Ajna Chakra – aspects psychologiques
L’Oeil de la vision intérieure
un article de Ionela Voicu
“Celui qui se concentre intensément et médite profonde sur ce chakra, détruit graduellement tous les effets négatifs des actions antérieures de cette vie et des autres. L’adepte devient un grand yogi et devient un « libéré en vie » (jivanmukta). Il obtient les 8 grands pouvoirs paranormaux et les 32 pouvoirs mineurs.” Swami Shivananda
Le centre mental de commande, le centre de la connaissance géniale et spirituelle intuitive, Ajna Chakra, fait partie de la triade supérieure des centres énergétiques subtils de force. Tel que nous avons dit dans un article antérieur, Anahata Chakra, le quatrième centre énergétique, correspondant aux états empathiques, affectifs de l’amour et de la compassion universelle, marque le point de rencontre entre les énergies spécifiques aux premiers trois centres de force (liées à la survie, à l’appartenance de groupe, à la communication, aux relations, à la sexualité et aux processus volitifs) et les énergies spécifiques aux derniers trois centres de force (liées à l’intuition, à la connaissance, au discernement, à la perfection, à la déification, aux béatitudes). Vishuddha Chakra correspond, tant du point de vue physiologique, que psychologique, au processus complexe de nutrition, à l’état d’assimilation d’un état de réceptivité supérieure, d’une ouverture affective envers les inspirations divines. A ce niveau a lieu un enrichissement intérieur par l’accès aux mondes supérieurs de l’univers.
L’étape immédiatement suivante conduit l’être humain vers les perceptions intérieures les plus raffinées et les plus élevées, par l’éveil, l’amplification et l’assimilation du contrôle sur les énergies mentales. Ajna Chakra représente pour nous un „troisième oeil” orienté tant vers notre énigmatique univers intérieur que vers les aspects subtils et mentaux du monde, vers la perception directe des univers parallèles ; dans la tradition yogie, il est considéré comme le centre de la perception spirituelle.
L’éveil graduel et l’ouverture de la vision intérieure sublime à ce niveau signifie, en fait, l’accès de l’être à certains niveaux supérieurs de conscience que chacun de nous détient en état potentiel latent, mais qu’à présent, à cause de notre ignorance, nous ne pouvons même pas imaginer. L’accès systématique à ces plans supérieurs ultimes de conscience signifie l’évasion des limites de notre réalité éphémère et douloureuse de l’existence quotidienne. En plus, cela signifie l’évasion des concepts limitateurs de la conscience focalisés en prépondérance matériellement vers des états et des phénomènes extatiques où nous réalisons que nous devenons solidaires avec l’infini. Tout ceci veut dire aussi le dépassement des limites du temps, de l’espace et de la causalité apparemment inexorable.
Dans la conception yogie traditionnelle, le rôle d’Ajna Chakra en sa qualité d’œil intérieur spirituel se manifeste en prépondérance dans l’intégration harmonieuse de l’être dans l’univers. Ajna Chakra est un foyer d’émission et de réception des énergies pensées, des idées, des structures mentales à travers lesquelles nous pouvons concevoir et comprendre de façon cohérente l’univers subtil mental extérieur à notre être, ses énergies spécifiques, nous aidant à gouverner „notre univers intérieur”. De même que les yeux physiques nous aident à établir certains rapports avec les choses et les phénomènes extérieurs, analogiquement Ajna Chakra facilite et ordonne nos rapports avec les objets, les entités et les phénomènes spécifiques aux sphères de manifestation subtile astrale et mentale.
Celui qui sait comment se concentrer dans l’espace du milieu du front, entre les sourcils, au niveau d’Ajna Chakra, assimile par focalisation prépondérante à ce niveau une nouvelle perspective sur les principes et les concepts liés au temps, à l’espace et à la causalité. La focalisation intérieure prédominante de la conscience au niveau d’Ajna Chakra conduit l’être humain vers une étape évolutive extraordinaire où la multiplicité apparemment disparate des phénomènes et des événements peut être simultanément perçue dans une vision inter-corrélée, harmonieuse et parfaitement intégrée. L’état supérieur idéal qui caractérise ce centre de force est un éveil de la conscience à un niveau de profonde intuition et de compréhension intégratrice.
