Euthanasie : La France pourrait avoir la loi la plus tolérante au monde

Les députés de l’Assemblée nationale française débattent actuellement d’un projet de loi sur l’euthanasie. Pendant plusieurs semaines, une dynamique inquiétante s’est mise en place, suscitant l’inquiétude de l’opinion publique et du corps médical. Les barrières éthiques tombent les unes après les autres, faisant de cette proposition de loi l’une des plus permissives au monde.

Les parlementaires se réunissent actuellement en commission spéciale avant le débat général prévu dans l’hémicycle le 27 mai. Depuis le début des travaux d’examen de la loi, on assiste à une véritable déferlante d’amendements et de nouvelles dispositions visant à supprimer tous les garde-fous initialement proposés dans le projet du gouvernement pour limiter le recours à l’aide à mourir.

Ces derniers mois, le président Emmanuel Macron avait appelé à la « prudence », tandis que la ministre de la santé Catherine Vautrin souhaitait « maintenir l’équilibre ». Ces appels à la vigilance n’étaient peut-être pas sincères, mais au moins ils ont été lancés. Ils n’ont cependant pas été entendus.

Le premier changement significatif a été l’introduction de l’aide à mourir dans le code de la santé publique. Ce choix, apparemment purement formel, est très important. Il implique que l’euthanasie sera désormais considérée comme un « soin ». Il y a quelques mois, certains députés de gauche utilisaient déjà ce terme pour qualifier l’avortement.

Un deuxième changement important concerne les critères d’éligibilité à l’aide à mourir. La formulation initiale faisait référence à « une pathologie mettant en jeu le pronostic vital à court ou moyen terme ». Contre l’avis du gouvernement, les membres de la commission spéciale ont voté pour remplacer cette formulation par la notion de « phase avancée ou terminale » de la maladie. Yannick Neuder, député Les Républicains et médecin, s’est alarmé de ce grave changement de terminologie sur X : « Il y a des centaines de cas de maladies curables alors qu’elles sont en phase terminale ». Dans ces cas, les patients risquent d’être poussés de manière inappropriée vers l’aide à mourir.

Le cœur de la loi est l’article 5, qui définit l’expression « aide à mourir », c’est-à-dire l’administration d’une substance létale par la personne concernée. L’euthanasie, dans laquelle l’acte létal est accompli par un soignant ou un tiers, devait initialement constituer une exception pour les patients « dans l’incapacité physique de l’accomplir ». Là encore, les débats en commission ont modifié le projet initial. Un amendement a supprimé le critère de l’impossibilité physique, laissant le patient plus libre de choisir entre ces deux méthodes d’aide à mourir. L’euthanasie n’est donc plus une « exception ». Dans les pays qui avaient prévu de faire coexister les deux méthodes, l’euthanasie est finalement pratiquée dans l’écrasante majorité des cas. Le délai de 48 heures laissé au patient pour réfléchir à sa volonté de bénéficier d’une aide à mourir a été assoupli : il peut désormais être raccourci sur avis médical.

Erwan Le Morhedec

L’avocat et chroniqueur catholique Erwan Le Morhedec, bénévole en soins palliatifs, lanceur d’alerte et auteur d’un livre sur la marche vers l’euthanasie en France, suit au quotidien l’évolution de la législation et fait état de toutes les dérives constatées et connues dans les pays « en avance » sur la France en matière d’euthanasie. Faisant le parallèle avec les lois belges, néerlandaises et canadiennes, il conclut que la proposition française ira beaucoup plus loin et que les recours disponibles pour s’opposer au recours massif à l’euthanasie seront très insuffisants.

La députée LFI d’extrême gauche Danielle Simonnet milite « pour qu’il soit possible d’accéder à l’aide à mourir si l’on n’est plus pleinement conscient ». Le Morhedec rappelle qu’aux Pays-Bas et au Canada, cette approche a permis d’euthanasier des patients atteints de la maladie d’Alzheimer, une fois le critère de « fin de vie » supprimé.

Dans les dernières dispositions à ratifier par les députés, on apprend qu’il sera possible de contester la décision de refuser l’euthanasie, mais qu’il ne sera pas possible pour un proche de contester la décision de l’accorder. Sur le modèle de ce qui existe pour l’avortement, un « délit d’aide à mourir » a été créé, alors que la création d’un « délit d’incitation au suicide assisté » a été rejetée. Le parallèle entre l’avortement et l’euthanasie est parfaitement évident :

https://x.com/Genethique/status/1791576139074347048

A également été rejetée l’interdiction faite aux tiers demandeurs d’une aide à mourir de souscrire une assurance décès, interdiction initialement prévue pour éviter les abus de faiblesse. On imagine aisément les scénarios sordides qui découleraient d’une telle situation.

De nombreux parlementaires, de gauche comme de droite, s’inquiètent de la tournure que prend le débat. La députée LR de centre-droit Annie Genevard estime qu’une « boîte de Pandore » a été ouverte, tandis que le communiste Pierre Dharréville parle d’un « point de bascule » aux « dimensions anthropologiques vertigineuses ». La présidente de la commission, Agnès Firmin Le Bodo, du parti Renaissance au pouvoir, est également inquiète : « Nous ne travaillons plus avec la même loi. Ce n’est pas l’équilibre de la loi qui a été voulu ».

Le député LR Philippe Juvin a dénoncé la « manipulation des mots » autour des débats. Il a expliqué sur X que « les mots ‘euthanasie’ et ‘suicide assisté’ sont totalement absents du texte d’une loi qui ne parle que d’eux. » Les débats préfèrent parler de « jolies ‘maisons de santé et d’accompagnement’ présentées comme des avancées majeures ». Dans ces conditions, comment ne pas penser à la fameuse « mort miséricordieuse » vantée par les nationaux-socialistes dans le programme Aktion T4 destiné à mettre en œuvre l’élimination physique des handicapés dans le Troisième Reich en 1939 ?

Bien que timidement encore, des voix de protestation s’élèvent dans le débat public. L’ancien ministre centriste François Bayrou, interrogé sur la chaîne LCI, a expliqué qu’il était favorable à « une autre vision » qu’il estime « beaucoup plus généreuse et puissante en tant que société et civilisation ». Jeanne-Françoise Hutin, militante de la construction européenne âgée de 85 ans, a annoncé dans la presse qu’elle renoncerait à sa Légion d’honneur si le projet de loi était adopté. Elle explique dans le quotidien Ouest-France :

« Je ne pourrais plus intégrer cet ordre de la Légion d’honneur, qui a toujours défendu les plus vulnérables. La loi réintroduirait dans notre arsenal juridique un droit retiré en 1981 : le droit de donner la mort. Cette loi a pour but de mettre fin à la vie, de tuer des personnes qui sont dans une situation très fragile, avec, en plus, des limites complètement floues….… et on a vu ces dernières années ce qu’il en était quand les limites étaient floues ! »

Pour l’instant, la voix de l’Eglise catholique en France reste très timide, comme si le haut clergé n’avait pas pris la mesure de la gravité de ce qui se passe. Il n’y a pas eu de communication officielle récente sur le sujet.

Néanmoins, nous pouvons garder espoir. Ces mesures insensées ont été décidées par une « commission spéciale » – un petit groupe de députés. Il appartiendra aux députés, puis aux sénateurs en séance plénière, de changer le cours de cette réforme scélérate qui semble se dessiner en l’invalidant. Ils en ont le pouvoir, mais en auront-ils le courage ?

 

yogaesoteric
4 juin 2024

 

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