CHINNAMASTA – La déesse sans tête offre le discernement parfait

                                                                                                                        de professeur de yoga Dan Bozaru

L’image terrible de Chinnamasta, la sixième Grande Puissance Cosmique du panthéon hindou, est la plus expressive modalité de suggérer la transformation fondamentale de l’être humain de renoncer à l’individualité limitée et éphémère de l’ego, pour qu’elle soit résorbée de façon extatique dans la plénitude de la Conscience Universelle de Dieu le Père.

Dans le panthéon tantrique, la sixième Grande Puissance Cosmique est CHINNAMASTA, la déesse avec la tête coupée. Cette particularité symbolise la capacité de transcender le mental et ses fonctions, pour réaliser la résorption extatique dans le Vide Suprême de la Conscience Divine Absolue. L’image sans tête de CHINNAMASTA a provoqué, au long du temps, de nombreuses réactions adverses et des interprétations erronées même de la part des orientalistes réputés, étant associée aux pratiques et traditions magiques obscures du Tibet et de l’Inde. En réalité, ces considérations hâtives n’ont représenté que les essais limités de l’Occident de comprendre le sens profondément ésotérique de certains aspects de la tradition spirituelle tantrique, les significations qui dépassent de loin le conventionnel, le grégaire et les images chablon que les gens de la société moderne construisent toujours, étant ainsi limités par les religions et les préjugés qui enkystent. En conséquence, la tendance relativement naturelle des chercheurs orientalistes (confrontés aux représentations traditionnelles de la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA) a été, premièrement, celle de voir dans les images de la Déesse dans Tête la manifestation de certains aspects macabres et des dérèglements psychiques en ce qui concerne les artistes qui les ont réalisés, leur étant donc impossible d’accepter l’idée d’un symbolisme spirituel avec des profondes significations ésotériques.

La sagesse est au-delà du mental

Du point de vue psychologique, ce qui provoque en réalité le sentiment de peur et de rejet en regardant la représentation d’une entité sans tête est l’idée du manque d’identité, que les gens associent immédiatement et inconsciemment à leur être. Or, il est connu que le sens de l’identité, autrement l’individualité, représente l’élément fondamental d’„appui” de l’être humain dans la manifestation, la base de la compréhension et de la conception sur lui-même et sur le monde extérieur. Une fois que cette idée ou « support » a été éloigné, l’homme commun se sent complètement désorienté, sans aucun point de référence, perdu dans un inconnu ténébreux. Ainsi, il suivra de se protéger par toute modalité (tant au niveau subconscient, qu’au niveau conscient) non seulement de la „perte” de son identité, mais aussi des idées ou des suggestions extérieures, plus ou moins explicites, en ce qui concerne cette „séparation de l’identité (ou de l’ego)”. L’homme moderne, dont le comportement et mode de penser est en prépondérance logique et rationnel, considère que „perdre la tête” équivaut à perdre la liaison avec le sens commun de la réalité ce qui, de certaines perspectives, est parfaitement vrai.

Cependant, du point de vue spirituel, ces aspects reçoivent des significations complètement différentes. Être „sans tête” représente, par exemple, l’une des connues métaphores subtiles pour les yogis initiés, qui se réfère à la transcendance de l’identification avec la conscience corporelle ou au dépassement de l’attachement envers les pensées et les désirs. En parlant du point de vue pratique, nous n’observons pas plus notre tête que notre dos, mais l’expérience de l’intérieur du crâne est en essence l’expérience d’un espace vide, parce que personne ne peut affirmer, par exemple, qu’il „sent” son cerveau et ses glandes annexes. Donc, à une analyse lucide et détachée, de la perspective symbolique de ces aspects, nous pouvons affirmer que, pratiquement, „nous n’avons pas de tête”, au moins jusqu’au moment où nous nous regardons le corps dans un miroir.

De la perspective de la tradition spirituelle yogie, la condition de l’état „sans tête” représente, en fait, notre vraie nature intérieure, celle du témoin divin parfaitement détaché. Implicitement, une telle condition nous démontre le fait que notre „localisation” actuelle dans ce corps ne constitue en fait qu’une apparence illusoire et non pas une réalité fondamentale de notre être. Si, par exemple, la pensée puissante et constante „je suis ce corps” ne serait plus soutenue par le mental, la conscience individuelle reviendrait graduellement à sa condition originaire, celle de ne dépendre ni de forme, ni de pensée. D’ailleurs, cette idée du „manque de la tête” est fréquemment utilisée comme métaphore spirituelle dans les enseignements du système JNANA YOGA, en ADVAITA VEDANTA et dans la tradition Zen.

