Une proposition de Biden pourrait faire des États-Unis une « dictature numérique » (1)

par Whitney Webb

Une « nouvelle » proposition de l’administration Biden visant à créer une agence fédérale axée sur la santé sur le modèle de la DARPA n’est pas ce qu’elle semble être. Présentée comme un moyen de « mettre fin au cancer », cette « DARPA de la santé » ressuscitée cache un programme dangereux.

Le 28 avril 2021, le président Biden a été largement salué par les médias grand public et les médias spécialisés dans les soins de santé pour son appel à la création d’une « nouvelle agence de recherche biomédicale » sur le modèle de l’Agence pour les Projets de Recherche avancée de Défense de l’armée américaine, ou DARPA. Selon le président, cette agence chercherait à mettre au point des traitements « innovants » et « révolutionnaires » contre le cancer, la maladie d’Alzheimer et le diabète, avec pour objectif de « mettre fin au cancer tel que nous le connaissons ».

Loin de « mettre fin au cancer » comme la plupart des Américains pourraient l’imaginer, l’agence proposée fusionnerait la « sécurité nationale » avec la « sécurité sanitaire » de manière à utiliser les « signes d’alerte » de la santé physique et mentale pour prévenir les épidémies ou la violence avant qu’elles ne se produisent. Un tel système est une recette pour une organisation technocratique « pré-crime » ayant le potentiel de criminaliser les maladies mentales et physiques ainsi que les « mauvaises pensées ».

L’administration Biden a demandé au Congrès 6,5 milliards de dollars pour financer l’agence, qui serait largement guidée par le principal conseiller scientifique de Biden, Eric Lander. Lander, qui dirigeait auparavant le Broad Institute, un institut dominé par la Silicon Valley, a été controversé pour ses liens avec l’eugéniste et trafiquant sexuel d’enfants Jeffrey Epstein et pour son éloge relativement récent de James Watson, un eugéniste ouvertement raciste. Malgré cela, Lander devrait être confirmé par le Sénat et le Congrès et serait très enthousiaste à l’égard de la nouvelle « DARPA de la santé » proposée.

Cette nouvelle agence, qui devrait s’appeler ARPA-H ou HARPA, serait hébergée au sein des National Institutes of Health (NIH) et porterait le budget des NIH à plus de 51 milliards de dollars. Contrairement aux autres agences des NIH, l’ARPA-H se distinguerait par le fait que les projets qu’elle finance ne feraient pas l’objet d’un examen par les pairs avant d’être approuvés ; au lieu de cela, des gestionnaires de programme triés sur le volet prendraient toutes les décisions de financement. Le financement prendrait également la forme de paiements échelonnés au lieu des subventions pluriannuelles plus traditionnelles.

Il est probable que l’ARPA-H financera largement les vaccins à ARNm et en fera la promotion comme l’une des « percées » qui permettront de guérir le cancer. Certains des fabricants de vaccins à ARNm qui ont produit certains des vaccins contre le covid-19 les plus utilisés, tels que le vaccin Pfizer/BioNTech, ont déclaré le mois dernier que « le cancer est le prochain problème à résoudre avec la technologie ARNm » après la covid. BioNTech développe depuis des années des thérapies géniques à base d’ARNm pour le cancer et collabore avec la Fondation Bill et Melinda Gates pour créer des traitements à base d’ARNm pour la tuberculose et le VIH.

D’autres technologies « innovantes » qui feront l’objet d’une attention particulière de la part de cette agence sont moins connues du public et sans doute plus préoccupantes.

Le long chemin vers l’ARPA-H

L’ARPA-H n’est pas une idée nouvelle et exclusive de l’administration Biden ; il y a eu une précédente tentative de créer une « DARPA de la santé » pendant l’administration Trump, fin 2019. Biden a commencé à promouvoir l’idée pendant sa campagne présidentielle dès juin 2019, bien qu’en utilisant une justification très différente pour l’agence que celle qui avait été présentée par ses défenseurs à Trump. En 2019, la même fondation et les mêmes personnes qui soutiennent actuellement l’ARPA-H de Biden avaient exhorté le président de l’époque, Trump, à créer la « HARPA », non pas dans le but principal de rechercher des traitements contre le cancer et la maladie d’Alzheimer, mais pour arrêter les fusillades de masse avant qu’elles ne se produisent grâce au suivi des Américains pour détecter des signes d’alerte « neuropsychiatriques ».

