Anxiété, dépression, suicide… Le cerveau humain ressent le champ magnétique terrestre et est sensible aux changements cycliques de son activité (II)
Lisez la première partie de cet article
Magnétosomes, magnétite et champs magnétiques
La magnétite est un minerais constitué d’un réseau de complexes d’oxydes de fer — FeO-Fe2O3 ou Fe3O4. Ces complexes cristallisent et acquièrent des propriétés ferrimagnétiques. Connue depuis l’antiquité, la magnétite était supposée d’origine purement minérale. Cependant, on sait maintenant que des cristaux de magnétite sont présents dans de nombreuses espèces vivantes : bactéries, mollusques, arthropodes, etc. Au cours de l’évolution, ces espèces auraient développé la capacité de capter le fer présent dans leur environnement et de le convertir en magnétite — on parle alors de biomagnétite ou de magnétite biogénique.
a – La chaîne de magnétosomes (flèche) produit un moment dipolaire magnétique qui permet à la cellule de s’orienter dans les champs magnétiques ambiants. N et S représentent les pôles nord et sud de ce dipôle magnétique. b – Différentes morphologies de magnétosomes retrouvés dans diverses bactéries magnétotactiques.
Les bactéries magnétotactiques (MTB) sont des bactéries capables de se déplacer en suivant un champ magnétique, le champ magnétique terrestre notamment. En fait ce qui les rend sensibles à ces champs magnétiques ce sont les magnétosomes, aussi appelés aimants biologiques. Les magnétosomes sont de petites organelles dotées d’une membrane dans lesquelles s’accumulent des cristaux de magnétite. Des études récentes sur ces bactéries suggèrent qu’une trentaine de gènes au moins est impliquée dans ce processus.
Les bactéries synthétisent la magnétite à partir du fer qu’elles trouvent dans leur environnement. On sait que non seulement des bactéries, mais aussi des poissons, des oiseaux et d’autres espèces comme les chauve-souris savent accumuler le fer présent sous forme de sel dans leur environnement et le convertir en magnétite. Et c’est précisément grâce à la magnétite présente dans les magnétosomes de leur cerveau que ces animaux sont capables de s’orienter et de se repérer dans l’espace.
Les preuves scientifiques de plus en plus nombreuses de la magnéto-réception sont essentiellement comportementales, basées sur des modèles de mouvement, par exemple, ou sur des tests montrant que la perturbation ou la modification des champs magnétiques peut modifier les habitudes des animaux. Les scientifiques savent que les animaux peuvent sentir les champs, mais ils ne savent pas comment au niveau cellulaire et neuronal. « La frontière se situe au niveau de la biologie, c’est-à-dire comment le cerveau utilise réellement ces informations », explique David Dickman, neurobiologiste au Baylor College of Medicine de Houston, au Texas, qui, dans un article publié en 2012 dans Science, a montré que des neurones spécifiques de l’oreille interne des pigeons sont impliqués d’une manière ou d’une autre, en se déclenchant en réponse à la direction, la polarité et l’intensité des champs magnétiques.
Trouver les magnéto-récepteurs responsables du déclenchement de ces neurones a été comme chercher une aiguille magnétique dans une botte de foin. Il n’existe aucun organe sensoriel particulier à disséquer ; les champs magnétiques balaient tout le corps de manière invisible, tout le temps. Joe Kirschvink ajoute que « Les récepteurs pourraient tout aussi bien se trouver dans votre orteil gauche ».
Les scientifiques ont imaginé deux idées rivales quant au mécanisme de la magnéto-réception. La première est que les champs magnétiques déclenchent des réactions chimiques quantiques dans des protéines appelées cryptochromes. Des cryptochromes ont été découverts dans la rétine, mais personne n’a encore déterminé comment ils pourraient contrôler les voies neurales. L’autre théorie, que Kirschvink privilégie, propose que des aiguilles de boussole miniatures se trouvent dans des cellules réceptrices, soit près du nerf trijumeau derrière le nez des animaux, soit dans l’oreille interne. Les aiguilles, dont on suppose qu’elles sont constituées d’un minéral de fer fortement magnétique appelé magnétite, ouvriraient ou fermeraient d’une manière ou d’une autre les voies neurales.