Celui qui meurt avant de mourir, ne meurt plus après la mort

Donc, CHINNAMASTA (dont la représentation est sans tête) est la Grande Puissance Cosmique qui aide l’aspirant yogi dévoué et sincère de dissoudre son mental (avec toutes les idées, les attachements, les habitudes, les préjugés et les formes pensée qui enchaînement) dans la Pure Conscience Divine, l’aidant à transcender le mental et à fusionner avec l’état supramental (UNMANA) du Vide Divin Béatifique. C’est la raison pour laquelle il ne faut pas ressentir la peur envers la „perte de la tête” ou du temps, parce que, tôt ou tard, la mort achève le „grand passage”, bien que l’homme commun désire cela ou pas. En fait, la seule voie vers l’éveil spirituel est le soi dit „sacrifice du mental”, qui implique la renonciation au mécanisme compliqué des pensées d’attachement et de possessivité, parmi lesquelles la plus prégnante et la plus puissante est celle qui soutient l’idée que „je suis ce corps”. Dans la tradition spirituelle initiatique, ce sacrifice est symbolisé par l’acte de couper la tête, indiquant ainsi de façon suggestive la séparation du mental du corps, donc la libération de la conscience de la carapace matérielle du corps physique. D’autre part, cela permet, aussi, la libération des énergies subtiles qui sont potentielles dans l’être du pratiquant, des énergies qui monteront et réaliseront la fusion avec les foyers énergétiques divins du Macrocosme.

Mais nous pouvons nous poser la question suivante: pourquoi ce concept doit être nécessairement rendu ainsi dans l’image terrible de la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA, alors qu’il peut être expliqué et analysé en théorie dans des conditions moins „choquantes”? La réponse est que les image visuelles ont un impacte plus puissant et plus dramatique sur le subconscient de l’être humain, déterminant plus vite et avec une plus grande force les modifications de conception et d’action de l’individu et réalisant des brèches plus efficaces vers sa nature essentielle qu’il aurait pu être obtenu par une simple exposition théorique.

Généralement parlant, le mental peut accepter du point de vue principal toute exposition théorique, mais pourtant qu’il évite la réalité de ces enseignements, alors que l’impacte de l’image ne peut être aussi facilement évité, parce que l’image „communique” plus directement avec le cœur spirituel de l’être. La souffrance causée par le sacrifice de l’ego représente pour de très nombreux individus (lorsqu’ils se posent vraiment ce problème) une expérience dure, qu’ils veulent éviter, bien qu’ils reconnaissent sa nécessité fondamentale dans le cadre de l’évolution spirituelle. Ce type d’expérience provoque d’habitude une complète réorientation des énergies de l’être vers des buts profondément spirituels et pour cette raison elle est assimilée, dans la tradition initiatique, ) une „deuxième naissance” de l’aspiration. L’image terrible de CHINNAMASTA („la Déesse sans tête”) est la plus expressive voie pour suggérer la transformation fondamentale de l’être humain, c’est-à-dire celle de renoncer à l’individualité limitée et éphémère de l’ego, pour qu’elle soit résorbée de façon extatique dans la plénitude de la Conscience Universelle de Dieu le Père.

Les représentations iconographiques de la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA la présentent comme portant sa propre tête (qu’elle seule avait coupée) dans la main droite et buvant le sang qui jaillit de la gorge coupée. Pourtant, son visage ne montre pas du tout de la peur, de la souffrance ou de la douleur, au contraire, il rend aussi bien que possible le sentiment béatifique du contentement et de la béatitude. La signification de cet aspect est celle de la joie de la transcendance de la condition corporelle et de la souffrance qui est provoquée par sa perte. En même temps, l’image de CHINNAMASTA représente peut être la plus énergique forme de transformation de la Déesse (SHAKTI), montrant avec éloquence le pouvoir de la transformation en pleine action. Suite à ce fait, la tête coupée n’apparaît pas du tout comme étant sans vie, mais elle „vit” encore plus intensément qu’avant. La conscience n’est pas limitée aux dimensions et aux fonctions du corps, mais elle existe aussi séparément de lui. Seulement une fois libérée de la „cage” du corps, la conscience peut s’exprimer pleinement, en acquérant la liberté et la connaissance divine profonde.

