Menwith Hill : le porte-avion de la NSA au cœur de l’Europe

Des documents exfiltrés par Edward Snowden permettent de faire la lumière sur la plus importante base de la NSA hors des Etats-Unis : Menwith Hill, situé dans le Yorkshire.

 

La plus grande base de la NSA à l’extérieur des Etats-Unis est située au milieu de la campagne anglaise, dans le Yorkshire, à quelques kilomètres de la petite ville de Harrogate, à moins de 350 kilomètres au nord de Londres. C’est cette station d’écoute – appelée Menwith Hill – que ceux de The Intercept détaillent sur la base de documents secrets dévoilés par Edward Snowden. Y est notamment décrit le recyclage de cette base – autrefois vouée à l’espionnage des soviétiques, dans le cadre du réseau Echelon – en station d’écoute des communications électroniques sans fil, en particulier celles issues du Moyen-Orient et d’Afrique. Officiellement, les gouvernements américains et britanniques présentent Menwith Hill comme un relais radio et un centre de recherche sur les communications.

Un datacenter tout neuf

Au cours de la décennie passée, la NSA y a notamment implanté des outils de pointe permettant de localiser des personnes suspectes sur la base de leurs communications. Menwith Hill serait capable d’intercepter 300 millions d’e-mails et d’appels téléphoniques par jour.

Selon The Intercept, les investissements américains sur cette base se sont accentués à partir de 2008, sous la houlette de Keith Alexander (l’ex-directeur de la NSA). Objectif affiché par ce dernier, selon un des documents exploités : collecter toutes les données, tout le temps. Entre 2009 et 2012, la base a été dotée d’un nouveau centre d’opérations, dans lequel un datacenter (plus de 900 mètres carrés d’espace pour les racks) est chargé de stocker les données récoltées. Un investissement de 40 millions de dollars.

Ghosthunter : préparer les attaques de drones

La base sert en particulier à la préparation d’opérations militaires – notamment des attaques de drones –, en Irak, en Afghanistan mais aussi au Yémen, révèle The Intercept. Un programme appelé Ghosthunter, opérationnel depuis 2006, permet par exemple de localiser des cibles quand elles se connectent à Internet afin de préparer des opérations militaires (comprendre des assassinats ciblés dans la plupart des cas).

 


Menwith Hill, une zone militaire ultra-sécurisée et caractérisée par 30 dômes gigantesques protégeant les équipements qu’elle abrite des regards indiscrets, se concentre sur l’interception des communications sans fil. Selon les documents d’Edward Snowden, la base a deux objectifs principaux : l’écoute des faisceaux de communications que s’échangent les satellites non-américains (pour lesquels la NSA a recours à des antennes masqués par les fameux dômes) et l’utilisation des satellites américains pour espionner les communications au sol (sur réseaux mobiles et même WiFi). Ces deux programmes s’appellent respectivement Fornsat et Overhead.

En 2009 par exemple, 163 liens entre satellites non américains étaient ainsi discrètement placés sur écoute. Et, selon The Intercept, la base a peu à peu étendu son rayon d’action. Elle serait ainsi désormais en mesure, via des satellites, de cibler des communications en Chine ou en Amérique latine mais aussi d’offrir « une couverture continue de la majorité du continent européen ».

Tempora + Menwith Hill


 

Rappelons que le GCHQ et la NSA collaborent également sur l’écoute des backbone d’Internet (via le programme Tempora), la Grande-Bretagne étant un pays charnière dans les communications par fibre optique entre l’Amérique du Nord d’un côté et l’Europe, l’Afrique ou le Moyen-Orient de l’autre. La base de Menwith Hill apparaît comme un complément de Tempora et permet en particulier à la NSA de cibler des zones où les communications par fibre optique restent l’exception, faute d’infrastructure. Les installations du Yorshire se sont donc révélées essentielles dans les programmes de lutte contre le terrorisme, dans l’Amérique post-11 septembre, quand les Etats-Unis ont tourné leurs grandes oreilles vers des pays comme l’Afghanistan, le Pakistan ou l’Irak.

Menwith Hill emploierait 2.200 personnes, en majorité américaines. Mais 600 employés seraient des Britanniques, dont certains issus du GCHQ, les services de renseignement spécialisés dans les communications électroniques de la Grande-Bretagne. Les détails des opérations menées depuis la base du Yorkshire sont embarrassants pour le gouvernement britannique, car elles prouvent sa complicité dans des opérations militaires menées dans des pays avec lesquels la Grande-Bretagne n’est pas en guerre.


yogaesoteric

6 novembre 2017

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