Depuis quelques années, un homme est la force motrice de la HARPA – Robert Wright, ancien vice-président de General Electric et ancien président de NBCUniversal. Par l’intermédiaire de la Fondation Suzanne Wright (du nom de sa défunte épouse), Wright a passé des années à faire pression en faveur d’une agence qui « développerait des capacités biomédicales – outils de détection, traitements, dispositifs médicaux, cures, etc. – pour les millions d’Américains qui ne bénéficient pas du système actuel ». Bien qu’il ait, comme Biden, occulté l’objectif réel de l’agence en affirmant qu’elle serait principalement axée sur le traitement du cancer, la proposition de 2019 de Wright à son ami personnel Donald Trump a révélé ses ambitions sous-jacentes.

Tel que proposé pour la première fois par Wright en 2019, le programme phare de la HARPA serait SAFE HOME, abréviation de Stopping Aberrant Fatal Events by Helping Overcome Mental Extremes (Stopper les accidents mortels aberrants en aidant à surmonter les extrêmes mentaux). SAFE HOME aspirerait des masses de données privées provenant de « Apple Watches, Fitbits, Amazon Echo et Google Home » et d’autres appareils électroniques grand public, ainsi que des informations provenant de prestataires de soins de santé, afin de déterminer si un individu pourrait être susceptible de commettre un crime. Les données seraient analysées par des algorithmes basés sur l’intelligence artificielle (IA) « pour un diagnostic précoce de la violence neuropsychiatrique ».

L’approche pré-crime du Département de la Justice, connue sous le nom de DEEP, a été initiée quelques mois avant que Trump ne quitte ses fonctions ; elle a également été justifiée comme un moyen « d’empêcher les fusillades de masse avant qu’elles ne se produisent ». Peu après l’investiture de Biden, la nouvelle administration a commencé à utiliser les informations provenant des médias sociaux pour procéder à des arrestations pré-crime dans le cadre de son approche de la lutte contre le « terrorisme intérieur ». Compte tenu de la collaboration passée des entreprises de la Silicon Valley avec le gouvernement en matière de surveillance sans mandat, il semble que certains aspects de SAFE HOME soient déjà secrètement actifs sous Biden, n’attendant que la formalisation de l’ARPA-H/HARPA pour être légitimés en tant que politique publique.

Les applications de sécurité nationale de la HARPA de Robert Wright sont également illustrées par l’homme qui était son principal conseiller scientifique, l’ancien chef du Biological Technologies Office (BTO) de la DARPA, Geoffrey Ling. Non seulement Ling est le principal conseiller scientifique de la HARPA, mais la proposition originale de Wright prévoyait que Ling conçoive personnellement la HARPA et la dirige une fois qu’elle serait établie. Le travail de Ling à la DARPA peut être résumé par la mission déclarée du BTO, qui consiste à œuvrer à la fusion de « la biologie, de l’ingénierie et de l’informatique afin d’exploiter la puissance des systèmes naturels pour la sécurité nationale ». Les technologies privilégiées par le BTO sont également appelées à devenir les piliers de la HARPA, qui prévoit d’utiliser spécifiquement « les progrès de la biotechnologie, des superordinateurs, du big data et de l’intelligence artificielle » pour atteindre ses objectifs.

Le lien direct entre la DARPA et la HARPA souligne que les objectifs de cette nouvelle agence remontent au projet de biosurveillance du programme Total Information Awareness (TIA) de la DARPA, qui a été lancé après les événements du 11 septembre 2001. Le projet de biosurveillance de TIA visait à développer « les technologies de l’information nécessaires et le prototype résultant capable de détecter la diffusion secrète d’un agent pathogène biologique automatiquement et beaucoup plus tôt que les approches traditionnelles », en surveillant « des sources de données non traditionnelles », notamment des « données médicales de pré-diagnostic » et des « indicateurs comportementaux ».

Bien que nominalement axé sur les « attaques bioterroristes », le projet Bio-Surveillance de TIA visait également à acquérir des capacités de détection précoce des épidémies « normales ». Le projet Bio-Surveillance et les projets de la DARPA connexes de l’époque, tels que LifeLog, visaient à recueillir des données par l’utilisation massive d’une sorte de technologie portable ou de poche. Ces programmes de la DARPA ont finalement été arrêtés en raison de la controverse suscitée par les allégations selon lesquelles ils seraient utilisés pour profiler les dissidents nationaux et éliminer la vie privée de tous les Américains aux États-Unis.

Le fait que l’ancien réseau de surveillance totale de la DARPA revienne à la vie sous l’égide d’une agence soi-disant distincte, axée sur la santé, et qui imite son modèle organisationnel, confirme que de nombreux programmes liés au programme TIA ont simplement été dissociés du Département de la Défense lorsqu’ils ont été officiellement arrêtés. En séparant l’armée de l’image publique de ces technologies et programmes, on les a rendus plus acceptables pour les masses, bien que l’armée reste fortement impliquée dans les coulisses. Comme l’a récemment rapporté Unlimited Hangout, des aspects majeurs de TIA ont simplement été privatisés, donnant naissance à des entreprises telles que Facebook et Palantir, ce qui a eu pour conséquence que ces projets de la DARPA ont été largement utilisés et acceptés. Aujourd’hui, sous le couvert de l’ARPA-H proposée, le programme TIA original de la DARPA ferait son retour, à toutes fins utiles, en tant que produit dérivé.

