Une trop grande exposition aux écrans modifierait le cerveau des enfants
Selon les premiers résultats d’une large étude des Instituts nationaux américains de la santé (NIH), le cerveau des enfants qui passent plus de sept heures par jour devant un écran ne ressemble pas aux autres.
L’aisance des enfants devant une tablette, un smartphone, ou avec une télécommande a de quoi déconcerter. Scrolling, play, pause, zoom, zapping, selfies… Ils savent tout faire, et ce dès le plus jeune âge. Ces capacités font-elles partie intégrante de l’espèce humaine nouvelle génération ? Sont-elles associées à des évolutions physiques ? Selon une étude menée par les recherches des Instituts nationaux américains de la santé (NIH), et dont les résultats préliminaires ont été dévoilés par la chaîne CBS News, cela pourrait être le cas.
D’après les premières conclusions de ce travail mené auprès de 4.500 enfants de 9 et 10 ans, le cerveau des ceux qui passent beaucoup de temps sur les écrans serait en fait modifié. L’intérieur de leur boîte crânienne a été analysé à l’aide d’imagerie par résonance magnétique (IRM).
Un cortex aminci
Les examens passés par les enfants montrent des « tracés différents » dans les cerveaux de ceux qui utilisent des smartphones, des tablettes et des jeux vidéo plus de 7 heures par jour. Ainsi, le cortex, l’écorce cérébrale qui traite les informations envoyées au cerveau par les cinq sens, s’en trouverait prématurément aminci. L’amenuisement de cette partie du cerveau « est considéré comme un processus de vieillissement », explique au média américain le docteur Gaya Dowling. Elle assure cependant qu’aucune conclusion ne peut être tirée à l’heure actuelle sur le caractère néfaste, ou non, de cette évolution. « Nous ne savons pas si cela est causé par le temps passé devant les écrans. Nous ne savons pas si cela est une mauvaise chose. Et cela ne sera pas le cas tant qu’un suivi au long cours ne sera pas fait et que des résultats prouvant des évolutions ne seront pas mis en avant. »
Un déficit de langage et de capacités intellectuelles constaté au-delà de 2h d’exposition
Une autre conséquence de cette exposition numérique a également été mise en lumière par les entretiens et les données récoltées par le NIH : celle d’un déficit de langage et de capacités intellectuelles à partir du moment ou un enfant passe plus de deux heures par jour devant un smartphone, une tablette ou la télévision. Un fait déjà dénoncé depuis longtemps par la docteure Anne-Lise Ducanda. Dans une vidéo publiée l’an dernier sur YouTube, ce médecin de PMI (Protection maternelle et infantile) alertait sur les « troubles exactement identiques aux troubles autistiques » qu’elle pouvait observer chez des enfants trop exposés aux écrans.
Hugo est l’une des victimes de ce monde numérique. A trois ans, il ne parlait toujours pas, ne répondait pas à son prénom et ne supportait pas le moindre contact physique. Pour l’expliquer, les médecins qui le suivaient ont tout d’abord pensé à l’autisme. C’est finalement sa maman qui va trouver les raisons de son comportement, en tombant sur la vidéo d’Anne-Lise Ducanda. Un électrochoc. « Au fur et à mesure que cette vidéo se déroule, je prends conscience qu’elle est en train de parler de mon fils. Et donc on arrête les écrans », explique-t-elle. Il passait alors trois à quatre heures par jour devant. Un mois plus tard, la transformation est spectaculaire. Hugo revit. Il a retrouvé l’interaction avec ses parents et apprend chaque jour des dizaines de mots. Des résultats qui n’étonnent nullement le médecin de PMI : « Ce n’est pas de l’autisme classique. Les troubles sont complètement réversibles à l’arrêt des écrans. »
Les écrans, addictifs et nocifs dès… 2 ans
Cette addiction aux écrans, le docteur Kara Bagot, également interviewée par la chaîne CBS News, l’explique par leur action sur la sécrétion de dopamine, l’hormone du plaisir. « Il y a donc plus de chance qu’on agisse impulsivement et qu’on utilise les réseaux sociaux de façon compulsive que, par exemple, s’occuper de soi », explique celle qui, avec son équipe, a scanné le cerveau d’adolescents alors qu’ils regardaient leur fil Instagram. Une addiction qui favorise l’obésité, les troubles de la vision comme la myopie, ou encore les troubles psychologiques, tels que la dépression.
Alors qu’une étude de l’Inserm révélait en septembre dernier qu’un enfant sur deux regardait déjà la télévision régulièrement à 18 mois, il convient d’agir avec raison. Pour le docteur Kierzek, chroniqueur sur LCI, il est tout simplement impensable de placer un enfant de moins de deux ans derrière un écran. « Ils vont tout absorber et ils vont avoir une espèce d’impossibilité de faire la différence entre ce qu’il se passe sur les écrans et la réalité », explique-t-il avant de citer la règle du 3-6-9-12, pensée par le psychologue Serge Tisseron : pas d’écran avant 3 ans, pas de console de jeu avant 6 ans, pas d’internet avant 9 ans et enfin, internet seul, mais avec prudence à partir de 12 ans.
Les vertus de l’ennui
Même si cela demande peut-être plus d’attention de la part de parents qui peuvent, certes, être débordés, mieux vaut privilégier les activités manuelles qui vont développer les sens et l’intelligence de l’enfant. Le psychopédagogue et neuropédagogue Alain Sotto, lui, prône également le retour de « l’ennui positif ». Interviewé par LCI, il décrit ses bénéfices sur la créativité et l’imagination de l’enfant. « L’enfant va alors se dire : tiens, qu’est-ce que je peux faire ? Qu’est-ce que je vais regarder ? Cela va l’inciter à nouer le dialogue avec l’autre, aussi. […] Les enfants, aiment qu’on leur raconte des histoires mais ils aiment aussi se raconter des histoires. Mon conseil, c’est de les laisser jouer dans un jardin. Je vois mon petit-fils de 5 ans et ma petite-fille de 2 ans, ils ne s’y ennuient pas une seconde, ils creusent, font des monticules, observent des insectes, parfois les martyrisent. Ils passent plus de temps à inventer des activités qu’avec leurs jouets qu’ils ont en abondance. »
yogaesoteric
4 octobre 2019
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