Shambhala est réelle (VII)
Par Monica Dascălu
A l’Ouest, les premières références explicites faites à propos du roi de Shambhala apparaissent dans les écrits de Louis Jacolliot, auteur controversé et considéré comme « pas sérieux » par les critiques et les ésotéristes, du fait qu’il n’argumentait jamais de façon consistante ses déclarations. Par la suite apparu en 1910 l’œuvre posthume de Saint-Yves d’Alveydre, « Mission de l’Inde en Europe ». Malgré l’autorité de son auteur dans ce domaine, elle fut à son tour très controversée à l’époque en raison des révélations bouleversantes faites sur l’existence d’un centre d’initiation planétaire. Ce n’est pas un hasard si l’ouvrage de Saint-Yves s’inscrit parmi les mystérieux « livres maudits », dont la plupart des exemplaires ont été détruits dans un effort d’occulter des révélations ésotériques très importantes pour l’humanité. En 1924 suivit le livre de Ferdinand Ossendowsky, « Bêtes, Hommes et Dieux », qui contient lui aussi des informations très similaires à celles faites par Saint-Yves sur Shambhala et son roi.
Si Saint-Yves était un occultiste célèbre associée au mouvement théosophique, et dont les informations avaient probablement pour origine certains textes sacrés orientaux, Ossendowsky était par contre un scientifique, homme politique et militaire (il a été ingénieur minier, professeur universitaire de chimie, attaché militaire en Extrême-Orient etc.). Moins concerné par les questions philosophiques ou ésotériques, Ossendowsky a voyagé en Asie Centrale, fuyant de Sibérie en 1920 car il était poursuivi par l’Armée Rouge. Sa curiosité a été éveillée par ce qu’il appelle « le mystère des mystères ». Toutes les informations qu’il présente, il les a appris de gens ordinaires et de moines lorsqu il a cherché à en savoir plus sur le roi de Shambhala. En fait, Ossendowsky est le premier auteur se référant au roi de Shambhala avec le titre de « Roi du Monde », ce que reprit René Guénon dans une excellente étude parue en 1927 et appelée « Le Roi du Monde ».
Bien que Guénon explique que le titre de « Roi du Monde » est inapproprié pour nommer le Roi de Shambhala parce que dans son acception la plus rigoureuse elle s’applique plutôt à Manu, le gouverneur de l’actuel cycle cosmique, paradoxalement, la dénomination « Roi du Monde » est devenue usuelle après l’apparition de son étude. En même temps, l’ouvrage de Guénon est paradoxalement considéré comme le principale ouvrage de référence dans ce domaine. Les livres de Nicholas Roerich publiés après 1929 aux États-Unis sont passés presque inaperçus, malgré qu’ils contiennent beaucoup plus d’informations sur le Roi de Shambhala. Roerich avait recueilli ces informations lors d’un voyage à travers l’Asie centrale qui dura cinq années. Dans le contexte de la spiritualité planétaire, Guénon a le mérite incontestable d’avoir présenté de façon résumée et argumentée l’existence indubitable d’un mystérieux centre initiatique planétaire qui régit le destin de l’humanité.
Saint-Yves d’Alveydre ne dévoile pas explicitement les sources des informations qu’il révèle au sujet de Shambhala (pour laquelle il utilise le nom d’Agartha, mais il s’agit sans doute de la même chose). Il est connu qu’il a eu des liens avec le mouvement théosophique ; ses amis proches ont révélé le fait qu’il maîtrisait le dédoublement astral, ce qui peut expliquer comment il a pu apprendre un certain nombre d’aspects extrêmement occultes, même en Orient. Au-delà des considérations et des théories personnelles de l’auteur, le livre « Mission de l’Inde en Europe » contient beaucoup d’informations authentiques et même quelques révélations prophétiques exceptionnelles. Saint-Yves d’Alveydre présente entr’autres Shambhala comme un centre d’initiation ésotérique, structuré d’après une hiérarchie précise, de nature solaire et profondément religieuse. On pourrait même dire que pour les idées de l’époque, il associe d’une manière révolutionnaire la religion à la science, dévoilant l’existence de bibliothèques incroyablement vastes de ce centre religieux, qui thésaurisent des livres sur l’histoire, la sagesse et la science planétaire, ainsi que sur quelques expériences scientifiques menées dans Shambhala (certaines ressemblant de façon frappante à l’ingénierie génétique). Des appareils de vol, des sources inconnues d’énergie, des dispositifs techniques sophistiqués, des pratiques ascétiques, des pouvoirs paranormaux, des rituels mystiques se combinent de façon fascinante dans la vision de cet ésotériste.
