« Drogue du zombie » : qu’est-ce que la xylazine, substance qui inquiète les États-Unis ?

Ralentissement de la respiration, baisse de tension artérielle, perte de conscience, hallucinations ou encore nécroses, tels sont les différents symptômes causés par la xylazine, composé normalement utilisé en médecine vétérinaire. Ces dernières années, elle est de plus en plus utilisée avec les opioïdes en tant qu’adjuvant, et inquiète particulièrement les Etats-Unis.

Cocaïne, héroïne, fentanyl… La crise des opioïdes qui a fait plus de 500.000 morts ces 20 dernières années continue de s’aggraver aux États-Unis. Ces drogues touchent particulièrement les jeunes et les milieux modestes, parce qu’elles sont facilement accessibles et hautement addictives. Le fentanyl en particulier, qui a fait des ravages ces dernières années aux États-Unis et au Canada, est environ 50 fois plus puissant que l’héroïne : les risques de dépendance et d’overdose sont donc nettement plus élevés.

En ce début d’année 2023, c’est de la xylazine, surnommée « tranq » ou « drogue du zombie » qui inquiète en particulier l’Agence américaine des médicaments. Prise en combinaison avec d’autres drogues, comme les opioïdes ou l’alcool, ses effets sont dévastateurs.

Un produit dangereux souvent combiné avec des opioïdes

La xylazine est un composé normalement utilisé en médecine vétérinaire et dont l’usage est approuvé pour les chats, les chiens et les chevaux, en tant que sédatif ou pré-anesthésique. Non adaptée à l’homme, cette drogue est un agoniste adrénergique : elle bloque la fonction des récepteurs adrénergiques impliqués dans la régulation de la tension artérielle ou du rythme cardiaque. En stimulant les récepteurs adrénergiques alpha2, la xylazine empêche la libération de noradrénaline, ce qui empêche la stimulation des récepteurs adrénergiques alpha1.

« Dès qu’on arrête de stimuler les récepteurs alpha1, on a une perte de conscience, d’attention, une extrême sédation et éventuellement des délires ou des hallucinations : c’est très certainement pour cela qu’on l’appelle la drogue du zombie, même si ce nom est plutôt erroné (…) », explique à Sciences et Avenir Jean-Pol Tassin, directeur de recherche émérite à l’INSERM et spécialiste de l’addiction et du sevrage. Le terme « drogue du zombie » a en effet déjà été utilisé pour caractériser d’autres drogues, comme celles de la famille des cathinones, pouvant provoquer hallucinations et sédation. Dans le cas de la xylazine, ce surnom se justifie aussi par le fait que celle-ci soit responsable de lésions cutanées importantes, pouvant aller jusqu’à la nécrose et nécessiter l’amputation des membres atteints.

Une circulation difficile à contrôler

D’abord décrits au début des années 2000, les cas d’overdose répertoriés n’ont fait qu’augmenter depuis les années 2010, et encore plus récemment depuis 2020. Cette même année, la xylazine était impliquée dans 26% des overdoses de l’Etat de Pennsylvanie.

Outre son prix très peu élevé comparé à d’autres substances, il est très facile de s’en procurer aux Etats-Unis. Son usage n’étant pas destiné à l’humain, elle n’est pas aussi bien contrôlée que peuvent l’être d’autres substances comme les opioïdes, c’est pourquoi la FDA a récemment pris des mesures destinées à contrôler son importation sur le territoire. « Nous reconnaissons les effets sur la santé publique de la contamination de ces drogues illicites par la xylazine et nous continuons de veiller à ce que le produit légitime soit réservé à un usage vétérinaire uniquement » a précisé Tracey Forfa, directrice du centre de médecine vétérinaire de la FDA dans un communiqué de presse.

La naloxone inefficace

« Le problème avec cette drogue et ce qui la rend particulièrement dangereuse, c’est que l’intervalle entre la dose létale et la dose d’efficacité est faible », reprend Jean-Pol Tassin. Cette substance prise seule constitue donc déjà un danger en elle-même, mais l’est encore plus lorsqu’elle est prise avec de l’alcool ou des opioïdes. Aux Etats-Unis, certaines drogues, notamment le fentanyl, peuvent être coupées avec de la xylazine sans que les consommateurs n’en soient informés. En 2021 à Philadelphie, plus de 90% des échantillons de drogue saisis contenaient de la xylazine.

Cette substance pose d’autant plus problème qu’à ce jour, il n’existe pas de traitement efficace pour contrer ses effets. La naloxone, utilisée comme antagoniste des opioïdes n’est pas efficace contre la xylazine, bien que son administration reste recommandée en cas d’overdose (celles-ci étant souvent dues à des prises combinées de xylazine et d’opioïdes).

 

yogaesoteric
10 avril 2023

 

Also available in: Română

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