La perception mystique des sons et de l’hyperespace

En absence de l’ego, au moment sacré du silence qui est vécu devant le mystère profond de l’être, nous avons accès à la perception mystique des sons et de l’hyperespace

 
de Gregorian Bivolaru
 

Au cours de la vie spirituelle, notre art d’écouter, de voir, de percevoir et de sentir se modifie avec l’élévation du niveau de notre conscience individuelle. Cela apparaît tant les enseignements de la sagesse antique, que des théories scientifiques modernes les plus avancées. L’audition mystique des sons et la vision intérieure de l’hyperespace sont bien différents de l’audition et la vue commune. Elles sont beaucoup plus complètes, plus vives, surtout parce qu’elles dépassent les limites des perceptions sensorielles communes. Elles englobent des couches subtile énergétiques du Macrocosme et de l’être humain qui échappent, d’habitude, aux organes des sens physiques.
 
Les aspects subtils du Macrocosme sont aussi réels que ceux que nous percevons d’habitude dans le monde physique. Au début du III-e millénaire, les sciences avancées (par exemple, la physique de David Bohm) reconnaissent elles aussi ce que les sages de l’Orient ont soutenu depuis des milliers d’années. Il s’agit du fait que le Macrocosme est multidimensionnel. Une partie réduite du Macrocosme est représentée par notre univers physique. Le lauréat du prix Nobel, Abdous Salam, postule lui aussi l’existence d’un univers qui englobe simultanément sept ou neuf dimensions. Le monde physique n’est qu’une coquille de quelques millimètres, situé à la surface du grand arbre de la vie universelle, dont les profondeurs sont insondables par les moyens de la physique commune.
 
La perception mystique des sons et la vision intérieure de l’hyperespace impliquent avant tout le fonctionnement et l’unification harmonieux de tous les niveaux énergétiques et de toutes les dimensions subtiles de la structure complète de l’être humain. Limiter cette structure complexe à un seul ensemble physico-chimique et assimiler la conscience à des simples réactions moléculaires est extrêmement simpliste, limité et irréel.
 
Tel que le physicien David Bohm, de l’Université de Berkeley, le déclarait aussi, la conscience et l’intelligence sont, en fait, antérieures au cerveau, et le cerveau est en réalité la structure physique qui permet la manifestation et l’expression de celles-ci dans le plan physique. Cette opinion est de plus en plus partagée par d’autres savants, comme le lauréat du prix Nobel, John Eccles et le savant R. Sperry, deux des spécialistes en neurophysiologie du cerveau.
 

La science moderne et la spiritualité millénaire ont la même vision unitaire

 

La plupart des traditions spirituelles parlent depuis des milliers d’années de l’existence d’un univers (Macrocosme) pluridimensionnel qui est formé de niveaux différents d’énergie qui ont des fréquences prédominantes de vibration. Ceux-ci se divisent en plusieurs couches qui s’interpénètrent et interagissent. Chaque couche a ses lois spécifiques, qui sont souvent différentes de celles qui nous sont connues. Les niveaux périphériques qui sont proches du monde matériel constituent le niveau psychique. Ils sont en général caractérisés par des énergies, des formes, des couleurs et des sons spécifiques.
 
Les niveaux profonds de l’existence, autrement dit, les plus élevés, sont entièrement libérés tant par les conditionnements espace-temps, que par les limites qui sont imposées par l’existence de la forme. Pour cette raison ils sortent de la sphère des possibilités communes de représentation mentale ou verbale.
 
L’Essence Divine Suprême d’où proviennent en réalité toutes les choses et tous les êtres a été nommée par les sages yogis „Pure existence – Pure Conscience – Pure Béatitude”, (Sat-Chit-Ananda).
 
