Monde arabe : Une « génération perdue » du fait de la violence

SIDA, assassinats, suicide, violence… un avenir sombre pour le Moyen-Orient, faute de stabilisation



Le suicide et les assassinats ont décuplé en Asie occidentale produisant une « génération perdue », particulièrement dans la catégorie masculine de la population.

Telle est la principale conclusion d’une étude de « The International Journal of Public Health » publiée par le site en ligne Ar Rai Al Yom, dont la version arabe est sur ce lien pour le lecteur arabophone : « La violence a coûté la vie à 1,4 millions de personnes en 2015 au sein des 22 pays constituant l’Asie occidentale, notamment les pays suivants: Afghanistan Arabie Saoudite, Irak, Iran, Pakistan, les principautés pétrolières du Golfe, Somalie, Soudan et Syrie. 144.000 personnes ont trouvé la mort à titre de dommage collatérale des guerres régionales. Et la violence ancrée et permanente a produit une génération perdue particulièrement dans la catégorie masculine de population, notamment les jeunes et les enfants », poursuit la publication qui prédit « un avenir » sombre pour le Moyen Orient s’il n’est pas trouvé un moyen de stabiliser la zone dont la population s’élève à 600 millions de personnes.

Les troubles psychiatriques et psychanalytiques

Le rapport note un accroissement considérable du nombre de personnes atteintes de troubles psychiques et mentaux, notamment la schizophrénie, la paranoïa, les troubles bipolaires, la dépression et les crises d’angoisse. Le suicide est prohibé par la religion musulmane. Mais en dépit de cet interdit, le nombre des suicides s’est élevé à 30.000, en 2015, alors que 35.000 ont trouvé la mort du fait des violences faites par autrui (meurtre, assassinat). Soit une augmentation de 152 pour cent au cours du dernier quart de siècle (1990-2015).

Le rapport déplore le manque de spécialistes dans le domaine de la santé mentale : « En Libye et au Soudan le nombre de praticiens est dérisoire de l’ordre de 0,5 médecin pour 100.000 habitants, contre 40 praticiens pour 100.000 habitants en Europe. »

Les ravages du SIDA


Les décès imputables au SIDA ont décuplé entre 1990 et 2015, en un quart de siècle, les victimes étant situées dans leur grande majorité dans la Corne de l’Afrique, Djibouti, Somalie et le Soudan. Docteur Charbel Al Bachrawi, Professeur assistant à l’Institut d’évaluation de la politique médicale, a évalué que les malades de Sida atteints dans cette zone géographique avaient une vie infiniment plus courte que les malades vivant dans d’autres parties du Monde du fait de l’absence d’une infrastructure sanitaire, des conditions d’insalubrité de l’environnement et du faible niveau de ravitaillement médicamenteux.

L’étude comporte 15 monographies. 2300 personnes de 132 pays ont apporté leur contribution à ce rapport dont le lien suivant renvoie au site officiel de la publication.

La multiplication des mariages précoces de mineures


La précarité économique résultant de la multiplicité des guerres régionales s’est accompagnée de la multiplication de mariages précoces de mineures tant en Irak, qu’en Syrie, qu’au Liban et en Jordanie, ces deux derniers pays du fait de l’afflux de réfugiés syriens. Depuis le début de la guerre civile en Syrie, plusieurs organisations et agences ont tenté d’attirer l’attention sur la hausse des mariages précoces chez les réfugiés syriens au Liban. En 2014, une enquête de l’ONU a alerté sur le fait que le mariage précoce était devenu un phénomène très répandu, « à des taux plus élevés que les moyennes observées en Syrie avant l’éruption de la crise humanitaire, avec 18 % des jeunes femmes interrogées âgées entre 15 et 18 ans affirmant avoir été mariées ».