Même si l’idée de transcender la conscience corporelle peut être épouvantable pour certaines personnes, l’idée de rester limités aux étriers en acier de cette conscience corporelle (étant ainsi soumis à l’influence du corps et de la mort) apparaît comme étant encore plus épouvantable. L’individu expérimente une petite fraction du jeu infini de la lumière divine dans la manifestation, plus précisément le fragment qui peut être reflété (le plus souvent de façon tordue) par les capacités limitées de perception de nos sens. Pour cette raison, le plaisir que le corps et ses sens peut offrir est souvent plus réduit que la douleur, la souffrance et la maladie que l’individu ressent au cours de la vie.

De cette perspective, où le yogi se sent pris dans la « cage » des sens et des désirs corporels, la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA apparaît comme étant la Libératrice et la Salvatrice de l’esclavage de la matière grossière. Dans l’extase du bonheur qu’elle expérimente à chaque instant, CHINNAMASTA peut boire tout le sang qui exprime ici les joies et les souffrances, les douleurs et les aspirations de la vie incarnée, absorbant, sublimant et alchimisant instantanément toute l’expérience fragmentée du temps, avec les déceptions et les illusions que cette expérience provoque à l’être humain. Elle réalise cet extraordinaire processus d’absorption et de transformation de ce qui est, en dernière instance, illusoire et éphémère, sans jamais oublier sa nature divine essentielle, qui est la nature immuable et éternelle du Soi Suprême (ATMAN). Bien que la forme sous laquelle elle apparaît soit terrible et terrifiante, pourtant CHINNAMASTA représente l’une des énergies subtiles bénéfiques et profondément transformatrices du Macrocosme, ainsi que du microcosme de l’être humain.

Corrélations entre CHINNAMASTA et d’autres divinités du panthéon tantrique

Il existe une étroite corrélation entre CHINNAMASTA et KALI, dans le sens que la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA représente (dans une certaine perspective) la concrétisation de l’énergie qui est spécifique à KALI et qui est aussi orientée vers la transformation spirituelle de l’aspirant sincère à la perfection. Sous cet aspect, CHINNAMASTA est nommée PRACHANDA CHANDIKA, s’identifiant ainsi à la forme la plus terrible de KALI (qui est CHANDI).

D’autre part, son aspect terrible peut être corrélé aussi avec la Grande Puissance Cosmique TRIPURA BHAIRAVI, CHINNAMASTA étant, de même que BHAIRAVI, une grande lutteuse. Cependant, alors que Bhairavi résonne plus avec les énergies telluriques fondamentales (son abri étant, MULADHARA CHAKRA), CHINNAMASTA est plus en consonance avec les forces subtiles dynamiques de l’air. De ce point de vue, on peut affirmer que Chinnamasta agit avec prédilection en ce qu’on appelle „le monde intermédiaire”, le „monde” (ou plan, niveau de la Création) qui fait la liaison entre le plan transcendant et celui immanent de la manifestation.

Elle représente donc la „foudre” qui unit le Ciel avec la Terre (ce qui dans une analogie significative constitue le mental et le corps de l’être humain), ayant le but fondamental de nous libérer des limites inhérentes à notre condition d’esprits incarnés. Si CHANDI (l’aspect le plus terrible de KALI) détruit les démons et les entités sataniques, l’aspect de PRACHANDA CHANDIKA de CHINNAMASTA détruite aussi le plus important „ennemi” de la spiritualité, qui est l’ego.

D’une autre perspective, CHINNAMASTA est souvent identifiée à INDRANI, qui est la contrepartie féminine du grand dieu védique INDRA, étant ainsi la plus importante déesse des Védas. INDRANI est nommée aussi VAIROCHANI, „Celle très brillante”, „Celle qui irradie avec force”, et aussi DURGA, la déesse terrible qui est décrite de la même manière. Mais comme une particularité, CHINNAMASTA est nommée VAJRA VAIROCHANI, „Celle qui brille avec la foudre dans la main”. Comme on le sait, la foudre représente l’„arme” d’action d’INDRA, lui-même considéré le dieu diamant, personnification de l’illumination spirituelle instantanée.

