Chimiophobie : près de 40 % des Européens veulent un monde sans produits chimiques
Une nouvelle étude révèle que près de 40 % des Européens veulent « vivre dans un monde où les substances chimiques n’existent pas ». Par ailleurs, 82% ignorent que le sel de table est du sel de table, qu’il soit extrait de l’océan ou fabriqué synthétiquement.
Ce n’est pas un secret que l’individu moyen est scientifiquement analphabète. La question est : « A quel point est-il scientifiquement analphabète ? » La réponse est épouvantable.
Les chercheurs Michael Siegrist et Angela Bearth font état, dans la revue Nature Chemistry, d’une enquête qu’ils ont menée pour évaluer l’attitude des Européens à l’égard des produits chimiques. Ils ont interrogé environ 700 personnes de chacun des huit pays : Allemagne, Autriche, France, Italie, Pologne, Suède, Suisse et Royaume-Uni, pour un total de 5.631 participants.
La première série de questions était conçue pour mesurer la chimiophobie, la peur irrationnelle des produits chimiques. Comme le montre le graphique ci-dessous, 30 % des Européens déclarent avoir « peur » des produits chimiques, et environ 40 % essaient « d’éviter le contact avec les substances chimiques » et veulent « vivre dans un monde où les substances chimiques n’existent pas ». Il est évident que cela est impossible. Tout – l’eau, la nourriture, votre smartphone – est un produit chimique ou une combinaison de produits chimiques.
La deuxième série de questions a été conçue pour évaluer les connaissances de base en chimie et en toxicologie. Les résultats ont été bien pires : 82 % des personnes interrogées ne savaient pas que le sel de table est du sel de table, qu’il soit extrait de l’océan ou fabriqué synthétiquement. En outre, 91 % ne savaient pas que « la dose fait le poison » est vrai, même pour les produits chimiques synthétiques.
Comment les gens peuvent-ils être si peu instruits dans une société qui a accès à toutes les connaissances jamais produites par l’humanité ? Les auteurs proposent une explication tout à fait plausible.
Ils notent que le public est très éloigné des processus nécessaires à la production des matériaux que nous utilisons quotidiennement. Les gens ne comprennent tout simplement pas comment les aliments arrivent sans danger dans leur assiette ou comment un smartphone atterrit dans leur poche. Pour cette raison, les gens se fient à des raccourcis mentaux (heuristiques simples) pour prendre des décisions. Les décisions sont généralement mauvaises parce que les heuristiques sont des erreurs logiques.
Par exemple, une erreurs est l’heuristique de « contagion », dans laquelle on croit que même la plus petite quantité d’une substance toxique est nocive et « contamine » tout ce avec quoi elle entre en contact. Sous cette étrange lumière, une seule molécule d’une toxine est aussi dangereuse qu’une tonne métrique.
Une autre encore est l’heuristique de la « confiance », qui est essentiellement un recours fallacieux à l’autorité. Les gens font confiance à d’autres personnes qui partagent leurs valeurs, et non à des experts.
Un reproche à ce document est que les auteurs semblent s’éloigner de la conclusion la plus évidente :
« Notre intention n’est pas de propager un modèle de déficit naïf postulant que le manque de connaissances est la seule raison des perceptions négatives des produits chimiques synthétiques. »
Pourquoi pas ? C’est la bonne réponse.
yogaesoteric
3 mars 2020