En réagissant à la lumière, le cryptochrome produit des radicaux libres, des particules chargées électriquement et dont la position des électrons les uns par rapport aux autres influence les réactions chimiques qui se produisent dans la rétine. Or, la position de ces électrons dépend elle-même de la direction du champ magnétique ! Des modifications de ce dernier pourraient donc se traduire par des variations d’activité dans la rétine. De quoi imaginer une seconde forme de magnéto-réception, qui passerait par exemple par l’apparition de différentes taches, plus ou moins lumineuses, à l’intérieur du champ visuel, selon l’orientation du regard par rapport aux lignes de champ magnétique — voir l’infographie ci-dessous.
Cette hypothèse est renforcée par de nombreuses observations, à commencer par une étude de 1993 montrant que les rouges-gorges sont capables de s’orienter par rapport au champ magnétique uniquement sous des lumières bleues et vertes, auxquelles le cryptochrome est spécifiquement sensible. D’autres résultats tendant à impliquer ce mécanisme ont été retrouvés chez de nombreuses espèces, comme la mouche du vinaigre ou l’arabette des dames, célèbre plante de laboratoires. L’une de ces espèces est Homo sapiens … et la démonstration est à la hauteur des réticences de la communauté scientifique sur le sujet !
Cryptochrome ou magnétite ? Pourquoi pas les deux ?
Les magnéto-récepteurs chez l’être humain
Puisque l’on retrouve les mêmes magnéto-récepteurs chez l’homme, avons-nous alors nous aussi un sens magnétique ? « Peut-être l’avons-nous perdu avec notre civilization », dit Michael Winklhofer, biophysicien à l’université d’Oldenburg en Allemagne. Ou, comme le pense Kirschvink, il existerait chez l’être humain à titre de vestige.
Toutefois, une des questions importantes qui se posent à l’heure actuelle est de savoir par quel mécanisme ces particules magnétiques pourraient convertir les champs magnétiques en signal exploitable par le système nerveux central. Pour le moment on ne sait rien de précis. Une des hypothèses les plus vraisemblables est basée sur le fait que, premièrement les microcristaux de magnétite peuvent s’orienter très rapidement dans les micro champs magnétiques auxquels ils sont exposés et, deuxièmement, qu’ils sont situés sur la membrane des neurones ou dans son voisinage immédiat et donc pourraient influencer l’ouverture des canaux ioniques.
Or c’est précisément grâce au fonctionnement de ces canaux ioniques que s’effectue la transmission de l’influx nerveux. Il est donc tout à fait possible que les mouvements des microcristaux de magnétite permettent l’ouverture et/ou la fermeture de ces canaux en réponse aux champs magnétiques auxquels l’organisme est exposé. En d’autres termes, les microcristaux de magnétite permettraient aux neurones d’exploiter des informations par une voie autre que la voie classique qui fait intervenir des micros courants électriques via les synapses. Une étude de 2010 effectuée par Winklhofer & Kirschvink conforte ces hypothèses.
La présence d’un sens magnétique chez l’homme pourrait aussi constituer une première piste solide pour enfin faire la lumière sur les craintes sans doute justifiées d’une certaine dangerosité à vivre à proximité de lignes haute tension, notamment pour le rythme circadien.
Le cerveau et ses réactions aux changements dans la magnétosphère terrestre
La question que l’on peut se poser est la suivante : aurions-nous tous, plus ou moins, la capacité de « ré-activer » ce sens ? Quelles sont les conditions environnementales requises ? Un changement dans la magnétosphère terrestre peut-il le faire émerger ou au contraire l’éteindre un peu plus ? Et si cela dépendait des individus ? Certains pourraient alors le « ré-activer » pendant que d’autres n’en seraient pas capables.
