Qui avait payé et armé Hitler ? (5)

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Les victoires électorales et les défaites des Nazis

Après les élections parlementaires allemandes du 14 septembre 1930, les Nazis devinrent le second grand parti politique après les Socio-démocrates. Hitler était devenu encore plus intransigeant après les élections et avait commencé à prendre des distances vis-à-vis de ses anciens alliés et de ses amis du Parti nationaliste, et à les critiquer sérieusement. Hitler avait maintenant un objectif clair qu’il déclarait publiquement. Hitler voulait devenir chancelier national allemand. La propagande et l’agitation des Nazis devinrent encore plus violentes et dirigée toujours contre les Juifs et les communistes qui étaient considérés comme la cause de toute la souffrance et de la désintégration du système économique.

 

Aux élections législatives du 31 mars 1932, les Nazis étaient bien équipés avec un très grand appareil de propagande et la propagande nazie pénétra dans tous les villages et toutes les villes allemandes. Tout était payé par le grand capital allemand. La crise économique devint toujours et encore plus grande avec plus de 6 millions de chômeurs. Hitler utilisa ceci très bien dans sa campagne populiste. Les succès électoraux des Nazis furent énormes en juillet 1932. Le parti eut 13,7 millions des voix (6,4 millions des voix en septembre 1930) et augmenta sa représentation parlementaire de 107 à 230 députés ! Les Nazis étaient le plus grand parti d’Allemagne.

Après les élections, l’exigence d’Hitler pour le poste de chancelier était évidente. Le président allemand Hindeburg refusa de donner le pouvoir à Hitler pensant qu’il n’allait pas respecter la constitution allemande. L’ancien président du Parti du Centre, Von Papen, eut la mission de former le gouvernement. Mais l’instabilité politique était grande et le gouvernement tomba. De nouvelles élections furent annoncées le 6 novembre. Les Nazis se réjouissaient d’avance d’une nouvelle victoire. L’objectif était d’avoir leur propre majorité au parlement et ceci était sûr pour la plupart.

Il n’en fut pas ainsi. Les résultats électoraux du 6 novembre 1932 furent un véritable retour en arrière pour les Nazis. Dans trois mois, du 31 juillet au 6 novembre, le parti alla de 13,7 millions de voix à 11,7 millions. Les Nazis avaient perdu 2 millions de voix et 34 places au parlement. La saga du succès des Nazis était tombée dans une impasse (rågat in i återvändsgränd). Le retour en arrière était marquant dans certaines villes où les Nazis avaient eu le pouvoir et où les populations avaient expérimenté leur capacité à gouverner, (et cela) malgré l’énorme propagande qui était en partie financée avec des fonds publics. Par ex. Oldenberg (de 47% à 37%), Kolberg, de 44 à 39, et Postdam de 42% à 34%. Les résultats des élections mirent fin à la collaboration entre le Centre et les Nazis, lesquels auraient pu, ensemble, avoir une majorité au parlement. « Le retour en arrière des nationaux socialistes est si grand qu’il leur est ensemble impossible d’atteindre le grand nombre dans le nouveau parlement », écrivit le journal suédois Dagens Nyheter.

Les Nazis avaient, jusqu’au milieu de 1932, eu tout ce qu’une politique populiste violente pouvait offrir. On avait mis les gens dans une situation de crise devant des fausses idées destinées à expliquer pourquoi la société était en crise, et ils avaient obtenu autant qu’ils pouvaient avoir, en utilisant des fausses promesses. Le retour en arrière était maintenant un fait.

« Le fol ramassis se trouvant dans le programme du Parti nazi s’adressait avant tout aux groupes les plus instables de la société allemande. L’esprit troublé d’Adolphe Hitler, avec ses expressions imaginaires sur la mystique du sang et du destin, avait fait sa plus profonde impression chez les plus troublés et les plus instables de ses auditeurs. Parmi ce genre de gens, l’intérêt – et les voix – pouvaient se perdre plus vite qu’ils n’étaient gagnés…. Lorsque les Nazis grandirent très fortement, ils furent l’objet d’un contrôle plus serré. Les chemises brunes dévoilèrent ce qu’elles étaient : Des types grossièrement sadiques organisés en bande politique. Le Parti nazi entra dans la décadence plus vite que n’avait été son ascension ». On ressentit, dans le pays, que quelque chose était en cours, que la défaite des Nazis était plus qu’un retour en arrière normal.

