concrétiser, et c’est passionnant d’imaginer où des expériences comme celle-ci pourraient mener, quelles connaissances fondamentales et quel développement technologique elles pourraient finalement produire. »

Les températures extrêmement basses et les champs électriques du circuit ont éliminé toute forme de perturbation et d’interférence des membranes, ne laissant derrière elles que les vibrations mécaniques quantiques.

L’autre exploit a été de garder l’état d’intrication pendant près d’une demi-heure, les précédentes expériences ont eu du mal à atteindre des fractions de seconde.

Maintenant que cette avancée a été réalisée à une échelle proche de ce que l’on peut voir à l’œil nu, elle a le potentiel de mener à toutes sortes de nouvelles découvertes dans le domaine : de la façon dont la gravité et la mécanique quantique fonctionnent ensemble, à la possibilité de téléporter des vibrations mécaniques à travers des objets intriqués.

Selon M. Woolley :
« L’étape suivante consiste à démontrer la téléportation des vibrations mécaniques. En téléportation, les propriétés physiques d’un objet peuvent être transmises par le canal de l’action spooky. »

Einstein lui-même l’a décrit comme les deux moitiés d’une même pièce de monnaie, divisée : si vous avez des faces, l’autre moitié doit être des piles, même si c’est à des millions d’années-lumière.

Selon l’un des membres de l’équipe, Caspar Ockeloen-Korppi de l’université d’Aalto en Finlande :
« Dans la téléportation quantique, les propriétés des corps physiques peuvent être transmises à travers des distances arbitraires en utilisant le canal de l’action à distance. Nous sommes encore loin de Star Trek. »

Bien qu’il soit difficile de dire où ce travail nous mènera ensuite, on ne peut pas sous-estimer l’importance d’avoir fait ce premier pas vers la mécanique quantique macroscopique.

L’étude publiée dans Nature : Stabilized entanglement of massive mechanical oscillators et présentée sur le site de l’université Aalto : Einstein’s “spooky action” goes massive!


yogaesoteric
1 mars 2020

Also available in: Română

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