En Jordanie, selon un report de l’ONG internationaleSave the Children intitulé « Too Young to Wed » ( Trop jeunes pour être mariées), un mariage sur quatre entre réfugiés syriens dans le pays implique une fille âgée de moins de 18 ans. En 2011, le chiffre était de 12 %. En Irak, le nombre de mineures syriennes ayant contracté un mariage a également augmenté, et une similaire hausse a aussi été constatée en Égypte et en Turquie. 3.210 mineures syriennes ont contracté mariage en Jordanie en 2016. Un nombre sensiblement égal au Liban.

L’Europe, cible prioritaire, et l’Asie de l’Est, lieu d’implantation future de l’État Islamique

En dépit de la pression militaire exercées sur les groupements djihadistes, Daech et Al Qaida ont maintenu leur mobilité et leur capacité manœuvrière au premier semestre de 2017, estime un rapport d’expert présenté le 10 août 2017 au conseil de sécurité de l’ONU, dont le site en ligne Ar Rai Al Yom publie un condensé sur ce lien. Daech est toujours en mesure de parvenir de la Trésorerie à ses partisans en dehors du Moyen orient, utilisant pour ce faire, afin d’échapper aux contrôles, des virements d’un montant modique.

L’Europe demeure la cible prioritaire des groupements djihadistes, mais le rapport prête à l’Etat Islamique l’intention de s’implanter en Asie de l’Est avec pour point de mire le sud des Philippines, qui abrite une importante minorité musulmane dans l’Île de Minahouet.

Selon le rapport, le nombre de volontaires pour l’Irak et la Syrie a diminué : « La résistance de l’EI à Mossoul montre que sa structure de commandement et de contrôle n’a pas été complètement cassée et que le groupe reste une menace militaire significative. »

Outre son utilisation de drones trouvés dans le commerce, l’EI « a développé une capacité de les modifier et de construire ses propres modèles » pour diffuser sa propagande, faire de l’observation ou pour emporter de petites bombes ou explosifs, notent également les experts.

Al Qaida au Sahel et en Afrique de l’Ouest

En Afrique de l’Ouest, en Afrique de l’Est et dans la péninsule Arabique, notamment au Yémen, Al-Qaida conserve de son côté des réseaux puissants. En dépit de la « compétition stratégique » que se livrent les deux organisations, des alliances et des coopérations permettent dans plusieurs régions des mouvements de combattants entre différents groupes, relève aussi le rapport.

Au Sahel, Al-Qaida continue de représenter « une menace significative », comme en Afrique de l’Est où les membres affiliés à ce groupe et à l’organisation Etat islamique seraient entre 6.000 et 9.000. Depuis l’établissement de ce rapport, les groupements djihadistes ont perdu plusieurs de leurs places fortes tant en Syrie qu’en Irak. Outre Alep, en décembre 2016, Nord de la Syrie; Mossoul, Irak, en juin 2017, et Ersal, frontalière libano syrienne, en août 2017, enfin Raqqa (Syrie) en octobre 2017.

Les chiffres du terrorisme


 


Depuis le début du XXIème siècle et jusqu’en 2014, 151.618 actes terroristes ont été dénombrés à travers le Monde (dans 151 pays), dont 62.312 au cours des deux dernières années (2013-2014), une période correspondant au surgissement de Da’ech et Jabhat An Nosra sur le théâtre du Moyen-Orient et la montée en puissance de Boko Haram en Afrique.

Les pertes économiques résultant du terrorisme se sont chiffrées, depuis le début du XXIème siècle et jusqu’en 2014, à 5 trillions de dollars. (Un trillion équivaut à mille milliards de dollars). Un chiffre suffisant à lui seul pour résoudre le problème du chômage dans la totalité des pays à hauteur de 65 pour cent des cas.

