Comment les fleurs attirent-elles les insectes pollinisateurs ?

Une abeille butinant une fleur, ça peut sembler banal… Mais vous êtes-vous déjà demandé comment font les insectes pour repérer les « bonnes » fleurs à butiner ? Comment les plantes se débrouillent-elles pour que leurs fleurs attirent les pollinisateurs ?

Pollinisation des fleurs par les insectes : l’art de la séduction

La grande majorité des plantes à fleurs sont dépendantes des insectes pour leur reproduction sexuée. Si le vent peut se charger de transporter le pollen chez certaines d’entre elles (pollinisation anémophile), chez les autres, les courants d’air ne suffisent pas (pollen trop lourd, trop collant, peu abondant…) et il faut que ce soient des insectes (pollinisation entomophile) qui, en butinant une fleur après l’autre, dispersent le pollen et permettent la fécondation d’une fleur par le pollen d’une autre fleur de la même espèce, située à une distance plus ou moins grande. Abeilles, bourdons, mouches, guêpes, papillons, cétoines et autres petits scarabées… sont autant d’insectes pollinisateurs.

Mais ces insectes pollinisateurs, encore faut-il les attirer. Car les plantes sont immobiles (et silencieuses) : elles doivent donc déployer des trésors d’ingéniosité pour se faire remarquer de la gent ailée ! Reste donc, comme armes de séduction mises à leur disposition : la couleur, la forme, la taille, et le parfum de leurs fleurs.

 

Abeilles butinant une fleur d’échinacée


Grosse fleur tape-à-l’œil ou multitude de petites fleurettes

Certaines plantes misent sur de grosses fleurs, relativement peu nombreuses, mais très visibles. Pour d’autres, comme chez les Ombellifères ou les Rosacées, c’est le nombre, ou plus exactement, le regroupement qui fait la force : les fleurs sont discrètes, de petite taille, mais regroupées en inflorescence (ombelles comme celles de la fleur de carotte, panicules de la spirée, corymbes de l’aubépine…).

Parfum attirant, nectar nourrissant

Pour attirer les insectes gourmands, rien de tel qu’un parfum ! Les insectes sont très sensibles aux odeurs, grâce aux récepteurs olfactifs situés sur leurs antennes. Les papillons de nuit sont les champions de l’odorat : ils sont capables de repérer une fleur odorante à plusieurs centaines de mètres. C’est d’ailleurs sur le parfum, plus que sur l’aspect, que jouent les espèces végétales à floraison nocturne ou dont les fleurs restent épanouies la nuit afin d’être pollinisées par des insectes nocturnes, comme le jasmin, le chèvrefeuille, le tabac ou la belle de nuit.

Mais le parfum joue aussi son rôle durant la journée : les insectes apprennent à reconnaître le parfum de chaque fleur (constitué d’une association de plusieurs molécules odorantes, qui rend chacun unique), et l’associent à la présence de nectar, de pollen ou de cires odorantes, dont ces insectes se nourrissent. Parmi les fleurs nectarifères les plus parfumées, citons le faux-acacia (robinier), le buddléia ou encore le tilleul… Cependant, les fleurs nectarifères ne sont pas forcément parfumées !

 

Fleurs de robinier (faux acacia) – Robinia pseudoacacia


(beautifulcataya)


Délicieuses effluves de pourriture…

A noter que ce ne sont pas que les odeurs fruitées, sucrées, fleuries, en un mot, agréables pour les humains, qui attirent les insectes. Chaque insecte est attiré par l’odeur de ce dont il se nourrit habituellement et où il est susceptible de pondre. Ainsi, certains arums émettent une odeur de viande avariée, afin d’attirer les insectes saprophages (=qui se nourrissent de matière en décomposition), par exemple les mouches à viande.

Fleurs ultraviolettes aux yeux des insectes

Dans un environnement vert chlorophylle, les fleurs se détachent visuellement… pour l’oeil d’humain, mais aussi pour les yeux des insectes ! Ils ne voient cependant pas les couleurs de la même manière que les humains. Leur oeil est capable, pour beaucoup d’entre eux, de ne voir que 3 couleurs : le jaune, le violet/bleu, et l’ultraviolet (et éventuellement le proche infrarouge pour certains insectes). Ce n’est donc pas un hasard si bon nombre de fleurs sauvages sont jaunes (boutons d’or, pissenlit, épervière, molène, lotier, chrysanthème des moissons, coucou…) ou bleues (bleuet, chicorée, bugle, sauge, centaurée, vipérine, véronique…).

 

Fleurs sauvages


Plus étonnant, les insectes voient sur les fleurs des motifs, des stries, des taches que les humains ne voient pas, car elles sont « ultra-violettes » (l’oeil des insectes voit les ultra-violets, le leur non !) … Ces taches et ces lignes, situées au centre de la fleur, tout près des étamines et du pistil, servent de guide aux insectes pour « atterrir » sur la fleur au plus près des nectaires. Avez-vous déjà remarqué qu’abeilles et bourdons se posent presque à coup sûr au centre de la fleur à butiner ? C’est grâce à ces guides visuels… Une tache sombre (ultraviolette) au centre d’une fleur est ainsi pour eux synonyme d’un bon repas : une fleur présentant ce type de « guide à nectar » aura de meilleures chances d’être visitée par un insecte qu’une fleur ne présentant pas cette tache centrale sombre.

 

Hémérocalle jaune : spectre visible (à g), ultraviolet (à g.)

Quand les plantes dupent les insectes

En émettant des odeurs attractives pour les pollinisateurs, les plantes attirent les insectes, mais les attentes de ceux-ci ne sont pas toujours satisfaites ! Une plante délicieusement parfumée peut ne pas offrir de nectar, et l’odeur peut n’être qu’un leurre : le fumet est là, mais… le restaurant est vide.

Certaines fleurs poussent l’ingéniosité jusqu’à reproduire des odeurs imitant les phéromones des insectes femelles, afin d’attirer les mâles. C’est notamment le cas chez l’orchidée-abeille, Ophrys apifera, pollinisée par une abeille solitaire attirée par des phéromones. Cerise sur le gâteau, chez cette orchidée, comme le label de la fleur ressemble à l’abeille femelle, l’abeille mâle est leurrée et se lance dans une pseudo-copulation, pendant laquelle le pollen de l’orchidée se dépose sur lui. L’insecte, déçu, n’a plus qu’à aller tenter sa chance sur une autre fleur d’Ophrys, qu’il pollinisera grâce au pollen ainsi collecté à son insu…

 

Fleur d’orchidée Ophrys apifera

Parfois, l’insecte est même un peu malmené : non seulement il est induit en erreur, mais en plus, la plante le retient prisonnier ! Reprenons le cas de l’arum titan : les insectes (mouches et petits coléoptères), attirés par l’odeur nauséabonde, pénètrent naïvement dans la fleur : ils ne peuvent le faire que lorsque celle-ci est en phase femelle. Ils transportent avec eux du pollen récolté sur d’autres fleurs d’arum et pollinisent ainsi leur hôte. Mais une fois à l’intérieur de la fleur, ils ne peuvent plus sortir tant que la phase femelle n’est pas achevée (c’est l’affaire de 12 ou 24h) : à ce moment-là, la fleur commence sa phase mâle et libère du pollen. Les insectes se chargent de pollen, peuvent enfin s’échapper de leur piège, et vont polliniser une autre fleur d’arum…
 

yogaesoteric

11 juillet 2019

Also available in: Română

Leave A Reply

Your email address will not be published.

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

This website uses cookies to improve your experience. We'll assume you're ok with this, but you can opt-out if you wish. Accept Read More