Une autre association remarquable faite par Saint-Yves est celle entre la souveraineté (comme fonction du gouvernement) et le leadership religieux: c’est ainsi qu’il appelle le Roi de Shambhala « Souverain Pontife » Brahatmah, en traduction: « Celui qui soutient les âmes afin d’être en communion avec l’Esprit de Dieu le Père ».
Voici un extrait du livre de Saint-Yves présentant le roi de Shambhala: « A l’exception des plus grands initiés, personne n’a jamais vu le visage du Souverain Pontife. Toutefois, au cours de certaines cérémonies exceptionnelles comme celle de Jaggrenat, il apparaît en face de toutes les personnes présentes en costume magnifique, monté sur un éléphant blanc. De tout son être, de la tête aux pieds rayonne une lumière brillante aveuglante qui l’entoure en éclats merveilleux. Les traits de son visage ne peuvent pas être distinctement perçus à cause de nombreux diamants qui ornent sa tiare et qui réfléchissent la lumière solaire comme des éclairs de feu. Le costume cérémonial de Brahatmah est décoré avec les symboles de la science sacrée sous-jacente à l’organisation hiérarchique d’Agharta. Ainsi, ses vêtements sont marqués avec différents groupes de lettres magiques (mantras). Sur sa poitrine brillent des gemmes symboliques, consacrées aux archétypes des 12 signes du zodiaque. Le Souverain Pontife peut à tout moment à volonté, faire le miracle d’allumer spontanément la flamme sacrée sur l’autel, comme Aaron et ses successeurs. La tiare est composée de sept couronnes superposées et ornées de hiéroglyphes sacrés qui symbolisent les sept plans de la manifestation dans lesquels descendent ou montent les âmes en traversant les splendeurs divines.
Mais ce grand sacerdoce m’a paru encore plus grandiose lorsqu’après avoir ôté ses vêtements de cérémonie et tous les signes du pouvoir, tous les ornements et les bijoux, il est entré seul dans la crypte sacrée où se trouve le tombeau de son prédécesseur, s’offrant à l’Ange de la Mort dans toute son humilité absolue. »
Dans un autre passage, Saint-Yves nomme le Roi de Shambhala le Prince de la mort, parce qu’il a vaincu la mort. Des occurrences similaires du Roi de Shambhala sont racontées par Ferdinand Ossendowsky: « Pendant les fêtes solennelles qui avaient comme cadre l’ancienne forme de bouddhisme au Siam (Thaïlande) et en Inde, le Roi du Monde apparu cinq fois. Il était sur un char magnifique tiré par des éléphants blancs ornés de pierres précieuses, d’or et de tissus très fins ; il portait une robe blanche et sur la tête une mitre (tiare) rouge dont les rivières de diamants cachaient son visage. Il bénissait le peuple avec une pomme d’or sur laquelle était un agneau. Les aveugles ont retrouvé leur vue, les sourds commencèrent à entendre, les infirmes se levaient et marchaient et les morts ressuscitaient des tombeaux. Il a été vu à la fin du XVIIIe siècle à Erdeni-Dzu, puis il a visité les anciens monastères de Sakkia (le Tibet occidental) et Narabanchi Kure (en Mongolie). Bouddha Vivant (le dirigeant de Mongolie) et Tashi Lama ont reçu de lui un message écrit avec des lettres inconnues sur des plaques d’or. Personne ne pouvait lire ces signes, mais Tashi Lama entra dans le temple, mis la plaque sur sa tête et pria. En raison de ses prières, les pensées du Roi du Monde sont entrées dans son esprit et, sans avoir lu les inscriptions énigmatiques, il a compris et a accompli le message. »
Dans ce contexte, il est intéressant de mentionner un événement remarquable rapporté dans un journal de voyage de Nicholas Roerich, publié sous le titre « Heart of Asia » (Le Cœur de l’Asie) en 1929. Au cours de leur voyage, Roerich et quatre de ses compagnons furent tous témoins d’un événement paranormal, qui peut être expliqué soit par une interférence avec le plan subtil éthérique où existe le monde de Shambhala, soit par la manifestation exceptionnelle d’un grand prêtre de Shambhala dans le plan physique, comme une manifestation de la grâce divine. L’événement eut lieu près du monastère tibétain Ghum. Les cinq personnes voyageaient en voiture sur une route étroite ; à un moment donné, ils passèrent auprès d’une litière portée par quatre hommes habillés en gris. Dans la litière se trouvait un lama aux cheveux longs et noir avec une courte barbe noire, ce qui est assez inhabituel pour un moine tibétain. Encore plus inhabituels étaient les vêtements de ce lama, rouges et jaunes, impeccables – par contraste avec l’aspect habituel des moines tibétains, qui étaient habituellement très sales. En outre, ce lama portait sur sa tête une couronne. Il sourit aux voyageurs européens et fit à plusieurs reprises signe avec la tête. Roerich et ses compagnons furent très impressionnés par cette rencontre. Au cours des jours suivants, ils recherchèrent partout des informations sur ce mystérieux lama. À cette occasion, ils trouvèrent qu’il n’y avait pas de lama correspondant à cette description dans tout le district, que dans le Tibet seulement Dalaï-Lama et Tashi Lama étaient portés sur une litière et, qu’en outre, seulement ces deux portaient la couronne, mais uniquement dans les temples, dans le cadre des cérémonies religieuses spéciales.