Par ailleurs, le Parti communiste allemand alla de l’avant. Les succès des communistes étaient la continuité des succès antérieurs. La politique du parti était bien accueillie par la classe ouvrière qui s’attacha encore plus fortement à la ligne du parti. En mai 1928, les communistes eurent 3,3 millions de voix, en septembre 1930, 4,6 millions, en juillet 1932, 5,3 millions de voix et puis en novembre 1932 6 millions de voix et 100 places au parlement allemand. Les succès des communistes étaient basés sur une conscience politique accrue au sein de la classe ouvrière allemande, une conscience qui avait grandi constamment pendant une longue période. Les résultats communistes étaient frappants dans plusieurs grandes villes allemandes. Les communistes avaient par exemple progressé à Berlin, allant de 721.983 à 860.579 voix. Les sociaux-démocrates avaient en ce qui les concerne, régressé de 722.064 à 646.266 voix. Les Nazis avaient fait de même, allant de 756.745 à 719.745. Les communistes constituaient le plus grand parti à Berlin, la capitale de l’Allemagne !


La Pétition à Hindenburg

Le grand capital exige Hitler comme chancelier national allemand

La situation était critique pour Hitler et le Parti nazi. Ceux qui auraient prix au moins 50% de voix, ceux qui étaient impossibles à vaincre et qui, selon Hitler, devraient naturellement prendre le pouvoir politique après les élections, avaient subitement régressé de 37% à 33%! Hitler avait eu tort. Il n’était pas sans faute, d’autres opinions avaient subitement de la valeur. Il ne fut plus possible de stopper les discussions et les critiques au sein du parti. Même contre Hitler ! Gregor Strasser, le deuxième homme du Parti nazi, comprit, après les élections, que les Nazis n’allaient jamais seuls prendre le pouvoir politique en Allemagne. Il préconisa une coopération avec le formateur de l’époque, Schleicher, lequel voulait, au moins, acheter une partie du soutien des Nazis. La rupture fut totale entre Stresser et Hitler. Stresser avait la responsabilité des contacts dans tout le pays et la confusion ne fit qu’augmenter dans le parti. Le parti était menacé de dislocation à cause des contradictions internes.

 

Stresser quitta le Parti nazi après quelques semaines et la dislocation de ce dernier s’approfondit. Le propagandiste en chef du parti, Goebbels, décrivit cette situation dans son journal intime : « Une grande dépression dans toute l’organisation. On se sent épuisé; on n’avait plus que l’envie de s’éloigner de tout le problème pendant quelques semaines… », « Appel téléphonique de la part du Dr Ley : la situation au sein du parti s’empire chaque heure ». « Le leader du parti avait pendant des heures fait des allées et venues dans un hôtel. On comprend qu’il réfléchit avec beaucoup d’efforts … Subitement, il s’arrête et dit : Je me tue si le parti se disloque. Une menace terrible, très déprimante. »

La situation du parti était très sombre même quand il s’agit de l’économie. « Le parti lui-même était économiquement en déroute. Fritz Thyssen avait prévenu en novembre qu’il ne pouvait plus donner plus de contributions au mouvement. Il n’y avait tout simplement pas des fonds qui pouvaient couvrir les listes des salaires des centaines de milliers des fonctionnaires du parti ou bien subvenir aux besoins de SA qui, seul, coûtait 2,5 millions de mark par semaine. Les imprimeurs de la magnifique presse nazie menaçaient de stopper les machines d’impression s’ils n’avaient pas reçu payement pour les factures déjà arrivées à échéance. ».

Le grand capital allemand vint au secours des Nazis pendant cette situation très critique. Ils avaient investi beaucoup d’argent dans le Parti nazi lequel avait promis de donner au grand capital un avenir à son goût et ne voulaient pas rater tout le morceau. Trente-huit des plus grands industriels et financiers allemands envoyèrent une Pétition au président Hindenburg pour soutenir Hitler et le Parti nazi. Malgré la défaite électorale de Hitler, les 38 exigèrent du président Hindenburg de donner le poste de chancelier national allemand à Hitler. Parmi ceux-ci, on trouva, la vraie crème de la grande bourgeoisie allemande : Schacht, et le baron von Schroeder du monde des banques, Cuno de Llyod de l’Allemagne du Nord, Krypp, Voegler et Thyssen de la branche sidérurgique et Siemens et Robbert Bosch de l’industrie électrique et des ateliers industriels.

La Pétition du grand capital allemand était déterminante pour l’avenir des Nazis. Elle était importante pour stopper la désintégration du Parti nazi après les élections du 6 novembre. Hitler devint, après la Pétition, un nom chaud au sein de la classe capitaliste et il était de retour dans le grand jeu politique. Même la faillite économique des Nazis reçut sa solution. Le grand capital avait alors décida de rendre Hitler et les Nazis libres des dettes. Le banquier, le baron Kurt von Schoerder de Cologne, l’un de ceux qui, pendant des années, avaient été actifs dans le financement d’Hitler, avait, au début du mois de janvier 1933, une réunion secrète avec Hitler.

