Le cinéma de la Matrice – La science-réalité (3)

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La Quatrième Dimension

The Twilight Zone (La Quatrième Dimension) est une série télévisée américaine en 138 épisodes de 25 minutes et 18 épisodes de 50 minutes créée par Rod Serling, diffusée entre 1959 et 1964. Elle est considérée comme l’un des plus beaux exemples de créativité de la télévision américaine, toujours célébrée des décennies après sa création. Elle se présente comme une anthologie d’histoires fantastiques, étranges, énigmatiques dont le but était de « frapper » le téléspectateur par la chute toujours inattendue, surprenante et singulière de chacune des histoires mises en scène. La plupart des épisodes présentent un ton pessimiste, que l’on peut assimiler à une critique de la société américaine de l’époque comme à un avertissement du futur à venir… Tournée entièrement en noir et blanc (la dualité exacerbée), les histoires utilisent peu d’effets spéciaux, peu de scènes à grand spectacle, peu de violence crue et pas de sexe. Toute la tension est contenue dans l’histoire elle-même, son atmosphère, le rythme de la mise en scène et l’utilisation de la musique.

 

Dans l’accroche originale, The Twilight Zone est qualifiée de fifth dimension, littéralement « cinquième dimension ». En effet, selon la théorie de la relativité développée par Einstein, la quatrième dimension ne désigne que le temps. Or, la « Zone Crépusculaire » (l’invisible) recouvre un concept multidimensionnel plus vaste que le temps lui-même. Cette expression est d’ailleurs utilisée par l’U.S. Air Force pour désigner l’instant précis où un avion est incapable de voir la ligne d’horizon alors qu’il est en phase d’atterrissage. Finalement, pour la nouvelle série diffusée en 1986, le titre La Cinquième Dimension était plus proche de ce que signifie vraiment The Twilight Zone.

En 1965 parait Alphaville, film franco-italien écrit et réalisé par Jean-Luc Godard. Il narre une étrange aventure du célèbre agent secret Lemmy Caution (Eddie Constantine) en mission à Alphaville, une cité déshumanisée, éloignée de quelques années-lumière de la Terre. Il est chargé de neutraliser le professeur von Braun, son tout-puissant maître, qui a aboli les sentiments humains et qui, à partir d’un ordinateur, Alpha 60, régit toute la ville. Le personnage de von Braun est bien évidemment lié au professeur Wernher von Braun (1912/1977), ingénieur allemand qui après avoir servi les nazis (développement des fusées V2) a rejoint les États-Unis (naturalisé américain en 1955) pour jouer un rôle majeur sur le plan des technologies aériennes. Il y a des parallèles avec le film Orphée (1950) de Jean Cocteau, tout particulièrement l’usage de la poésie (les sentiments) pour détruire l’œuvre de Mort, en l’occurrence l’intelligence artificielle Alpha 60. Le conseil d’Orphée à Eurydice est le même que celui de Caution à Natasha (Anna Karina), la fille de von Braun dans Alphaville : ne pas se retourner, sous-entendu une fois l’éveil entrepris ne pas se laisser happer à nouveau par la Matrice cyber …

Fahrenheit 451 est un film d’anticipation franco-britannique de François Truffaut, sorti en 1966, d’après le roman éponyme de Ray Bradbury publié en 1953. Il brosse une société dystopique, totalitaire, où les pompiers brûlent les livres considérés comme subversifs par la société totalitaire où règne en maître l’audiovisuel, et ce pour le « bien » de la population. Des êtres vont résister en apprenant par cœur des livres entiers.