L’ouverture réelle du „troisième oeil” signifie l’équilibre entre analyse et discrimination, qui caractérise l’hémisphère cérébral droit, avec l’ouverture et l’accès direct au monde intuitif qui caractérise l’hémisphère cérébral gauche. Cela signifie mettre fin tant à l’intellectualisation stérile, sèche, qu’aux superstitions ou aux „pressentiments” fantaisistes; l’unification harmonieuse de ces deux modes de connaissance dans un tout unitaire.
Sur la voie de l’évolution spirituelle, l’aspirant à la perfection suprême traverse graduellement différents niveaux mentaux, nommés par les grands yogis : mental commun, mental supérieur, mental illuminé, mental intuitif et supra mental. Ces niveaux différents correspondent à des éveils de plus en plus profonds de la conscience et à l’accès dans des plans de plus en plus élevés. D’une vision fragmentée de la réalité on arrive graduellement à une sublime perspective d’ensemble, unificatrice et réintégratrice. A ce niveau supérieur, il existe en prédominance un état contaminant d’enthousiasme et de bonheur, un éveil brusque à une réalité nouvelle, où tout s’unifie dans une grande vibration de joie. En général, l’accès à cet état de conscience supérieure est accompagné par un épanouissement spontanée des capacités créatrices. Dans ce sens, il est connu qu’un éveil et une harmonisation du centre subtil de force Ajna Chakra conduit à l’assimilation du contrôle des énergies sexuelles (du potentiel créateur sexuel) correspondant au deuxième niveau, Swadhisthana Chakra.
La vision correspondante au niveau du sixième centre de force est globale, unique, divine ; l’être humain focalisée en prépondérance à ce niveau regarde les choses, les phénomènes et les êtres non seulement à la surface, mais englobe en même temps leur essence, les regardant de leur vrai centre.
Mots clef
Génie – don hérité d’une autre existence, qualité, capacité mentale exceptionnelle de création dans un certain domaine d’activité qui produit des valeurs. Dans l’Antiquité, on dénommait génie, tel que Socrate l’affirme devant le tribunal d’Athènes, la voix divine, intérieure, qui guide la trajectoire existentielle des gens particuliers. Plus tard, par le génie on comprenait la vocation unique qui existe pour la réalisation de certains oeuvres d’art se trouvant sous le signe de la perfection, concourant avec la nature. C’est le sens offert au terme de génie dans les textes kantiens. Il désigne, d’habitude, le degré le plus élevé de dotation naturelle de quelqu’un, avec de l’ingéniosité, de la fantaisie, de l’intelligence, de la capacité de compréhension des sens profonds du monde, de don de soi, de sensibilité, d’intuition en vue de la réalisation de certains oeuvres d’une valeur extraordinaire.
Intelligence – terme qui caractérise le pouvoir de pénétration et la fonction spécifique du mental d’établir rapidement des liaisons et de faire des connexions créatrices entre des phénomènes, liaison de nature à révéler la vérité. Le sens du mot est celui suggéré par „inter-legere”, en réunissant deux sens, ceux de discriminer avec lucidité entre lier, cueillir, mettre ensemble ce qu’en réalité représente ces liaisons. Dans le système du yoga, l’intelligence apparaît tant comme fait réel, un potentiel, que comme processus, une aptitude ou une capacité, en tant que forme et attribut de la capacité mentale, que celle comportementale.
Autocontrôle – le mécanisme et la capacité mentale de poursuite continue de notre comportement, particulièrement des réactions impulsives et d’équilibre, de modification ou de freinage, de retour à la normale. L’autocontrôle apparaît comme une dimension fondamentale du contrôle de soi en yoga.
Auto-observation – côté supérieur de la conscience du mental à travers lequel l’être humain suit, plus ou moins systématiquement, le développement de sa personnalité. Elle doit être observée tant sur les idées et les états spirituels que sur les effets complexes qui en résultent. L’objectivité, le sens autocritique développé, l’exigence amplifiée envers sa personne constituent des conditions nécessaires pour que l’auto observation représente une modalité efficace de l’auto éducation dans la pratique du yoga.
