Maîtrise de la pensée et de l’action par le yoga (I)
Par le professeur de yoga Gregorian Bivolaru
La facilité d’action, qui caractérise notre époque, cache un danger sûr, car elle favorise les gestes impulsifs, précipités dans tous les domaines. Elle conduit à des improvisations superficielles au niveau de l’initiative et nous oblige à prendre des décisions hâtives, souvent irrationnelles, que nous regretterons plus tard.
Dans la conception yogique, l’art de la pensée juste appliquée dans toutes les circonstances de la vie est un chapitre important. Penser, signifie juger de manière appropriée, en faisant appel à la raison pour établir ce que nous croyons être la vérité. De plus, la pensée nous met instantanément en résonnance avec certaines énergies mentales correspondantes dans l’univers, avec lesquelles nous établissons un contact télépathique. Dans le cas du raisonnement, la pensée est celle qui doute, critique, compare et contrôle avant d’affirmer une croyance, une position de jugement, un plan d’action.
La pensée contrôlée par la réflexion ou le bon sens appréhende ce qui est vrai ou faux, juste ou injuste, tandis que la pensée instinctive et hâtive ne se préoccupe que de ce qui est désiré immédiatement, de ce que l’individu aime considérer ou croire sous l’angle de sa propre logique égoïste limitée. Cependant, l’expérience de la vie montre que la logique égoïste tend souvent à plonger l’être humain dans l’erreur dans le cas de l’exercice commun de la pensée, car elle trouve ses racines dans les sensations primaires et les sentiments primitifs de l’individu dominé ou même séduit par un intérêt personnel.
Considérant les choses de ce point de vue, nous ne devrions pas être surpris par ce que les yogis ont dit et répété, à savoir que le plus grand désordre de l’esprit se produit lorsque nous ne voyons pas les choses et les êtres qui nous entourent tels qu’ils sont en réalité, mais tel que nous voulons qu’ils soient. Cette situation résulte du fait que l’activité de réflexion se déroule sous la pression de notre activité mentale instinctive guidée par le besoin inné d’explication et de certitude. En règle générale, le jugement se termine par l’affirmation d’une conviction, ce qui implique un engagement à agir conformément aux conclusions auxquelles la réflexion nous a conduites. Cependant, une partie importante des croyances affirmées par l’être humain, ne résulte pas du tout du libre exercice de la capacité de réflexion, mais provient de la crédulité, forme de pensée inférieure, qui nous fait considérer comme vraie, n’importe quelle mentalité ou opinion exprimée par la parole ou l’écriture, sans la discuter ni la comprendre profondément.
Ainsi, nous adoptons soudainement certaines opinions ou remarques car c’est agréable, commode et pratique de le faire sous la pression d’un désir subconscient, sans que la pensée réflexive y participe; et aussi parce que les influences télépathiques conjuguées de l’environnement dans lequel nous nous trouvons, nous incitent à partager une opinion unanimement acceptée par le groupe social auquel nous appartenons.
Les résultats de la magie publicitaire et l’analyse du comportement de grands groupes humains attestent que la plupart des êtres humains croient en toute sincérité en ce qu’ils veulent, ce que d’autres veulent croire ou ce que leur environnement social croit et affirme fermement. Leur manque évident d’esprit critique ou d’indépendance de caractère et de liberté intérieure les rendent incapables d’adopter des idées contraires à l’opinion commune ou de vérifier l’exactitude des opinions qui leur sont suggérées, inspirées ou imposées.
Le yogi, en sa qualité d’être humain rationnel, contrôle lucidement et pèse ses propos, puis il formule son idée et s’arrête ici, en restant lucide et ouvert quant à la possibilité de changer d’avis à l’avenir. L’homme impulsif est animé par une idée soudaine ou un désir fugace auquel il est très attaché pour le moment, la rejetant parfois même le lendemain pour adopter une attitude inverse.