La société déshumanisée décrite montre que de nombreuses valeurs humaines ont disparu : l’amour ; l’intelligence, les gens se contentant de l’opinion officielle et les « gardiens de la vérité » eux-mêmes ne comprenant pas ce qu’ils disent ; la communication, chacun faisant preuve d’un égoïsme forcené. Les gens vivent dans l’immanence et l’indifférence, voulant uniquement agir. Enfin, cette société est probablement redevenue primitive, puisqu’elle pratique le culte de la violence, au nom du bonheur. Elle illustre l’échec d’une société du bonheur, simple illusion, qui sous couvert de le proposer, en profite pour vendre aux gens une foule de produits. De plus, le système profite aussi de leur inconscience pour leur vendre des choses bien plus importantes, comme un président ou une guerre …

Finalement, cette bêtise élevée au rang de manière de vivre finit par se retourner contre la société elle-même. À force de niveler son niveau par le bas, elle devient incapable de faire face à sa propre déliquescence. Le gouvernement ordonne la chasse aux livres, mais ne s’intéresse pas aux hommes-livres, qui en sauvent le contenu. Enfin, si les raisons de la défaite finale ne sont pas clairement expliquées, on les devine aisément : l’intelligence, indispensable à la mise en place de stratégies et à l’innovation technologique, a fait défaut aux militaires. L’émergence d’une telle société n’a été rendue possible que par l’émergence d’une culture de masse, facilitée par la déliquescence du système scolaire : « Le cinéma et la radio, les magazines, les livres sont nivelés par le bas en une vaste soupe ». Les gens se sont désintéressés de la culture et ont préféré faire du sport ou regarder la télévision.

Il va sans dire qu’outre la dénonciation de toutes les formes de censure, le message délivré à travers le couple protagoniste mis en scène est que le masculin électrique, tyrannique et destructeur (Oskar Werner), doit être contrebalancé par le féminin vif et intelligent (Julie Christie), contestant avec douceur la plupart des lois destructrices de la capacité à connaitre et à penser en vigueur. De leur fusion harmonieuse l’être humain peut se libérer.

En 1967 est lancée The Invaders (Les Envahisseurs), une série télévisée américaine en 43 épisodes de 48 minutes créée par Larry Cohen. Elle voit un architecte, David Vincent (interprété par Roy Thinnes), témoin de l’atterrissage d’une soucoupe volante. Depuis cette nuit-là, il n’a de cesse de convaincre ses semblables de combattre ces extraterrestres qui, sous une apparence humaine, infiltrent insidieusement la Terre afin de la coloniser. Le principal intérêt de la série est qu’elle développe parallèlement à l’intrigue une critique sociale pessimiste d’une société en décomposition, que les décors utilisés accentuent (paysages désertiques, usines abandonnées, environnements urbains délabrés). Les relations entre les hommes sont également dégradées : couples en séparation, personnages solitaires ayant plus ou moins raté leur vie professionnelle et à la vie sentimentale au bord de l’abîme… Ajoutées à la solitude du héros dans son combat sans cesse à reprendre, elle imprime dans l’esprit du téléspectateur le plus fort sentiment d’angoisse qui soit.

 

La série montre que les Envahisseurs utilisent notamment les faiblesses psychologiques et morales humaines pour s’insinuer dans le corps social et le pervertir. Sont abordés ainsi de manière plus ou moins explicite les thèmes du contrôle mental, de la génétique et de l’eugénisme, des technologies nazies secrètes, le rôle de l’armée et de la police, les agents secrets, l’instauration du nouvel ordre mondial … Si la série associe habilement à son scénario la peur du communisme qui hante les États-Unis en pleine guerre froide, elle expose de manière crue la dégénérescence en cours de la nature humaine par la Matrice dévoyée. La série s’achève à l’épisode 43, sans qu’elle ait reçu une fin mettant un terme aux aventures de David Vincent. Celui-ci est condamné en quelque sorte à poursuivre pour longtemps encore sa lutte contre les Extraterrestres, jusqu’au rideau final …

Le secret des Envahisseurs

Dans son livre de 2012 « Le Secret des Envahisseurs », l’auteur Peter Knight révèle qu’en 1900, le célèbre scientifique Nikola Tesla affirma qu’il avait capté des signaux de radio venant de l’espace, étant le premier à avancer que les mystérieux échos à retardement d’émissions radio d’Eindhoven en 1928 étaient causés par un dispositif… Il a aussi capté des signaux provenant de la Lune, et avait détecté du côté de Mars des fréquences en émissions envoyées par une intelligence inconnue. La série Les Envahisseurs a été arrêtée le 10 mars 1968 sans explication au bout de deux saisons alors que la troisième allait révéler la planète d’origine de ces envahisseurs. Il est curieux de constater qu’à travers ses images et ses dialogues, depuis 1967, chaque épisode nous annonce l’avenir en nous avertissant point par point sur un programme d’asservissement très précis du genre humain.