Introspection – vue ou regard orienté vers l’intérieur, vers ses états et déroulements intérieurs. Elle désigne avant tout un phénomène ou une dimension réelle du psychisme. Dans la perception de l’objet est inclue aussi la perception d soi, de l’observateur. La connaissance du monde implique la connaissance de soi. La conscience de soi et la conscience sur le monde sont indissociables. Les états intérieurs réunissent l’intérieur et l’extérieur. L’introspection est une méthode importante dans le yoga à l’aide de laquelle on conscientise, on examine et on décrit les phénomènes et les états de la vie affective, mentale et spirituelle personnelle, l’auto-analyse devenant ainsi possible. Par l’introspection supérieure sur les états vraiment spirituels, l’être humain peut arriver plus facilement à la révélation du Soi immortel Atman.
Discernement (viveka) – ce terme se réfère à la reconnaissance ou à la distinction qui se réalise entre ce qui est réel et ce qui est irréel, entre ce qui est vrai et ce qui est faux, et, particulièrement, ce mot se réfère à la différence d’entre le Soi Suprême individuel (Atman), essence immortelle spirituelle de l’être humain et le „non-Soi” (Anatman), c’est-à-dire le moi limité, éphémère et transitoire. Selon le grand sage Shankaracharya, le discernement est l’une des conditions indispensables qui doit être accomplie par celui qui aspire avec sincérité à l’atteinte de la connaissance spirituelle. Le terme de „viveka-khyati” signifie „vision claire du discernement” ou „sagesse qui a sa source dans le processus d’une correcte discrimination”. Dans les Yoga Sutra de Patanjali, il est mentionné comme étant la modalité directe d’obtention de la libération spirituelle, ne représentant pas seulement la compréhension spirituelle, mais plutôt la communion avec les hautes sphères spirituelles qui nous font vivre l’extase divine.
Siddhi – Pouvoir physique, psychique, mental et spirituel tout à fait extraordinaire ou paranormal, qui apparaît comme un corollaire de l’évolution spirituelle du yogi persévérant à mesure que dans l’être intérieur du yogi s’éveillent de l’état potentiel et s’amplifient graduellement certaines résonances ineffables avec des forces cosmiques, subtiles, secrètes qui réalisent effectivement les connexions analogiques, subtiles et profondes entre homme et l’univers. En général, le maître spirituel met souvent en garde l’aspirant contre la recherche égoïste de tout siddhis, parce que, pour celui qui est vaniteux et limité, ils ne contribuent pas à la réalisation de la Vérité Ultime, mais font partie du monde phénoménal ; l’attachement envers ces pouvoirs yogis ou l’orgueil qu’ils amplifient constituent un puissant obstacle sur la voie de la perfection spirituelle et de la libération spirituelle. D’autre part, ces siddhis apparaissent souvent spontanément, naturellement, sans être poursuivis par l’aspirant, suite à des pratiques spirituelles.
Jivanmukta – „libéré spirituel et grand sage en vie”, être extrêmement évolué spirituellement qui, bien qu’il ait atteint le sommet de la perfection, continue vivre dans le corps physique, jouissant totalement détaché des plaisirs et des joies transfigurées, essentielles de ce monde ou des autres mondes subtils. Il garde continûment la conscience identifiée à son Soi Éternel Atman, se maintenant ainsi dans l’état spirituel de Libération complète des chaînes de l’ignorance.
„A chaque fois que j’essaie de décrire les états spirituels que je vis et les visions spirituelles que j’expérimente en passant en cet endroit (Vishuddha Chakra), dès que je pense aux visions que j’ai, le mental semble s’évaporer, en englobant l’infini et toute description à ce niveau devient impossible. Pourtant, au cas où la conscience d’un être humain atteint fermement le point entre les sourcils (Ajna Chakra) se fixant à cet endroit, il a la connaissance directe du Soi Suprême Atman. Pour lui il n’existe plus alors qu’un voile transparent comme la soie. Le Soi Suprême est alors si proche que l’on semble être déjà en lui, complètement identifié avec lui. Pourtant, l’identification totale avec Dieu n’est pas encore apparue et cela finira par apparaître.” Ramakrishna
Un article tiré de la revue Yoga Magazin n° 42
yogaesoteric
2007
Also available in: Română