Le nombre des tués du fait du terrorisme, en 2013 -2014, s’est élevé à 632.716 personnes et les blessés à 1.763.802 personnes. Le nombre des déplacés et réfugiés a bondi à 18 millions de personnes à travers le Monde du fait du terrorisme. 12,5 millions de femmes subissent la loi directe du terrorisme ainsi que toutes sortes de forme de répression et de sauvagerie. 17 millions d’enfants sont victimes d’abus et de violences, sans la moindre possibilité d’intervention en leur faveur. Des exécutions quotidiennes sont commises dans la plus grande discrétion échappant de ce fait à la connaissance de l’opinion publique; des enfants victimes d’abus sexuels; des lois qui n’avaient pas cours même au Moyen-âge sont désormais appliquées avec vigueur sur fond d’une sauvagerie sans pareille, et son cortège de désolation et de malheurs.

Le coût économique de la guerre contre le terrorisme: 22 trillions de dollars pour la période 2011-2014

En 2001, 80 % des actions terroristes impliquaient l’usage d’armes primaires (basiques) et d’explosifs à faible effet. Depuis lors 72 % des assauts mettent en œuvre des armes sophistiqués et d’explosifs à fort pouvoir détonateur, ainsi que la haute technologie et des procédés d’intelligence inhabituels.

Avant 2011, les offensives terroristes prenaient pour cible, dans 90 % des cas, des groupements hostiles clairement définis, alors que pour la période s’étendant de 2010 à 2014, les assauts terroristes ciblaient l’autre pour son altérité, sans autre motif d’hostilité et cela dans une proportion de 81 %. Au-delà des pertes économiques mentionnées de l’ordre de cinq trillions de dollars, le budget global consacré à la lutte contre le terrorisme s’est élevé à 22 trillions de dollars durant les années 2011-2014.


Le verdict du rapport sur « l’injustice dans le monde arabe et les moyens d’y mettre fin »

(Une œuvre collective dirigée par la Palestinienne Rima Khalaf, ancien Haut fonctionnaire des Nations Unies, en signe de protestation contre la censure de ce rapport)

« Le Monde arabe est l’unique zone du Monde où subsiste un fait colonial classique (Palestine), la première zone du XXIème siècle, théâtre d’une occupation officielle étrangère (invasion américaine de l’Irak en 2003).

Bon nombre de pays arabes ont été forgés par le colonialisme et pâtissent de ce fait d’un défaut de légitimité structurelle. Les pays arabes ne jouissent pas d’une réelle indépendance. Bien au contraire, leur dépendance vis à vis de l’extérieur s’est accentuée. Le rapport fait, semble-t-il, particulièrement allusion aux pétromonarchies du Golfe passées du protectorat britannique à l’imperium américain, sans le moindre délai de latence, dans la foulée de l’Indépendance octroyée par le Royaume Uni aux anciennes principautés de la Cote des Pirates, dans la décennie 1970. La répression et la corruption constituent les fondements du pouvoir arabe en ce que la majorité des gouvernements arabes ne tire pas sa légitimité de la volonté populaire, mais d’un appui extérieur ; un fait qui les conduit à mener une politique conforme aux intérêts de leurs protecteurs.

En dépit des dégâts infligés par les forces étrangères en Palestine et en Irak, les élites dirigeantes du Monde arabe continuent de solliciter leurs interventions, alors qu’il est de notoriété publique que les forces étrangères ne protègent que leurs propres intérêts et ne tranchent une bataille qu’en leur faveur.

L’injustice est à la base de la destruction du Monde arabe. L’amplification de la violence dans le Monde arabe, de même que la montée en puissance des idéologies éradicatrices et frappant d’apostasie quiconque prône la diversité, parallèlement, à l’accentuation dans le tiers des pays arabes ont été générées par l’injustice dans toutes ses déclinaisons ».

Les guerres d’extermination menées ces cinq dernières années (printemps arabe) ont provoqué la mort de 500.000 civils et de milliers de blessés et de disparus, générant un flux migratoire sans pareil depuis la Deuxième Guerre mondiale (1939-1945). La répression des protestations populaires a entraîné une radicalisation du mouvement et sa militarisation.