Le célèbre physicien David Bohm et le chercheur R. Weber sont déjà arrivés à une conclusion inhabituelle pour la science, mais qui est reconnue par les mystiques: l’essence ultime du Macrocosme est une infinie énergie de l’amour et un champ de conscience englobant tout, infini. Nous nous trouvons ici dans le „Cœur de l’univers”, qui correspond à la „base unique du monde” qui est évoquée dans les textes bouddhistes.
Cela correspond à Brahman ou Dieu de la sagesse antique indienne. Le terme Brahman provient de la racine sanskrite „Brih”, qui signifie création. Les physiciens gnostiques de la science contemporaine considèrent qu’à ce niveau ultime se trouve „un champ de création pure” qui est intimement lié à la Conscience Infinie et Toute Puissante.
 

Le son mystérieux primordial retentit dans le cœur de l’univers

 
De ces profondeurs lumineuses jaillit sans arrêt le Son des Sons, le Son mystérieux primordial, qui englobe et détermine tous les autres. C’est le Son énigmatique qui peut être entendu par ceux qui, en dépassant le vacarme des sons communs, physiques ou psychiques, arrivent au silence intérieur. En mourant face à nous-mêmes en tant qu’être égotiques et limités, nous arrivons ainsi à la vision ineffable d’un hyperespace mystérieux et infini. Là apparaît, en permanence renouvelé, le Son primordial dont l’audition permet à notre nouvel être, qui est ainsi profondément spiritualisé, de vivre la béatitude de la plus importante renaissance, la renaissance dans la Vérité Suprême.
 

Le son mystérieux primordial est toujours présent. Il est toujours „ici et maintenant”. Mais on ne l’entend pas seulement à l’aide des oreilles. Il est toujours la source claire, perpétuellement nouvelle, de tout ce qui existe, de l’infiniment petit, jusqu’à l’infiniment grand des galaxies lointaines et des mondes subtils. Si nous sommes attentifs et suffisamment préparés spirituellement, nous pourrons écouter sa chanson, qui est sans arrêt présente dans toutes les choses, dans le tas de sable, dans l’arbre séculaire, dans la belle rose, dans le brin d’herbe, dans la goutte de rosée, dans la transparence de l’espace, dans les profondeurs mystérieuses de notre âme.
 
Le son mystérieux primordial est caractérisé par une vibration intérieure acausale et atemporelle. Il est une vibration fondamentale de tout ce qui existe, de la vie et de la mort. Pour cette raison, il ressemble à un mystérieux Oiseau Phœnix qui renaît toujours.
 
Le son mystérieux primordial n’est pas seulement un son. Il englobe en sa réalité beaucoup plus. La lumière intérieure de ce Son mystérieux se révèle à nous par la perception intérieure supra mentale. À ce niveau, nous découvrons extasiés que l’ouïe et la vue ne sont plus séparés. À ce niveau profond, le temps et l’espace ne sont plus du tout dissociés. Sans l’intervention de la fragmentation arbitraire qui est due aux sens humains communs, le temps et l’espace existent dans l’unité fondamentale d’un continuum parfaitement homogène. Il serait inexact de présenter le temps et l’espace comme faisant partie d’un continuum. Ils sont un continuum. De façon similaire, nos capacités affectives et intellectuelles sont séparées seulement aux niveaux superficiels, grossiers, elles sont en fait, unifiées aux niveaux supérieurs. L’unification de nos perceptions sensorielles peut se réaliser à chaque instant. Tout moment peut être pour nous une chance heureuse pour l’atteinte de l’état de béatitude, qui se révèle à nous lorsque nous vivons intensément cette unification.
La nature de la circonstance n’a pas du tout de l’importance. Elle peut être la chute d’une pierre, le chant d’un oiseau, la beauté du soleil au coucher, le bruit d’une tonnerre, l’amour comblant et sincère. Tel qu’un sage taoïste le disait: „Les cerisiers fleurissent chaque printemps, mais ce printemps je les ai vu et ainsi j’ai atteint l’illumination”.
 