Peter Knight a découvert un code inséré dans les images et les dialogues de la série. Il le nomme le « Code Adamski » en référence à George Adamski qui aurait été contacté par des hommes blonds ayant atterri aux Etats-Unis à bord de disques volants à lévitation magnétique. Du premier épisode Première preuve au dernier intitulé Inquisition, le code dévoile un plan réel d’invasion mondiale. Il s’avère que la technologie de pointe, les armes secrètes et les envahisseurs à l’auriculaire déformé existeraient réellement, leurs soucoupes ressemblant à celles qu’Adamski a prises en photo et à des soucoupes allemandes de la Seconde Guerre mondiale. La série passe ainsi en revue toutes les facettes du dossier ovni : les agences secrètes, l’armée, la science, la génétique, le contrôle mental, la politique, les religions….

À croire que les créateurs de la série connaissaient déjà tout ce qu’on a mis quarante ans à découvrir. De tout ce qui arrive en ce moment sur la Terre, on peut dire que la série en avait déjà parlé dès 1967. Non seulement l’invasion a déjà commencé par les relais terrestres inféodés, mais aujourd’hui, elle est pleine et entière, ce que nous pouvons constater par la tournure des événements qui frappent les sociétés et l’atmosphère liberticide de plus en plus oppressante qui gagne les esprits humains depuis la fin des années soixante.

Qui plus est, tous les domaines de la culture, bandes dessinées, romans populaires, films, séries télévisées… ont été depuis les années trente mystérieusement cryptés dans le cadre d’une guerre secrète pour conquérir la Terre et les planètes du système solaire. Les épisodes prophétiques de Les Envahisseurs sont calqués sur des événements secrets de la guerre froide. Une caste, pour établir son Nouvel Ordre Mondial par la haute technologie, peut déclencher des cataclysmes artificiels, tremblements de terre, tsunamis, tornades, exactement comme dans la série. Son armement porte dans la réalité le nom de H.A.A.R.P. Comme un écho au générique de la série, le but de ces Envahisseurs est bel et bien de faire de la Terre leur univers de prédation….

Mise en bouchées doubles

L’année 1968 constitue un grand bouleversement, et pas seulement dans la rue, avec 2001, l’Odyssée de l’espace (2001 : A Space Odyssey), film britannico-américain produit et réalisé par Stanley Kubrick. Le scénario est écrit par Kubrick et Arthur C. Clarke, partiellement inspiré de sa nouvelle intitulée La Sentinelle, et sur la base d’une documentation scientifique pointue (astrophysique, astronomie, paléontologie, …). Il traite de plusieurs rencontres entre les êtres humains et de mystérieux monolithes noirs (représentant tant la Matrice cyber que l’adoration religieuse et l’inexplicable de la vie) censés influencer l’évolution humaine, ainsi que d’un voyage vers Jupiter (à bord du Discovery), traçant un signal émis par un monolithe découvert sur la Lune.

Qualifié de film épique comme culte par sa précision scientifique, ses effets spéciaux révolutionnaires pour l’époque, ses scènes ambiguës, son usage d’œuvres musicales au lieu d’une narration traditionnelle, le rôle secondaire qu’occupent les dialogues dans l’intrigue, la bande-son mémorable conçue comme une association entre le mouvement de rotation des satellites et ceux des danseurs de valse (Beau Danube bleu de Johann Strauss II et poème symphonique de Richard Strauss Ainsi parlait Zarathoustra), le concept philosophique nietzschéen du surhomme.