Selon les propres propos de Schroeder aux procès de Nuremberg, Hitler avait promis, « de chasser les socio-démocrates, les communistes et les Juifs, de toutes les fonctions de direction en Allemagne et de rétablir l’ordre public ». La condition de Schroeder était d’arrêter toutes les grèves et les manifestations; obliger les travailleurs de se taire et de retourner dans les usines était le rôle d’Hitler. Hitler et Schroeder s’entendirent que les milieux des affaires allemands devraient prendre en charge les dettes du Parti Nazi. Moins d’un mois après cette réunion, Gobbels écrivit, dans son journal intime, que la situation financière du parti avait « au cours d’une nuit changé de manière déterminante ».

Parmi les 38 qui firent la déclaration de soutien à Hitler, il n’y avait personne de IG Farben. Le leader du géant industriel, Carl Bosch, n’était pas toujours prêt à soutenir publiquement Hitler. La crise politique continua pendant ce temps avec une énième formation du gouvernement, cette fois conduite par Kurt von Schleicher. Mais le gouvernement avait une base faible et il tomba comme d’autres gouvernements auparavant.

Le 30 janvier 1933, Hindenburg nomma finalement Hitler comme chancelier national. Beaucoup des choses ont été écrites sur la façon dont les choses s’étaient passées pour amener le président Hindenburg à changer d’avis. Hindenburg était totalement opposé à ce qu’Hitler devienne chancelier national. Il n’avait pas confiance en la disponibilité de Hitler de respecter la Constitution allemande. La description de l’histoire de la bourgeoisie renvoie toujours à des intrigues de tous genres qui avaient amené le président à changer d’avis. Toutefois, ce fut von Popen, ancien président du Parti centriste et manipulateur notoire (intrigmakare) qui avait de très bonnes relations avec Hindenburg. Et ce fut aussi le fils du président, Oscar Hindenburg, qui, au-delà du fait qu’il n’était pas spécialement intelligent, avait des dettes qu’on pensait provenir d’une aide étatique supposée illégale. La bourgeoisie cherche seulement à fuir ses responsabilités. Lorsque la situation s’était présentée, c’était le grand capital qui agissait exigeant Hitler comme chancelier national. Hindenburg s’était incliné devant les pressions du grand capital.

Le grand capital finance la campagne électorale d’Hitler

A l’exception d’Hitler, il n’y avait, dans le nouveau gouvernement, que deux autres nazis (Göran et Frick). C’était une exigence de Hindenburg. La position des Nazis était faible après la défaite électorale de novembre. Hitler exigea et obtenu de Hindenburg l’organisation des nouvelles élections au 5 mars 1933. On avait pensé qu’avec toutes les organisations de l’Etat, les élections allaient donner lieu à une victoire facile pour les Nazis. Mais pas seulement. Le grand capital allemand était cette fois-ci, d’une manière organisée, directement active et impliquée dans le soutien à Hitler et à la campagne du Parti nazi.

Le président du parlement allemand, Göring, convoqua, le 20 février, à travers Hjälmar Schacht, ancien président de la Banque nationale allemande et l’un des membres actifs du groupe financier qui soutenait Hitler, une réunion avec les dirigeants industriels et financiers en Allemagne. Cette réunion secrète de 20 personnes eut lieu au domicile de Hermann Göring. Il y avait aussi, dans le groupe se trouvant derrière Hitler, un nouveau membre, « Krupp von Bohlen und Halbach, leader des industries d’armement. Krupp devint l’un des plus loyaux partisans du parti d’Hitler une fois que Hitler eût le pouvoir ». Le but de la réunion était de rassembler de l’argent pour soutenir la campagne d’Hitler aux élections du 5 mars. « Lorsque tous attendaient que Göring vint parler devant les personnes rassemblées, Hitler apparut subitement en personne, serra la main à tous et prit place au coin de la table (bordsgaveln). Il parla longtemps, surtout sur le danger communiste, sur lequel il prétendait avoir justement remporté une victoire décisive ».

 

Il y eût aussi, à cette réunion, un représentant d’IG Farben qui venait pour la première fois et qui était bien préparé à donner un soutien actif à Hitler. C’était le bien connu Georg von Schnitzler dont la présence fit une grande impression sur les capitalistes rassemblés. IG Farben était la plus grande entreprise de l’Allemagne et l’une des plus grandes du monde. Schacht proposa aux participants à la réunion de rassembler 3 millions de mark pour Hitler. Le représentant de IG Farben donna la plus grande part, 400 milles mark. En dehors du pouvoir gouvernemental et de l’appareil du pouvoir, Hitler avait maintenant tout le monde de l’industrie et de la finance derrière lui et des gigantesques sommes d’argent à sa disposition. Rien ne pouvait l’induire en erreur.