Elle est l’éclair de l’illumination spirituelle instantanée

En tant que forme ou pouvoir terrible du grand dieu INDRA, CHINNAMASTA représente, d’une certaine manière, l’énergie électrisante de la transformation de nos profondeurs subconscientes (VIDYUT SHAKTI), énergie qui agit à tous les niveaux de la Création. Dans la monde physique matériel, l’énergie électrique (l’électricité) ne représente que l’une des formes effectives de ce colossal pouvoir de transformation de CHINNAMASTA. Au niveau mental, elle agit en tant qu’énergie qui provoque la compréhension correcte de la réalité essentielle, déterminant ainsi l’illumination instantanée de l’aspirant yogi. Comme il a été précisé dans les articles antérieurs, KALI agit de façon générale dans le sens de la transformation spirituelle de l’être humain. Dans le cas de la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA, elle représente la même forme, qui est orientée vers la transformation immédiate, instantanée, de l’aspirant yogi. Par conséquent, CHINNAMASTA constitue, d’une certaine manière, l’éclair brillant de l’intuition spirituelle instantanée et plénière, qui détruit et éloigne définitivement le voile de l’ignorance, ouvrant ainsi la voie vers la libération spirituelle suprême. Cet attribut, de l’illumination instantanée, que CHINNAMASTA manifeste comme une note distinctive de sa terrible „personnalité divine”, représente en fait la capacité de perception directe, la pure vision qui pénètre au-delà de tout voile de l’ignorance et de la perception limitée, révélant l’unicité de la conscience divine infinie qui se trouve au-delà de tout nom et de toute forme.

Elle t’offre la pure vision de la réalité

Par conséquent, la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA est le pouvoir colossal de la vision spirituelle intérieure, qui sacrifie dans le feu terrible de la connaissance pure tous les objets du monde manifesté, inclus le corps de l’être qui réalise cet acte de connaissance parfaite. Pour cette raison, dans la tradition de la spiritualité hindoue on considère que CHINNAMASTA représente ATMA-YAJNA, le sacrifice de Soi, qui se manifeste lorsque l’être humain s’offre avec sincérité et en totalité au Divin, parce qu’on appelle le „sacrifice du mental” (autrement dit, l’abandon de l’individualité, la renonciation à l’ego) pour vivre pleinement dans l’unité de la conscience divine.

Cette caractéristique fondamentale de la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA représente par extrapolation, l’aspect de PRALAYA, de destruction ou de résorption du monde et de la Création entière, que l’Absolu Divin (Dieu le Père) réalise dans Son Cœur Sacré. Métaphoriquement parlant, CHINNAMASTA est la tête qui mâche le corps, étant donc le pouvoir de destruction et de la transformation de la réalité manifestée dans la réalité originaire non manifestée. Dans la tradition spirituelle yogie on affirme que CHINNAMASTA réalise cette remarquable „transformation d’état” de l’être humain par la pénétration du „nœud énergétique subtil” du niveau d’AJNA-CHAKRA, permettant au yogi de simultanément transcender le mental et la conscience de son corps. Cette action spécifique est en même temps une indication directe du fait que la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA représente aussi le flux libre et de l’énergie subtile qui circule par SUSHUMNA NADI, le canal énergétique central de l’être humain. Ainsi CHINNAMASTA est directement corrélée avec l’éveil et l’ascension de la force cosmique gigantesque qui est KUNDALINI SHAKTI, par SUSHUMNA NADI, de la base de la colonne vertébrale (du niveau de MULADHARA CHAKRA) jusqu’au niveau de SAHASRARA, représentant, dans cette hypostase (de l’identification avec l’action terrible de KUNDALINI) la Voie Divine des Dieux védiques (ou VEDAYANA). Cette voie divine se réfère effectivement au mouvement et au déplacement du PRANA (de l’énergie subtile) au long de SUSHUMNA NADI vers le „monde” de la transcendance pure, qui est symbolisé par le Soleil.

