Les instructions spirituelles de Saint Séraphim de Sarov
DIEU
DIEU est un feu qui réchauffe et enflamme les cœurs et les entrailles. Si nous sentons dans nos cœurs le froid qui vient du démon – car le démon est froid – ayons recours au Seigneur et il viendra réchauffer notre cœur d’un amour parfait, non seulement envers lui, mais aussi envers le prochain. Et la froidure du démon fuira devant sa Face. Là où est DIEU, il n’y a aucun mal… DIEU nous montre son amour du genre humain non seulement quand nous faisons le bien, mais aussi quand nous l’offensons méritant sa colère… Ne dis pas que DIEU est juste, enseigne saint Isaac le Syrien… David l’appelait « juste », mais son Fils nous a montré qu’il est plutôt bon et miséricordieux. Où est sa Justice ? Nous étions des pécheurs, et le Christ est mort pour nous (Homélie 90).
Des raisons pour lesquelles le Christ est venu en ce monde
1) L’amour de DIEU pour le genre humain. « Oui, DIEU a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle » (Jn 3, 16).
2) Le rétablissement dans l’homme déchu de l’image divine et de la ressemblance à cette image, comme le chante de l’Église (Premier Canon de Noël, chant 1).
3) Le salut des âmes. « Car DIEU n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour condamner le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui » (Jn 3, 17).
De la foi
Avant tout, il faut croire en DIEU, « car il existe et se fait le rémunérateur de ceux qui le cherchent. (He 11, 6). La foi, selon saint Antioche, est le début de notre union à DIEU… La foi sans les œuvres est morte » (Jc 2, 26). Les œuvres de la foi sont : l’amour, la paix, la longanimité, la miséricorde, l’humilité, le portement de croix et la vie selon l’Esprit. Seule une telle foi compte. Il ne peut pas y avoir de vraie foi sans œuvres.
De l’espérance
Tous ceux qui espèrent fermement en DIEU sont élevés vers lui et illuminés par la clarté de la lumière éternelle. Si l’homme délaisse ses propres affaires pour l’amour de DIEU et pour faire le bien, sachant que DIEU ne l’abandonnera pas, son espérance est sage et vraie. Mais si l’homme s’occupe lui-même de ses affaires et se tourne vers DIEU seulement quand il lui arrive malheur et qu’il voit qu’il ne peut s’en sortir par ses propres moyens – un tel espoir est factice et vain. La véritable espérance cherche, avant tout, le Royaume de DIEU, persuadée que tout ce qui est nécessaire à la vie d’ici-bas sera accordé par surcroît. Le cœur ne peut être en paix avant d’avoir acquis cette espérance.
De l’amour de DIEU
Celui qui est arrivé à l’amour parfait de DIEU vit en ce monde comme s’il n’y vivait pas. Car il se considère comme étranger à ce qu’il voit, attendant avec patience l’invisible… Attiré vers DIEU, il n’aspire qu’à le contempler…
De quoi faut-il munir l’âme ?
De la parole de DIEU, car la parole de DIEU, comme dit Grégoire le Théologien, est le pain des anges dont se nourrissent les âmes assoiffées de DIEU.
Il faut aussi munir l’âme de connaissances concernant l’Église : comment elle a été préservée depuis le début jusqu’à nos jours, ce qu’elle a eu à souffrir. Il faut savoir ceci non dans l’intention de gouverner les hommes, mais en cas de questions auxquelles on serait appelé à répondre. Mais surtout il faut le faire pour soi-même, afin d’acquérir la paix de l’âme, comme dit le Psalmiste : « Paix à ceux qui aiment tes préceptes, Seigneur », ou « Grande paix pour les amants de ta loi » (Ps 118, 165).
De la paix de l’âme
Il n’y a rien au-dessus de la paix en Christ, par laquelle sont détruits les assauts des esprits aériens et terrestres. « Car ce n’est pas contre les adversaires de chair et de sang que nous avons à lutter, mais contre les Principautés, contre les Puissances, contre les Régisseurs de ce monde de ténèbres, contre les esprits du mal qui habitent les espaces célestes » (Ep 6, 12).