Mais Hitler prit toutefois des précautions. « Le fascisme au pouvoir est une dictature ouverte, terroriste, (tenue par) des éléments les plus réactionnaires, les plus chauvinistes et les plus impérialistes » décida le Komintern en 1935. Le 4 février 1933, le président Paul von Hindenburg signa un décret qui donna au Parti nazi le droit d’interdire les réunions publiques, de déclarer les journaux et d’autres imprimés illégaux et d’arrêter les personnes suspectées de trahison. Le coup de chasse (la chasse) à l’opposition commença. Göring créa une force de police composée des milliers de membres provenant des groupes d’assaut nazis avec l’ordre de tirer pour tuer les « ennemis » en cas de confrontation.

Le 27 février, une semaine avant les élections législatives, les Nazis mirent le feu au Parlement et accusèrent les communistes d’être l’auteur de l’incendie. C’était le coup de propagande des Nazis pour arriver à une victoire totale aux élections. Le président von Hindenburg signa, après les élections législatives, un décret qui donnait au gouvernement et à Hitler, un pouvoir presque illimité. Le 3 mars, deux jours avant les élections, Ernst Thälmann, président du KPD, le Parti communiste allemand, fut arrêté. Les communistes furent poursuivis et arrêtés par milliers dans toute l’Allemagne. (Thälmann allait passer le reste de sa vie dans la privation de liberté par les Nazis. Il fut enfermé dans la prison des Nazis pendant 11 ans. Thälmann fut tué par les agents SS, probablement le 28 août 1944. Il fut déplacé de la prison à Bautzen pour le camp de concentration de Buchenwald où il fut assassiné. Son corps fut incinéré le 29 août 1944.)

Les élections législatives du 05 mars 1933 ne donnèrent pas malgré tous les résultats qu’Hitler comptait réaliser. Les Nazis voulaient absolument avoir la majorité absolue au parlement. Ils eurent 17,3 millions des voix et 43,9%. Les Nazis étaient toujours dépendants du soutien d’autres partis. Toutefois, le 23 mars 1933, deux jours après la première réunion du nouveau parlement, le parlement vota, avec le soutien du Centre, du Parti nationaliste et du reste de petits partis de droite, la loi des pleins pouvoirs, proposée par les Nazis. La loi des pleins pouvoirs donna à Hitler les pleins pouvoirs dictatoriaux dont le droit de gouverner sans interpellation du parlement pendant 4 ans. Le président von Hindenburg signa cette loi et la rendit applicable.

Le Parti communiste avait fait une bonne élection le 5 mars 1933. Bien que 20.000 communistes avaient été arrêtés et enfermés dans des camps de concentration et que des centaines d’entre eux étaient déjà assassinés, le parti eût plus de 4 millions des voix. Au milieu du mois de juin 1933, tous les partis, à l’exception des Nazis, étaient illégaux, la liberté de la presse était supprimée et les mouvements syndicaux interdits. La semaine de 60 heures devint la norme. L’exploitation devint marquante et avec elle les accidents sur les lieux du travail et les maladies. Les poursuites contre les Juifs débutèrent et ceux-ci commencèrent à affluer dans les camps de concentration où les communistes et les autres gens de gauche se trouvaient déjà.

Le chemin d’Hitler vers le pouvoir absolu atteignit son point le plus élevé lorsque le président Paul von Hindenburg mourut le 2 août 1934. Aussitôt après la mort du président, la direction de l’armée ensemble, avec le chancelier national adjoint Frans von Papen, acceptèrent que les postes de président et de chancelier soient réunis en un seul, en la personne d’Hitler, sous la dénomination de « fürher » et chancelier national. Le président était le chef le plus haut placé de l’armée allemande, et le corps des officiers et les soldats furent obligés de prêter un serment de fidélité au nouveau président, Hitler. La dictature était accomplie.

Hitler gagna le combat du pouvoir politique en Allemagne avec des millions de mark provenant du grand capital allemand. C’était avec ces énormes sommes que les Nazis construisirent le Parti nazi, son appareil de propagande et ses troupes d’assaut. La dictature de Hitler et du Parti nazi devint possible grâce au soutien parlementaire des partis de droite au nazisme et la trahison contre la démocratie.

Lisez la sixième partie de cet article
 
 

yogaesoteric

20 janvier 2020

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