La Palestine : une parfaite incarnation de l’injustice subie par son peuple et de l’injustice qui plane sur le fonctionnement de ses éléments constitutifs


Les Palestiniens subissent le joug de l’occupation, leurs droits spoliés y compris leur droit à l’autodétermination et le droit au retour des réfugiés dans leurs foyers. Les épreuves des Palestiniens se doublent du racisme dont font preuve à leur égard les autorités d’occupation qui croient en la suprématie d’un groupe religieux sur un autre, s’autorisant, par ce biais, à s’affranchir de la légalité internationale, en établissant un État fondé sur la discrimination.

La fin de la non belligérance entre Israël et les pays arabes, via des négociations globales entre les deux parties, objectif latent de la diplomatie atlantiste, revient à placer les pourparlers sous la menace atomique israélienne. Or, paradoxalement, trois puissances nucléaires du Tiers Monde ont accédé à la capacité nucléaire du fait du soutien technologique occidental, mais le camp atlantiste frappe néanmoins d’embargo l’Iran pour entraver son accession au rang de puissance de seuil au prétexte de la lutte contre la prolifération nucléaire.

En 2015, le Monde arabe a alloué 190 milliards de dollars à ses dépenses d’armement, alors que le montant global des dépenses militaires dans le monde s’est élevé à 1,7 trillion de dollars; une somme qui englobe les dépenses des puissances majeures de la planète (Chine, États Unis, Russie, Inde, Pakistan, France, Royaume Uni). L’Arabie saoudite et les Émirats Arabes Unis figurent parmi les 15 premiers clients de l’industrie d’armement dans le Monde. L’Irak a enregistré la plus forte hausse durant la décennie 2005-2015. en 2015, l’Irak a dépensé 13 milliards de dollars en armement, en augmentation de 35 pour cent par rapport à 2014.

Les pays en développement enregistrent une perte annuelle de 100 milliards de dollars, soit 4,4 pour cent de leurs recettes fiscales du fait des manipulations des cours opérées par les Multinationales, souligne le rapport qui déplore « l’instrumentalisation des crimes contre l’humanité » à des fins politiques, de même que la course aux armements. Les réformes de façade ne sont plus de mise. Peu de choix s’offrent désormais aux Arabes. La reconfiguration géopolitique de la zone se fait loin de leurs capitales respectives, au sein plutôt des salles d’état-major. L’unique choix qui s’offre désormais aux Arabes est le suivant : soit qu’ils soient les artisans de leur propre changement, soit qu’ils subissent les lois de l’étranger.

Les paumés de l’islam

Le bilan est éloquent : « les six “ sales guerres ” de l’époque contemporaine sont situés dans la sphère de l’Organisation de la Conférence Islamique (Syrie, Irak, Afghanistan, Somalie Yémen et Libye) générant 60 millions d’enfants musulmans pâtissant de la pauvreté, de la maladie, des privations et de l’absence d’éducation, alors que 12 pays musulmans comptent le taux le plus élevé de mortalité infantile et que 60 % des enfants n’accèdent pas à la scolarité dans 17 pays musulmans. »

(Cf. à ce propos Haytham Manna, président de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme dans son ouvrage « La Résistance civile, contribution à l’auto-immunisation des sociétés » – SIHR 2ème édition 2015).

Le panorama se passe de commentaires : la précarité économique avec son cortège de marginalisation, de réclusion sociale, de délit de faciès, de délinquance, de récupération religieuse, à l’arrière-plan d’une dynamique de groupe sur des êtres fragilisés dans un univers carcéral constituent autant de facteurs de trébuchement, voire de basculement.

En superposition avec une infantilisation religieuse, sur fond de démagogie et d’instrumentalisation de l’islam comme arme de combat contre l’athéisme soviétique (Afghanistan 1980-1989), puis contre les pays arabes laïcs (Libye, Syrie) avec la complicité des pays occidentaux (2011-2014) ces facteurs ont fini par générer, au terme d’une séquence houleuse d’un quart de siècle, un être hybride, paumé de l’Islam et paumé de la République, djihadiste par filière de la délinquance, un fou de Dieu, un zombie criminogène.
 
 
 

yogaesoteric

11 avril 2018

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