Un homme raisonnable dirige son esprit à l’intérieur et le fait descendre dans son cœur. Alors la grâce de DIEU l’illumine et il se trouve dans un état paisible et suprapaisible : paisible, car sa conscience est en paix ; suprapaisible, car au-dedans de lui il contemple la grâce du Saint-Esprit…
Peut-on ne pas se réjouir en voyant, avec nos yeux de chair, le soleil ? D’autant plus grande est notre joie quand notre esprit, avec l’œil intérieur, voit le Christ, Soleil de Justice. Nous partageons alors la joie des anges. L’Apôtre a dit à ce sujet « Pour nous, notre cité se trouve dans les cieux » (Ph 3, 20). Celui qui marche dans la paix, ramasse, comme avec une cuiller, les dons de la grâce. Les Pères, étant dans la paix et dans la grâce de DIEU, vivaient vieux. Quand un homme acquiert la paix, il peut déverser sur d’autres la lumière qui éclaire l’esprit… Mais il doit se souvenir des paroles du Seigneur : « Hypocrite, enlève d’abord la poutre de ton œil, et alors tu verras clair pour enlever la paille de l’œil de ton frère » (Mt 7, 5).
Cette paix, Notre Seigneur Jésus Christ l’a laissée à ses disciples avant sa mort comme un trésor inestimable en disant : « Je vous laisse ma paix, je vous donne la paix » (Jn 14, 27). L’Apôtre en parle aussi en ces termes : « Et la paix de DIEU qui surpasse toute intelligence gardera vos cœurs et vos pensées en Jésus-Christ » (Ph 4, 7). Si l’homme ne méprise pas les biens de ce monde, il ne peut avoir la paix. La paix s’acquiert par des tribulations. Celui qui veut plaire à DIEU doit traverser beaucoup d’épreuves. Rien ne contribue plus à la paix intérieure que le silence et, si possible, la conversation incessante avec soi-même et rare avec les autres. Nous devons donc concentrer nos pensées, nos désirs et nos actions sur l’acquisition de la Paix de DIEU et crier incessamment avec l’Église : « Seigneur ! Donne-nous la paix ! »
Comment conserver la paix de l’âme ?
De toutes nos forces il faut s’appliquer à sauvegarder la paix de l’âme et à ne pas s’indigner quand les autres nous offensent. Il faut s’abstenir de toute colère et préserver l’intelligence et le cœur de tout mouvement inconsidéré. Un exemple de modération nous a été donné par Grégoire le Thaumaturge. Abordé, sur une place publique, par une femme de mauvaise vie qui lui demandait le prix de l’adultère qu’il aurait soi-disant commis avec elle, au lieu de se fâcher, il dit tranquillement à son ami : Donne-lui ce qu’elle demande. Ayant pris l’argent, la femme fut terrassée par un démon. Mais le saint chassa le démon par la prière.
S’il est impossible de ne pas s’indigner, il faut au moins retenir sa langue… Afin de sauvegarder la paix, il faut chasser la mélancolie et tâcher d’avoir l’esprit joyeux… Quand un homme ne peut suffire à ses besoins, il lui est difficile de vaincre le découragement. Mais ceci concerne les âmes faibles. Afin de sauvegarder la paix intérieure, il faut éviter de juger les autres. Il faut entrer en soi-même et se demander « Où suis-je ? » Il faut éviter que nos sens, spécialement la vue, ne nous donnent des distractions : car les dons de la grâce n’appartiennent qu’à ceux qui prient et prennent soin de leur âme.
De la garde du cœur
Nous devons veiller à préserver notre cœur de pensées et d’impressions indécentes. « Plus que sur toute chose, veille sur ton cœur, c’est de lui que jaillissent les sources de la vie » (Pr 4, 23). Ainsi naît, dans le cœur, la pureté. « Bienheureux les cœurs purs, car ils verront DIEU » (Mt 5, 8). Ce qui est entré de bon dans le cœur, nous ne devons pas inutilement le répandre à l’extérieur : car ce qui a été amassé ne peut être à l’abri des ennemis visibles et invisibles que si nous le gardons, comme un trésor, au fond du cœur.
Le cœur, réchauffé par le feu divin, bouillonne quand il est plein d’eau vive. Si cette eau a été versée à l’extérieur, le cœur se refroidit et l’homme est comme gelé.