L’éveil spirituel se passe toujours „ici et maintenant”

 

L’élément le plus important qui produit le déclic de l’éveil spirituel consiste dans la capacité de vivre avec frénésie et vraiment « à présent », le raffinement de la sensibilité subtile et, au-dessus de tout, le dépassement des limites communes de notre conscience égoïste. Cet état paradisiaque résulte alors d’un équilibre naturel, harmonieux, entre nos énergies affectives et intellectuelles. Cet état unitaire entre „pensée et sentiment” transcende l’état commun de fragmentation psychique.
 
L’absence de cette fragmentation nous confère une acuité particulière. Lorsque Beethoven disait que „l’audition musicale peut faire jaillir le feu de l’esprit” il parlait de l’intensité de ces états. Lors de l’audition et de la vision intérieure, tous nos sens s’unifient. Ils s’intègrent dans une perception globale présente, mystérieuse et très intense. Les messages ordinaires que les sens communs nous transmettent sont perçus au niveau physique, mais ce niveau n’est pas exclusif. Il est complété et dépassé par certaines couches beaucoup plus profondes de notre être. Cela se réalise dans la lumière d’une supra conscience fondamentale. En contrastant la richesse de la supra conscience, le langage verbal nous apparaît comme étant incomplet, pauvre et superficiel. Souvent, les formes du langage verbal sont des obstacles dans la voie de l’audition du Son mystérieux primordial.
 
À un niveau spirituel profond, les éléments communs du langage et de la conceptualisation sont dépassés. Le langage suprême est un contact direct, un état spirituel ample, profond et ineffable dont l’intensité nous confère une brillance qui éclipse les identifications exclusives avec les apparences matérielles.
 
Les mots et les images sont, jusqu’à un certain niveau, des aides indispensables qui confèrent de la clarté et de la précision à notre conscience. Mais il vaut la peine de ne pas perdre de vue que c’est une phase provisoire. Elle n’est pas un but en elle-même. Une fois atteinte, elle doit être dépassée. L’itinéraire de notre évolution intérieure est beaucoup plus vaste. Il englobe des transformations constantes que nous devons assumer. Parmi celles-ci se trouve aussi la nécessité de la transcendance des noms et des formes. Les éléments qui ont été une aide jusqu’à un certain moment et faute desquels ni l’univers, ni nous mêmes n’existait nous apparaissent maintenant comme une prison. Cet aspect a été souligné ainsi par le grand yogi Sri Aurobindo: „ Il apparaît un moment où nous constatons que nous n’avons plus besoin de supports. Parce que, dans un certain sens, „nous” ne sommes plus ici. La base ultime (l’essence) de notre être occupe en même temps la place principale que, naturellement, elle doit occuper”.
 

Toutes les perceptions et les états sont transfigurés

 

La perception mystique de l’hyperespace et du Son mystérieux primordial nous révèle la nature mystérieuse, fondamentale du Macrocosme. Au niveau de la Source d’où il émane, aucun support n’est plus nécessaire. Lorsque nous entendons le Son mystérieux primordial, notre personnalité disparaît instantanément. En fait, paradoxalement, alors, le dépassement de la personnalité ne détermine pas l’état d’inconscience. Au contraire: en absence de l’ego, la Vérité Suprême et la Lumière spirituelle se à nous révèle spontanément.
 
Dans un dialogue intéressant avec le physicien David Bohm, le professeur Renée Weber déclarait que „le dépassement de l’ego est un facteur nécessaire pour la santé biologique et psychique “. L’audition mystique des sons a été à un moment donné le sujet d’un dialogue entre le grand sage Krishnamurti et P.Jayakar.
 
Étant demandé: „ Qu’est-ce que le son pour vous?”,  Krishnamurti avait répondu: „Vous entendez le son des vagues, le son d’un vent puissant, la voix d’une personne avec laquelle vous avez vécu plusieurs années et vous vous êtes habitués à tous ces sons. Si vous ne les écoutez plus tel que vous le faites d’habitude, le son reçoit alors une signification extraordinaire. Alors vous écoutez tous les sons à nouveau… Pourrais-je écouter sans être distrait par les mots ? Alors mon audition sera complète…”
 
Au cours de l’audition parfaite, l’observateur et l’observé, l’auditeur et l’audité, le spectateur et le spectacle existent dans un plan secondaire par rapport à la présence ineffable d’une Plénitude intérieure béatifique qui les englobe et les domine.
 
