Mélanome : l’association de deux immunothérapies est plus efficace… mais plus toxique
Le traitement du mélanome a été bouleversé par l’immunothérapie, offrant enfin aux médecins des armes efficaces contre ce cancer redoutable. La combinaison de deux immunothérapies obtient des résultats supérieurs pour certains patients au prix d’une toxicité importante. L’enjeu est de pouvoir identifier ceux chez qui le bénéfice attendu surpasse les risques liés aux effets secondaires.
L’immunothérapie change la prise en charge du mélanome
Les deux médicaments, nivolumab (Opdivo ®) et ipilimumab (Yervoy ®), sont des anticorps monoclonaux qui bloquent respectivement, deux « postes de contrôle immunitaires » différents : PD-1 et CTLA-4. Les deux traitements, communément appelés inhibiteurs de point de contrôle, visent essentiellement à stimuler la capacité du système immunitaire à lutter contre le cancer.
De précédentes études ont montré que ces composés d’immunothérapie peuvent améliorer la survie des patients atteints de mélanome et de cancer du poumon. Les deux médicaments, ipilimumab et nivolumab, ont été commercialisés pour une utilisation en monothérapie chez les patients atteints par un mélanome non résécable (qui ne peut être enlevé par la chirurgie) ou un cancer métastatique (stade avancé) qui ne répond plus à d’autres médicaments.
Vers des combinaisons d’immunothérapies ?
Mais lequel de ces médicaments est le plus efficace ? Leur association peut-elle donner de meilleurs résultats ? Pour répondre à ces questions, une étude de phase III a réparti 945 patients atteints d’un mélanome avancé, jusqu’alors non traités pour recevoir l’ipilimumab, la nivolumab, ou la combinaison des deux. Après un suivi d’au moins 9 mois, la période de stabilisation de la maladie (survie médiane sans progression) était de 2,9 mois pour l’ipilimumab, 6,9 mois pour nivolumab, et 11,5 mois pour la combinaison. Les différences entre d’une part, la combinaison et l’ipilimumab et d’autre part, le nivolumab et l’ipilimumab, étaient statistiquement significatives. Les taux de réponse (patients chez qui le traitement a eu un effet sur la tumeur) étaient également nettement plus élevés chez les patients recevant le traitement combiné (57,6 %) et le nivolumab (43,7 %) seul, par rapport à ipilimumab (19 %).
Une toxicité importante et une durée de traitement à préciser
Comme prévu, le taux d’effets secondaires graves était plus élevé dans le groupe recevant la combinaison (55 %), et 36 % des patients de ce groupe ont même dû arrêter le traitement à cause de ces effets secondaires. Le Dr Wolchok fait remarquer que de précédentes études ont montré que de nombreux patients qui arrêtaient tôt l’immunothérapie bénéficiaient tout de même des effets du traitement. Ces bénéfices prolongés s’explique par le fait que l’immunothérapie fonctionne en activant le système immunitaire plutôt qu’en ciblant directement la tumeur. On ne sait pas encore combien de temps les patients doivent être traités pour activer pleinement le système immunitaire, et la durée minimale du traitement varie probablement d’un patient à l’autre. L’analyse des données sur la qualité de vie seront publiées plus tard.
« Les médicaments d’immunothérapie ont déjà révolutionné le traitement du mélanome, et nous sommes maintenant en train de voir à quel point, ils pourraient être encore plus puissant en combinaison. Mais les résultats incitent également à la prudence – la combinaison du nivolumab et de l’ipilimumab utilisée dans cette étude s’accompagnent d’effets secondaires plus importants, ce qui pourrait supplanter les bénéfices pour certains patients. Les médecins et les patients devront soigneusement prendre en compte ces éléments » déclare le Pr. Steven O’Day, directeur du Los Angeles Skin Cancer Institute et expert de l’ASCO.
En France, l’ipilimumab (Yervoy ®) est indiqué dans le traitement du mélanome avancé (non résécable ou métastatique) chez les patient adultes ayant déjà reçu un traitement. Le nivolumab (Opdivo ®) fait l’objet d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) en cas d’échec ou de non-réponse à l’ipilimumab.
Le statut PD-L1 pour choisir le meilleur traitement ?
Pour mieux identifier le traitement le plus adéquat, il est important de pouvoir identifier les patients qui vont bénéficier du traitement (car, rappelons-le, ces médicaments ne sont efficaces que chez certains patients).
La protéine PD-1 sur les cellules immunitaires se fixe à une autre protéine appelée PD-L1, qui est parfois détecté sur la surface de certaines cellules tumorales. De précédentes recherches ont suggéré que les patients qui avaient des niveaux importants de PD-L1 au niveau de leur tumeur (tumeurs PD-L1-positifs) pouvaient avoir de meilleures réponses au traitement.
Dans cette étude, le nivolumab seul semblait être aussi efficace contre les tumeurs PD-L1-positif que la combinaison nivolumab et ipilimumab. Mais pour les patients atteints de tumeurs PD-L1-négatif, le traitement combiné était significativement plus bénéfique que le nivolumab seul.
« Cela aidera les médecins à disposer d’indices permettant d’identifier les patients qui bénéficieront le mieux des traitements » conclut le principal auteur de l’étude Jedd Wolchok du Memorial Sloan Kettering Cancer Center à New York. Un élément important sachant que ces molécules ne sont pas dénuées d’effets secondaires et accessoirement, qu’elles sont excessivement coûteuses…
yogaesoteric
19 décembre 2019
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