De la prière
Ceux qui ont décidé de vraiment servir DIEU doivent s’exercer à garder constamment son souvenir dans leur cœur et à prier incessamment Jésus Christ, répétant intérieurement : Seigneur Jésus Christ, Fils de DIEU, aie pitié de moi, pécheur… En agissant ainsi, et en se préservant des distractions, tout en gardant sa conscience en paix, on peut s’approcher de DIEU et s’unir à lui. Car, dit saint Isaac le Syrien, à part la prière ininterrompue, il n’y a pas d’autre moyen de s’approcher de DIEU (Homélie 69).
A l’église, il est bon de se tenir les yeux fermés, pour éviter les distractions ; on peut les ouvrir si l’on éprouve de la somnolence ; il faut alors porter son regard sur une icône ou sur un cierge allumé devant elle. Si pendant la prière notre esprit se dissipe, il faut s’humilier devant DIEU et demander pardon… car, comme dit saint Macaire « l’ennemi n’aspire qu’à détourner notre pensée de DIEU, de sa crainte et de son amour » (Homélie 2).
Lorsque l’intelligence et le cœur sont unis dans la prière et que l’âme n’est troublée par rien, alors le cœur s’emplit de chaleur spirituelle, et la lumière du Christ inonde de paix et de joie tout l’homme intérieur.
De la lumière du Christ
Afin de recevoir dans son cœur la lumière du Christ il faut, autant que possible, se détacher de tous les objets visibles. Ayant au préalable purifié l’âme par la contrition et les bonnes œuvres, ayant, pleins de foi au Christ crucifié, fermé nos yeux de chair, plongeons notre esprit dans le cœur pour clamer le Nom de Notre Seigneur Jésus Christ ; alors, dans la mesure de son assiduité et de sa ferveur envers le Bien-Aimé, l’homme trouve dans le Nom invoqué consolation et douceur, ce qui l’incite à chercher une connaissance plus haute.
Quand par de tels exercices l’esprit s’est enraciné dans le cœur, alors la lumière de Christ vient briller à l’intérieur, illuminant l’âme de sa divine clarté, comme le dit le prophète Malachie : « Mais pour vous qui craignez son Nom, le soleil de justice brillera, avec le salut dans ses rayons » (Ml 3, 20). Cette lumière est aussi la vie, d’après la parole de l’Evangile : « De tout être il était la vie, et la vie était la lumière de hommes » (Jn 1, 4).
Quand l’homme contemple au-dedans de lui cette lumière éternelle, il oublie tout ce qui est charnel, s’oublie lui-même et voudrait se cacher au plus profond de la terre afin de ne pas être privé de ce bien unique – DIEU.
De l’attention
Celui qui suit la voie de l’attention ne doit pas se fier uniquement à son propre entendement, mais doit se référer aux Écritures et comparer les mouvements de son cœur, et sa vie, à la vie et à l’activité des ascètes qui l’ont précédé. Il est plus aisé ainsi de se préserver du Malin et de voir clairement la vérité.
L’esprit d’un homme attentif est comparable à une sentinelle veillant sur la Jérusalem intérieure. A son attention n’échappe ni « le diable (qui) comme un lion rugissant, rôde cherchant qui dévorer » (1 P 5, 8), ni ceux qui « ajustent leur flèche à la corde pour viser dans l’ombre les cœurs droits » (Ps 10, 2). Il suit l’enseignement de l’Apôtre Paul qui a dit : « C’est pour cela qu’il vous faut endosser l’armure de DIEU, afin qu’au jour mauvais vous puissiez résister » (Ep 6, 13). Celui qui suit cette voie ne doit pas faire attention aux bruits qui courent ni s’occuper des affaires d’autrui… mais prier le Seigneur : « De mon mal secret, purifie-moi » (Ps 18, 13).
Entre en toi-même et vois quelles passions se sont affaiblies en toi ; lesquelles se taisent, par suite de la guérison de ton âme ; lesquelles ont été anéanties et t’ont complètement quitté. Vois si une chair ferme et vivante commence à pousser sur l’ulcère de ton âme – cette chair vivante étant la paix intérieure. Vois aussi quelles passions restent encore – corporelles ou spirituelles ? Et comment réagit ton intelligence ? Entre-t-elle en guerre contre ces passions, ou fait-elle semblant de ne pas les voir ? Et de nouvelles passions ne se sont-elles pas formées ? En étant ainsi attentif, tu peux connaître la mesure de la santé de ton âme.
yogaesoteric
21 janvier 2020
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