La conclusion des Tibétains fut unanime : Roerich avait rencontré un grand lama de Shambhala. Le fait que Roerich a connu directement le monde de Shambhala est confirmé par une synchronicité remarquable, qui se passa cette fois-ci en Mongolie. À l’époque, on construisait en Mongolie souvent des temples et des monastères dédiés à Shambhala. Il y avait de nombreux festivals dédiés à Shambhala, et même les chansons militaires de l’armée mongole chantaient la future guerre menée par le roi de Shambhala. En bref, à la fois le mythe, la réalité et les prophéties de Shambhala étaient un sujet à l’ordre du jour en Mongolie du début du XXe siècle, y compris dans les cercles militaires et politiques les plus élevés. Impressionné par ceci, Roerich offrit au gouvernement de Mongolie une peinture faite par lui, représentant le roi de Shambhala.
Dans ce tableau, le roi de Shambhala est représenté entouré par les flammes. La réponse des politiciens fut incroyable et rapide : ils décidèrent immédiatement de construire un temple pour cette peinture. Toutefois, étonnés, ils demandèrent à Roerich de quelle manière il avait pris connaissance de la vision que l’un des plus respectés lamas mongoles venait d’avoir, vision dans laquelle le roi de Shambhala était exactement comme dans la peinture de Nicholas Roerich. Voici la vision de ce lama, telle qu’un membre du gouvernement de la Mongolie la raconta au peintre : « Le lama vit une grande foule de personnes de toutes les nations ; tous regardaient vers l’Occident. Puis est apparu un cavalier gigantesque sur un cheval semblable au feu, entouré par des flammes, portant dans la main le drapeau de Shambhala – il était le Roi béni de Shambhala. Il a commandé à la foule de regarder d’Ouest vers l’Est. La description du visage et des vêtements du Roi faite par ce lama est identique à l’image peinte par vous. »
Revenons à la description que Saint-Yves d’Alveydre fait du Roi de Shambhala. Un passage devenu ultérieurement célèbre – car il est sans aucun doute le plus spectaculaire – présente la « prière » du Roi de Shambhala, par laquelle il cherche à entrer en l’état de communion avec la Volonté Divine et avec les âmes de tous ses prédécesseurs (les Rois antérieurs de Shambhala). Saint-Yves nous laisse comprendre que, par des moyens paranormaux (dédoublement et projection astrale), il a assisté à ces moments sacrés. Ferdinand Ossendowsky décrit entre autres dans son livre « Bêtes, hommes et dieux » la discussion qu’il a eu à Urga, la capitale de la Mongolie, avec le bibliothécaire Bogdo-Han, qui était le chef de la Mongolie à l’époque et était appelé « Le Bouddha Vivant ». Celui-ci fait une description remarquablement similaire de la « conversation avec Dieu » tenue par le Roi du Monde. Plus loin, Ossendowsky raconte un moment remarquable vécu pendant son voyage à travers les plaines de la Mongolie. À un moment donné, le chameau de son guide s’agenouilla sans avoir reçu d’ordres. Le guide et d’autres Mongols se jetèrent à terre dans la prière. Ce fut un moment magique, suspendu entre le ciel et la terre, où toutes les créatures de la nature étaient figées en attente, comme paralysées.
La croyance des Mongoles était que dans ces moments spéciaux qui sont perçus intuitivement par les animaux et par certaines personnes, le Roi du Monde est en train de prier dans son palais souterrain, cherchant à connaître le destin des peuples. Voici la description de cette prière spéciale, telle qu’elle est présentée par Saint-Yves: « Dans la crypte sacrée se trouve le tombeau de l’ancien Roi recouvert par un tissu à franges, dont le nombre indique les siècles passés et les Pontifes précédents. Dans ce cadre mortuaire où il y a également certains instruments utilisés dans la Magie sacrée, Brahatmah monte lentement en récitant des prières et en réalisant les gestes d’un rituel spécifique ancien. Il est le symbole vivant du sommet d’une hiérarchie religieuse et académique, unifiant de façon indivisible la Religion et la Science. Profondément concentré dans la sainteté de sa prière intérieure, le Pontife joint ses mains puis, par la manifestation de sa volonté gigantesque, le cercueil de son prédécesseur sort de sa place en glissant. À mesure que Brahatmah continue son rituel magique, l’âme de son prédécesseur qu’il invoque commence à se manifester dans le haut du ciel. Afin de faciliter cette communication, Brahatmah utilise un dispositif spécial composé de sept lames ou fils conducteurs métalliques, qui se réunissent pour former deux tubes verticaux placés en face du Souverain Pontife. L’un de ces tubes est en or, et l’autre est en argent. Ils correspondent respectivement au Soleil, au Christ et à l’Archange Michael pour le tube en or, et à la Lune, à Mahomet et à l’archange Gabriel pour le tube en argent. Dans les environs se trouvent aussi d’autres outils rituels et objets magiques: les baguettes sacrées du Roi de Shambhala, une grenade d’or et une corne d’argent. Poursuivant sa prière destinée à l’unification de toutes les religions de la Terre, Brahatmah place la grenade d’or au-dessus de la corne d’argent et invoque simultanément les archanges Michel et Gabriel.