La tradition spirituelle yogie affirme que, pour évoluer spirituellement et pour éviter le cumule de KARMA, il est absolument nécessaire que le yogi focalise son attention sur SUSHUMNA NADI, parce que ce NADI est identifié en égale mesure à la réalité du vide transcendent, qui est sans forme. Cette condition peut être atteinte seulement lorsque le yogi acquiert la vision pure et juste sur la réalité fondamentale des choses. Au moment de la mort, la conscience individuelle de ceux qui connaissent ces aspects et qui les ont assidûment pratiqué pendant la vie sort par le sommet du crâne (BRAHMARANDRA), se dissolvant dans la Source Suprême, qui est la Conscience Universelle de Dieu le Père. Si cette connaissance et en même temps habileté d’être focalisé sur le canal énergétique central (SUSHUMNA NADI) n’ pas été acquise jusqu’au moment de la mort, la conscience de l’être humain en question sortira du temps par un autre NADI et s’intégrera ainsi dans un des nombreux mondes de la manifestation, en totale concordance avec son niveau de vibration et d’évolution spirituelle, sans quitter la „roue des incarnations successives” dans la manifestation. Pour cette raison, les yogis avancés adorent pleins de ferveur CHINNAMASTA comme la Déesse Sacrée de la transformation spirituelle fondamentale, qui agit spécialement au niveau du troisième oeil (AJNA CHAKRA) de l’aspirant yogi, déterminant ainsi la transcendance de la vision occultée et commune du monde.

La yogie amoureuse et sans ego

La Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA est aussi considérée YOGA SHAKTI, la terrible force d’action du pouvoir yogi, ce qui a fait en sorte qu’elle soit corrélée et même identifiée à VAJRA YOGINI et à PARA DAKINI (qui est la première et la plus importante DAKINI) de la tradition spirituelle tibétaine, la déesse qui confère à l’adorateur sincère et dévoué de grands pouvoirs paranormaux.

Au niveau de la structure énergétique subtile du yogi, CHINNAMASTA agit avec prédilection en AJNA CHAKRA, signifiant l’ouverture du troisième oeil et, en conséquence, symbolisant la lumière qui confère la perception directe essentielle de la réalité extérieure, qui éloigne l’ignorance inhérente à la dualité. À cause de son association avec le flux PRANIQUE ascendant par SUSHUMNA NADI, CHINNAMASTA est aussi corrélée avec UDANA VAYU, le type d’énergie subtile qui provoque l’ascension de KUNDALINI SHAKTI et la transformation profonde de l’être humain. Pourtant, CHINNAMASTA se manifeste pratiquement à tout niveau de l’être du yogi, lorsqu’il réalise un acte de perception qui transcende la condition commune.

Du point de vue des représentations iconographiques, CHINNAMASTA est présentée sans vêtements (donc ayant le corps nu) et sans tête. Dans ses deux mains elle porte son crâne et un sabre. La tête coupée, dont la langue est bien sortie de la bouche, boit (dans un extatique état de transcendance de la réalité éphémère) le ruisseau principal de sang qui jaillit de sa gorge coupée. Traditionnellement, la tête est portée dans la main droite (on peut rencontrer aussi la représentation où la tête de la déesse se trouve, à son tour, dans un crâne humain), et le sabre dans la main gauche. Son corps est celui d’une fille de 16 ans, portant autour du cou une guirlande d’os humains et une faite de têtes coupées.

CHINNAMASTA porte le cordon sacré autour des hanches, qui est un serpent, ses seins ont la forme des foudres. Elle est parue de nombreuses fleurs et a une seule pierre précieuse qui attachée à un serpent dans la zone du sommet du crâne. La déesse a trois yeux bien ouverts qui émanent beaucoup de lumière. D’un côté et de l’autre, CHINNAMASTA est accompagnée par autres deux déesses, dont les noms sont DAKINI et VARNINI. Elle danse au-dessus des corps enlacés en fusion amoureuse de Dieu de l’Amour (KAMA) et de sa consort (RATI). Dans certaines représentations traditionnelles, cet endroit est pris par KRISHNA et, respectivement, RADHA.

Cette représentation iconographique de la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA de la tradition hindoue est pratiquement identique à celle de la Grande Déesse VAJRA DAKINI de la tradition du bouddhisme tantrique de Tibet.

Le ruisseau central de sang qui jaillit de la gorge coupée de CHINNAMASTA signifie le flux d’énergie subtile de SUSHUMNA NADI, pendant que les ruisseaux de gauche et de droit (qui sont bus par les deux déesse – DAKINI et VARNINI – qui accompagnent CHINNAMASTA) représentent l’énergie subtile qui circule par IDA et PINGALA NADI. Le couple divin, qui se trouve aux pieds de CHINNAMASTA signifie l’intime union entre les énergies de type masculin et les énergies de type féminin de l’être humain.

