L’exode des Roumains
C’est confirmé : 3,4 millions de Roumains ont quitté le pays de 2007 à 2017. Cela représente environ 17% de la population du pays, ce qui classe la Roumanie en deuxième position au monde pour le nombre d’émigrés, juste après la Syrie, selon l’ONU. Cette affirmation appartient à Luciana Lăzărescu, du Centre de recherche et de documentation dans le domaine de l’intégration des immigrants et fait partie des conclusions d’un projet international de recherche.
Selon le recensement de 2011, la Roumanie avait 19 millions d’habitants. Pensez-vous à proposer que le manque soit comblé par l’immigration ? Ce n’est pas le cas. A la fin de l’année 2017, 117.000 étrangers seulement étaient établis dans ce pays, dont 3.900 personnes bénéficiant d’une protection internationale, soit 5%. Le poids des personnes est donc beaucoup plus bas ici qu’en Allemagne, par exemple. Oui, il est vrai que le nombre des demandes d’asile a augmenté, mais de 1.500 les années antérieures à 4.800 en 2017. Le nombre d’étrangers hors UE qui choisissent de s’établir en Roumanie n’est que de 0,3%. Les étrangers viennent ici notamment pour des raisons de réintégration familiale (43%), et 23% pour y faire des études. Ils sont peu nombreux à choisir la Roumanie parce qu’ils se heurtent à un certain nombre de difficultés, dont la langue, un salaire limité pour les travailleurs migrants et autres. En plus, selon Luciana Lăzărescu, « la Roumanie ne dispose pas d’une évaluation sérieuse du déficit de personnel existant sur le marché de l’emploi par secteurs et par occupations et elle est loin d’avoir une approche systématique de l’immigration comme main d’œuvre et aussi contre le vieillissement de la population ».
En fait, c’est la moitié de la population active roumaine qui a quitté la Roumanie depuis 1989, pour élire domicile notamment en Europe Occidentale. L’émigrant roumain est généralement jeune, et n’est pas nécessairement dépourvu de qualification ; il part pour faire des études ou pour travailler. Neuf Roumains quittent le pays toutes les heures, soit environ le nombre d’habitants d’une ville moyenne – 79.000 – par an. Il s’agit surtout de personnes qualifiées, avec des études supérieures – c’est une fuite des cerveaux. Beaucoup sont étudiants et même des élèves partent. La principale raison est d’ordre économique, mais il s’agit aussi du développement personnel. Et il ne faut pas négliger l’aspect politique qui a eu et continue de jouer un rôle important dans la décision des Roumains de partir. Bien entendu, les conséquences sont graves.
Dans un premier temps, la Roumanie reste dépourvue de main d’œuvre. Une autre conséquence sur le moyen et le long terme, c’est qu’elle se dépeuple. Au lieu de contribuer au PIB de la Roumanie, les émigrés contribuent au PIB de leurs pays de destination. Selon les statistiques, elle ne comptera plus que 15 millions d’habitants en 2050 – un désastre. Un rapport du FMI indique que depuis 1990, l’émigration a réduit la croissance économique annuelle moyenne de jusqu’à 0,9 points de pourcentage dans plusieurs pays, dont la Roumanie. Et la situation ne peut pas s’améliorer sans un renforcement des institutions publiques, sans des politiques économiques de développement du milieu des affaires, sans attirer des travailleurs qualifiés étrangers. L’Etat doit stimuler la production, pas la consommation, indique le FMI ; quant à l’UE, elle doit repenser la stratégie de cohésion en considérant les effets négatifs de la migration.
yogaesoteric
26 janvier 2019
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