A mesure qu’il récite des invocations mystérieuses, les Puissances Célestes commencent à se manifester devant ses yeux spirituels. Il sent la présence et entend les mots de l’Âme invoquée, dont la manifestation est grandement facilitée par une armure de métal faite des sept métaux planétaires correspondant à l’échelle diatonique des sept Cieux. Ensuite, le Souverain Pontife et les Anges discutent dans la langue universelle qui est parlée dans Shambhala en un colloque théurgique. Les Anges lui transmettent du haut des Cieux les réponses à ses questions. Dans l’air se manifestent des signes magiques, qui forment l’écriture sacrée du Divin Logos. À mesure que ces Mystères sacrés s’accomplissent commence à s’entendre la musique éthérée des Sphères Célestes. Du corps embaumé du cercueil commence à se manifester une sorte de feu, comme une lave incandescente avec de nombreux filaments arborescents semi-fluides, presque matériels. Ce signe montre que l’âme du Pontife précédent traverse les hiérarchies célestes du Paradis où il est maintenant jusqu’à cet endroit. Les rayons concentrés manifestent tous ses souvenirs et ses pensées dans la crypte où se trouve son cercueil sacré.
Nous reproduisons ci-dessous l’histoire du bibliothécaire Bogdo-Han d’Ourga, cité par Ossendowsky:
« Reconnaître l’existence du plus saint et du plus puissant des hommes et du Royaume du Bonheur, du grand Temple de la science sacrée, est une consolation pour nos cœurs pécheurs et nos vies corrompues. Je considère qu’il est triste que les gens n’ont généralement pas accès à ce secret. Tout au long de l’année, le Roi du Monde guide les missions des prêtres de Shambhala. Parfois, il va dans la grotte du temple dans laquelle se trouve le corps embaumé de son prédécesseur, dans un cercueil de pierre noire. La grotte est sombre, mais lorsque le Roi du Monde y entre, ses murs sont éclairés par des rayons et du couvercle du cercueil sortent des langues de feu. Le plus âgé des prêtres marche devant lui, la tête et le visage couverts et les mains sur sa poitrine. Ce prêtre peut communiquer avec les âmes des disparus. Le Roi du Monde récite des incantations pendant un certain temps, puis il s’approche du cercueil et étend ses mains au-dessus de lui. Les flammes intensifient la lueur ; les traces mystérieuses sur les murs s’éteignent et réapparaissent, se croisant, figurant les signes mystérieux de l’alphabet sacré VATANNAN. Du cercueil commencent à apparaître des rayons lumineux translucides, qui sont à peine visibles au début mais qui deviennent au fur et à mesure plus intenses. Ce sont les pensées de son prédécesseur. Au bout d’un moment, le roi du Monde est enveloppé dans un halo de lumière, et les lettres de feu changent, formant des mots qui écrivent sans cesse les désirs et les ordres de Dieu. À ce moment, le roi du Monde est connecté aux pensées de tous ceux qui mènent le destin de l’humanité: les rois, les tsars, les Khans, les guerriers, les grands prêtres, les savants et les gens remarquables. Il peut connaître ainsi leurs pensées et leurs intentions. Quand elles sont agréables à Dieu, le Roi du Monde les impulse par son aide invisible ; sinon, il les fait échouer. Après avoir parlé à son prédécesseur, le roi du monde rassemble le Grand Conseil de Shambhala, juge les actions et les pensées des grands gens, les aide ou les écrase. Puis, le Roi du Monde entre dans le grand temple et prie dans la solitude. Le feu apparaît sur l’autel pour s’étendre progressivement aux sanctuaires voisins. À travers la flamme incandescente apparaît l’image de Dieu. Plein de vénération, le Roi du Monde lui transmet les décisions du Conseil et reçoit en retour les commandes célestes. En quittant le temple, le Roi du Monde est couronné de la gloire divine. »
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2012