La tête coupée de CHINNAMASTA représente la conscience libérée des différentes limites du corps et du mental, pendant que ses cheveux en tresses et la foudre et les yeux qui émanent des rayons lumineux puissants signifient la perception directe de la Conscience Absolue de Dieu le Père. D’autre part, le sabre qu’elle porte dans la main gauche représente le pouvoir de discrimination (VIVEKA), et la langue de la déesse signifie le pouvoir colossal du Logos Divin (autrement dit des MANTRAS). Du fait que sa forme est difficile à sculpter, CHINNAMASTA est le plus souvent représentée à travers des dessins ou des peintures.

Pour apprendre ce que tu es, apprends ce que tu n’es pas

Ayant en vue tous les aspects et les significations qui ont été présentées, nous pouvons affirmer que CHINNAMASTA représente la principale force adorée par les adeptes de la voie et du système JNANA YOGA (le yoga de la connaissance de la réalité transcendante) parce qu’elle incarne surtout la condition ou l’état de la vision et de la perception directe, libre, de la Vérité Suprême. D’ailleurs, bon nombre des méthodes de JNANA YOGA sont corrélée à l’adoration de la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA, spécialement la méditation sur le processus de perception ou sur la discrimination entre celui qui voit et ce qui est vu (entre sujet et objet). Cela a pour conséquence directe l’élimination de l’identification de notre naturelle essentielle avec d’autres réalités objectives éphémères (comme le corps, les pensées, les émotions etc). D’autre part, CHINNAMASTA (en tant que YOGIE suprême) aide l’aspirant à la perfection dans toutes ses pratiques yogies, surtout celles qui impliquent l’ascension de KUNDALINI SHAKTI.

La plus directe voie d’adoration pleine de sincérité de CHINNAMASTA est celle par laquelle le processus de la méditation est centré surtout sur le sujet conscient, et l’attention est retirée des objets du milieu environnant. L’idée est que le sujet qui médite ne peut être un objet de la perception du mental. Tout ce qui est connu par le mental comme objet de la perception, incluant l’ego ou l’individualité personnelle, est extérieur à notre vraie nature essentielle. Cette rétraction dans le sujet qui perçoit nous conduit graduellement à la révélation de notre Soi immortel, ATMAN.

Une autre méthode d’adoration de la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA est celle de dissoudre le mental dans l’état suprême de la connaissance directe par la focalisation de l’attention sur la perception, en arrêtant ainsi le flux de la méditation qui est dirigé vers celui qui voit ou celui qui est vu. Cet aspect inédit démontre le fait qu’acquérir la capacité de percevoir tout purement et directement représente en fait la méthode principale d’adoration de CHINNAMASTA. La condition fondamentale pour obtenir cette extraordinaire capacité spirituelle est celle d’être toujours vigilent et de ne plus intégrer la réalité extérieure dans des termes d’espace, de temps, de personne etc.
Essentiellement parlant, nous ne voyons pas vraiment les objets du monde où nous nous trouvons. Celle qui nous confère avec force cette sensation et conviction intérieure (autrement dit, de l’observation des différents objets) est seulement notre perception qui, par l’intermédiaire des pensées que nous avons et qui dénomment différemment ce processus de perception, crée en nous l’illusion de certains objets, êtres, phénomènes différents. Pourtant, dès que le yogi élimine l’identification erronée des perceptions qu’il a avec les objets qui l’entourent (identification qui se manifeste par les pensées), il constatera qu’il n’existe pratiquement rien à part sa conscience. Il comprend alors qu’en réalité, le monde environnant ne représente rien d’autre qu’un modèle kaléidoscopique de ses perception que les pensées séparent dans de nombreuses formes (objets) et noms. Du fait que la perception n’est pas différente de celui qui voit ou celui qui connaît, il suffit qu’elle (la perception) ne soit plus identifiée de façon erronée avec la réalité extérieure objective, pour que la conscience du yogi se résorbe intégralement et instantanément (par la grâce de la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA) dans la conscience suprême de Dieu le Père, de même que les vagues agitées de l’océan se résorbent dans ses profondeurs lorsque l’orange prend fin.

Le YANTRA de la Grande Puissance Cosmique CHINNAMASTA 

Article tiré de la Revue Yoga Magazin, n° 42 et 43

Lisez aussi:
Dieu reflété en 10 miroirs

yogaesoteric
2008

Also available in: Română

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