La Silicon Valley, l’armée et la « révolution » portable

L’effort le plus récent pour créer l’ARPA-H/HARPA se combine bien avec la poussée coordonnée des entreprises de la Silicon Valley dans le domaine des soins de santé, en particulier les entreprises de la Silicon Valley qui font office de sous-traitants des services de renseignement américains et/ou de l’armée (par exemple, Microsoft, Google et Amazon). Pendant la crise du covid-19, cette tendance à la domination de la Silicon Valley dans le secteur des soins de santé s’est considérablement accélérée en raison d’une poussée vers la numérisation de la télémédecine, la surveillance à distance, etc.

Un exemple intéressant est celui d’Amazon, qui a lancé un dispositif portable en 2020 qui prétend non seulement utiliser la biométrie pour surveiller la santé physique et la forme physique des gens, mais aussi pour suivre leur état émotionnel. En 2020, Amazon a acquis la pharmacie en ligne PillPack, et il n’est pas difficile d’imaginer un scénario dans lequel les données du bracelet bien-être Halo d’Amazon sont utilisées pour proposer des recommandations de traitement qui sont ensuite fournies par PillPack, propriété d’Amazon.

Des entreprises telles qu’Amazon, Palantir et Google devraient être étroitement associées aux activités de l’ARPA-H. En particulier, Google, qui a lancé de nombreuses initiatives dans le domaine de la santé en 2020, devrait jouer un rôle majeur dans cette nouvelle agence en raison de ses liens de longue date avec l’administration Obama, lorsque Biden était vice-président, et avec le principal conseiller scientifique du président Biden, Eric Lander.

Comme nous l’avons mentionné, Lander est prêt à jouer un rôle majeur dans l’ARPA-H/HARPA si et quand celle-ci se concrétise. Avant de devenir le plus important scientifique du pays, Lander était président et directeur fondateur du Broad Institute. Bien que présenté comme un partenariat entre le MIT et Harvard, le Broad Institute est fortement influencé par la Silicon Valley, avec deux anciens dirigeants de Google dans son conseil d’administration, un partenaire de la société de capital-risque Greylock Partners de la Silicon Valley, et l’ancien PDG d’IBM, ainsi que par certaines de ses principales dotations provenant d’éminents dirigeants du secteur technologique.

L’ancien PDG de Google, Eric Schmidt, qui était intimement lié à la campagne de réélection d’Obama en 2012 et qui est proche du Parti démocrate en général, préside le Broad Institute depuis avril 2021. En mars, Schmidt a donné 150 millions de dollars à l’institut pour « connecter la biologie et l’apprentissage automatique pour comprendre les programmes de vie ». Pendant qu’il siégeait au conseil d’administration du Broad Institute, Schmidt a également présidé la Commission de Sécurité nationale sur l’Intelligence artificielle, un groupe composé principalement d’agents de la Silicon Valley, des services de renseignement et de l’armée, qui a désormais défini l’orientation des politiques du gouvernement américain en matière de technologies émergentes et d’IA. L’administration Biden a également proposé à Schmidt de prendre la tête d’un groupe de travail sur l’industrie technologique.

Auparavant, en janvier 2021, le Broad Institute avait annoncé que sa plateforme de recherche sur la santé, Terra, construite avec Verily, une filiale de Google, allait s’associer à Microsoft. En conséquence, Terra permet désormais à Google et à Microsoft d’accéder à une vaste quantité de données génomiques versées sur la plateforme par des universitaires et des instituts de recherche du monde entier.

En outre, en septembre 2020, Google s’est associé au Département de la Défense dans le cadre d’un nouveau programme de « santé prédictive » basé sur l’IA, qui a également des liens avec les services de renseignement américains. Bien qu’initialement axée sur la prévision des cas de cancer, cette initiative prévoit clairement de s’étendre à la prévision de l’apparition d’autres maladies avant l’apparition des symptômes, notamment le covid-19. Comme l’a souligné à l’époque Unlimited Hangout, l’une des arrière-pensées de ce programme, du point de vue de Google, était d’obtenir l’accès au « plus grand dépôt de données médicales liées aux maladies et au cancer au monde », détenu par la Defense Health Agency. L’accès exclusif à ces données est un atout considérable pour Google, qui s’efforce de développer et d’étendre sa gamme croissante de produits pour la santé basés sur l’IA.

Lisez la deuxiéme partie de cet article

 

yogaesoteric
24 mars 2022

 

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