À travers l’enchantement et l’extase se à nous révèle instantanément le miracle du Son mystérieux primordial. Celui-ci retentit en éternité dans le cœur de tous les niveaux énergétiques et dans toutes les dimensions qu’il pénètre sans arrêt simultanément.
 
Durant l’audition mystique du son, les niveaux physiques et psychiques de l’oreille perçoivent, au-delà des ondes sonores de la matière, la présence mystérieuse d’un monde intérieur qui vibre avec une grande intensité. Quelle que soit la source d’un son, une cloche lointaine, le chant d’un oiseau, une voix humaine ou le moteur d’un avion, toutes ces ondes sonores se profilent sur le fond d’un monde intérieur, extrêmement lumineux. Le monde de la matière est celui qui cristallise les échos du passé.
 

La matière même n’est que l’ensemble des échos résiduels du Son mystérieux primordial

 
Au cours de l’audition parfaite, les molécules de l’air qui servent comme support aux ondes sonores jusqu’à ce que celles-ci arrivent à être écoutées, sont instantanément transfigurées. Elles nous amènent ce qu’est la présence ultime du Son mystérieux primordial. Finalement, le cerveau qui reçoit le message sonore initial et notre corps même sont imprégnés et „baignés” par les énergies spirituelles.
 
L’espace reçoit pour nous alors une signification tout à fait différente. Notre perception de l’espace se transforme comme par miracle. Il n’est plus mesuré par la distance qui sépare les êtres et les choses. Lorsque notre regard s’oriente vers le ciel bleu, ce n’est plus un spectacle extérieur uniforme, inerte et sans profondeur. L’énergie cachée de l’espace devient soudain notre nature: la nature spirituelle omniprésente, qui pénètre tout, car le Son mystérieux primordial nous conduit dans les profondeurs ineffables du Soi Immortel (Atman). L’espace se transfigure alors pour nous dans la lumière claire, vive, car le Son mystérieux primordial est en nous, ainsi que dans l’espace, la Source des Sources.
 
À ce moment ce révèle en nous un nouveau sens du toucher. Une nouvelle faculté tactile nous permet ainsi de devenir sensibles à la haute concentration d’énergie des dimensions spirituelles de l’espace.
 
Cela nous conduit soudain à la révélation inattendue et explosive d’une communion intégratrice avec tout ce qui existe. Là tout est lumière, mystère, extase, conscience infinie et amour. La conscience cosmique et la lumière intérieure se révèlent à nous ainsi en leur priorité absolue, en étant antérieures par rapport au monde des apparences extérieures.
 
À la lumière de l’audition parfaite des sons et de la vision de l’hyperespace, les contrastes qui existent entre l’opacité des objets matériels et les espaces qui les séparent, apparaissent de leur opposition tranchante. Mais ils s’effacent devant une réalité beaucoup plus vivante et plus substantielle de laquelle ils émanent et aux profondeurs de laquelle vibrent les premiers échos du Son mystérieux primordial.
 
Suite à cette expérience, souvent, tous les sons qui s’offrent à notre audition apparaissent comme autant d’appels vers l’état d’attention et l’expérience véritable, dont la gloire nous a été révélée, état dont le grand sage Krishnamurti disait qu’il nous „révèle spontanément l’essence, l’origine de toutes les choses, par rapport à laquelle rien n’existe vraiment”. Ceux qui sont initiés dans le système de Laya-Yoga savent que s’ils réalisent avec conséquence Laya  Yoga avec le Bija Mantra Aum ils réussissent ainsi à percevoir le Son mystérieux primordial.     
                     
 

yogaesoteric
2006

Also available in: Română

Leave A Reply

Your email address will not be published.

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

This website uses cookies to improve your experience. We'll assume you're ok with this, but you can opt-out if you wish. Accept Read More