La nature électrique du cerveau a été mesurée pour la première fois en 1924 par l’excentrique suisse Hans Berger avec son invention de la machine EEG. Le cerveau produit des décharges de microvolts d’une incroyable complexité. Le corps entier est un vaste labyrinthe électromagnétique synchronisé. Même les neuro-hormones dépendent de la connexion ionique, ou de la polarité électrique, pour fonctionner. Le cerveau étant lui aussi électrique, nul doute qu’il est affecté par les modifications électro-magnétiques — qu’elles soient naturelles, de type cosmiques et/ou artificielles, on pense aux satellites militaires et civils — qui se produisent au sein de la magnétosphère terrestre. Par ailleurs, notre Soleil est un facteur déterminant majeur lorsqu’il s’agit de la météorologie. Henrik Svensmark pense que les rayons cosmiques qui sont des ions positifs en sont le principal facteur.
Il existe suffisamment de preuves circonstancielles pour suggérer que les systèmes météorologiques de notre planète sont directement influencés par l’activité solaire, en particulier les particules chargées provenant des taches solaires, des éruptions solaires, etc., et que le champ magnétique terrestre est également directement affecté par ces rayons solaires — et autres rayons cosmiques. Comme la Terre, les êtres humains — et les animaux — sont également entourés d’un « champ magnétique ». Le champ magnétique terrestre pourrait-il être lié à des manifestations de folie chez les humains ?
Kelly Posner, psychiatre à l’université de Columbia aux États-Unis, déclarait en 2008 dans New Scientist que les orages géomagnétiques peuvent désynchroniser les rythmes circadiens et la production de mélatonine et ainsi provoquer des troubles mentaux. La glande pinéale, qui régule le rythme circadien et la production de mélatonine, est sensible aux champs magnétiques.
Posner déclarait aussi ce qui suit :
« Le système de régulation du rythme circadien dépend de signaux environnementaux répétés pour synchroniser les horloges internes. Les champs magnétiques peuvent être l’un de ces indices environnementaux. Les tempêtes géomagnétiques pourraient perturber les horloges corporelles, précipitant des troubles affectifs saisonniers et donc augmenter le risque de suicide. »
Quant au chercheur principal Robert J. Gegear, du département de neurobiologie de l’école de médecine de l’université du Massachusetts, il a en 2011 résumé dans Nature les résultats de l’étude mené par son équipe scientifique pour ce qui concerne le lien entre les êtres humains, les rayons solaires et cosmiques, et le champ magnétique terrestre comme suit :
« Notre étude suggère que les humains pourraient être génétiquement prédisposés à l’influence du flux géomagnétique en relation avec le champ magnétique de la Terre et les particules chargées telles que les éruptions solaires, les éjections de masse coronale, les rayons gamma et les rayons cosmiques galactiques. »
Un article paru en 2008 dans le magazine New Scientist souligne les recherches d’Oleg Shumilov de l’Institut des problèmes d’écologie industrielle du Nord en Russie. Shumilov a examiné l’activité du champ géomagnétique terrestre de 1948 à 1997 et a constaté qu’elle se regroupait en trois pics saisonniers chaque année : un de mars à mai, un autre en juillet et le dernier en octobre.
De manière surprenante, il a également constaté la chose suivante :
« Les pics de géomagnétisme correspondaient à des pics du nombre de troubles de l’humeur, c’est-à-dire de dépression, d’anxiété, de bipolarité — sautes d’humeur — et même de suicides dans la ville de Kirovsk, située au nord de la Russie, sur la même période. »
Question subsidiaire en guise de conclusion
Serions-nous en droit de nous demander si les élites derrière les Pouvoirs en place connaissent ces cycles, parce que le premier d’entre eux — mars à mai — correspond au confinement du printemps dernier, et que le troisième — octobre — pourrait bien correspondre à un deuxième confinement…