Il établit sans ambiguïté le lien de l’évolution humaine avec la technologie et l’intelligence artificielle, l’influence de planètes comme Jupiter et Saturne sur la vie terrestre, ainsi que la perspective d’une vie extraterrestre. De manière subtile, Kubrick passe le message de ce qu’il faut en attendre à travers HAL 9.000, un ordinateur exceptionnel doué d’intelligence et de parole qui contrôle la mission en route vers Jupiter. Sans doute plus humain que ses « maîtres », il commence à donner des signes d’inquiétude : à quoi rime cette mission et que risque-t-on de découvrir sur Jupiter ?

La même année sort Planet of the Apes (La Planète des singes), film américain réalisé par Franklin J. Schaffner, et premier volet de la saga adaptée du roman éponyme de Pierre Boulle publié en 1963 qui sera suivi de beaucoup d’autres. Il puise sa trame dans la série télévisée La Quatrième Dimension, dont l’épisode La Flèche dans le ciel, diffusé en 1960. Il raconte la découverte au terme d’un voyage de dix-huit mois d’une mystérieuse planète au cœur d’une région désertique par les membres d’équipage d’un engin spatial américain nommé Icare, qui a traversé l’espace à une vitesse proche de la vitesse de la lumière. Ce monde est peuplé d’hommes primitifs dominés par une race de singes très évolués et ravalés au rang d’animaux de laboratoire, de chair à zoo, les présomptueux bipèdes que nous sommes étant invités à battre leur coulpe : racisme, saccage de la nature, course effrénée et aveugle au progrès technologique, danger atomique…

 

Aidé par deux jeunes chimpanzés scientifiques, un des rescapés (interprété par Charlton Heston) va s’attacher à franchir la « zone interdite » pour tenter de prouver qu’il est le fameux chaînon manquant de l’histoire de l’évolution. En fait, le thème de la folie et du désespoir est sous-jacent à l’intrigue, le « héros » comprenant après avoir tué ses deux camarades qu’ils ont vécu leur périple meurtrier dans la vallée de la Mort, sous-tendant la mort de la théorie de l’Évolution laissant à penser que l’homme est au sommet de la création. Le message passé à travers le peuple des gorilles est que d’autres espèces existent dans l’Univers, bien supérieures à l’humain en raison de leurs connaissances technologiques bien plus avancées. De même, le retour d’humains sur leur lointain passé valide les boucles cycliques de la Matrice, soit de réguliers « reset » remettant le compteur presque à zéro, hormis les sauts de conscience permettant à certain(e)s de s’extraire du jeu entropique de la Matrice …

Toujours en 1968, la série télévisée The Prisoner (Le Prisonnier) créée par l’écrivain et ancien agent des services secrets George Markstein, met en scène un agent secret démissionnaire, qui est empêché de révéler les secrets dont il est dépositaire en se retrouvant prisonnier dans un village où les gens (badgés ou pucés) ne sont que des numéros …

La série rend compte de la bulle de la Matrice limitant la conscience dans la 3ème dimension de réalité. Tant qu’elle n’est pas fissurée, cette bulle ou coquille dimensionnelle nous empêche de voir la réalité de ce monde telle qu’elle est, c’est à dire hyper-dimensionnelle et, tel le Christ, d’ascensionner.

En 1971, le futur que trace la Matrice dans l’inconscient humain pour en permettre la réalisation devient plus explicite avec THX 1138, film américain réalisé par George Lucas – dont c’est le premier long métrage – et produit par Francis Ford Coppola. Dans une société souterraine du futur, univers uniforme dont la couleur dominante est le blanc, l’humanité composée de matricules dépersonnalisés vit sous sédatifs, socialement soumise par un pouvoir totalitaire et invisible. Sous l’impulsion de sa compagne, l’ouvrier THX 1138 va tenter de fuir, tout particulièrement avec l’aide d’un hologramme humain. Lorsqu’il parvient à la fin du film à s’extraire l’extérieur du cauchemar, le soleil est gros et rouge, avec le passage d’un oiseau, libre comme l’air…

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yogaesoteric


4 juillet 2019

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