Des personnes aussi différentes ne peuvent jamais se comprendre car l’homme rationnel, calme et pondéré s’attache à des jugements rationnels et clairs qui ont été confrontés à la réalité; tandis que l’impulsif instable dans ses idées et sa conduite, changeant d’un jour à l’autre, n’écoute que ses caprices ou ses fantasmes délirants et commet des erreurs fatales à la fois dans la pensée et dans l’action.
Dans la conception yogique, la principale cause d’erreur dans la pensée réside dans la passion générée par un désir violent, fondé sur l’égoïsme, un désir impulsif, plus ou moins caché et qui assombrit le juste jugement. Alors, une certaine chose sera affirmée ou une certaine ligne d’action sera adoptée, car dans les profondeurs instinctives de l’être, nous désirons vivement réussir, misant déjà sur la satisfaction personnelle et croyant que cette chose est vraie ; nous chercherons ainsi à ce que l’événement souhaité se produise.
Cette logique égoïste, que tant de gens pratiquent sans le savoir, fait que nous ne sommes pas honnêtes avec nous-mêmes. Nous écartons les objections qui résultent inévitablement de cette manière de penser dès que nous les remarquons, ou même négligeons de les prendre en compte car nous supposons que leur étude serait désagréable.
La pensée peut également être fausse en soi, soit par manque de connaissance, d’expérience ou de méthode, soit en raison de la tendance à réduire l’inconnu ou le mystère à une hypothèse connue, sans que l’on puisse déterminer si l’analogie de situation sur laquelle nous nous appuyons correspond ou pas à la réalité.
Dans la conception yogique, avec l’art de la pensée juste, il est nécessaire d’apprendre aussi l’art de décider et d’agir, car même si nous disposons parfois de moyens de contrôle suffisants, nous risquons d’être trompés par les apparences en l’absence d’une attention soutenue, à cause de l’impatience à relaxer la tension mentale nécessaire au contrôle, et d’arriver vite à une certaine conclusion.
Le passage de l’idée à l’action
Dans la conception yogique, pour agir efficacement, il est nécessaire de passer de la réflexion au mouvement, de l’idée à l’action, en manipulant -analogiquement parlant-, un par un, l’accélérateur et le frein.
Le frein est la force d’arrêt qui nous permet de voir clairement en nous et autour de nous, d’examiner la situation et de recourir aux mesures qui doivent être prises pour faire face aux différentes situations.
L’accélérateur est le sentiment vivant qui fournit l’énergie émotionnelle nécessaire pour guider la volonté vers l’accomplissement de l’action.
Entre le frein et l’accélérateur intervient la décision, ou en d’autres termes, la résolution ferme d’agir dans un certain sens, qui déterminera la force des raisons ou la puissance des motifs, qui sont délibérément mises en avant.
L’homme normal prend des décisions en fonction de ses jugements approfondis ou de ses raisons bien pesées, entre lesquelles il arbitre. Cette décision implique une discrimination, une évaluation, une estimation qui nous incite à nous prononcer pour ou contre une opinion, un plan, une tactique ou, en d’autres termes, d’agir après un jugement rapide et motivé.
La décision est le verdict de la pensée consciente, qui peut être stimulée par l’entraînement d’une activité mentale réflexe conformément aux habitudes créées. Après la décision, phase statique, nous passons à l’action, à la manifestation, à l’exploitation et au fonctionnement de ce qui a été décidé. En ce sens, nous faisons appel au dynamisme créatif de l’imagination, évoquant le plaisir attendu, la sécurité acquise, ou tout résultat susceptible de déclencher les mécanismes psychosomatiques qui traduiront en faits ce qui a été décidé en principe.
La pensée sollicite l’action de toute personne ayant formé des réflexes, qui ont ensuite été cristallisés et classés pour constituer de véritables chaînes d’automatismes associés qui, face à de nouvelles circonstances, sont intelligemment utilisés par le sujet pour élaborer ses propres plans.
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yogaesoteric
23 janvier 2020
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