Pavel Durov, de Telegram, propose de témoigner dans le cadre de l’enquête sur les élections en Roumanie et accuse la France de faire pression sur la plateforme pour qu’elle censure les voix conservatrices

Pavel Durov, le fondateur de Telegram, a proposé de se rendre en Roumanie pour témoigner dans le cadre d’une enquête potentielle sur les allégations d’ingérence étrangère dans l’élection présidentielle du pays, un scrutin qui a déjà été marqué par des annulations, des accusations et des frictions internationales.

Sa déclaration est intervenue peu après que le candidat roumain George Simion a demandé l’annulation des résultats, arguant que le processus avait été compromis par des forces extérieures. Simion, un nationaliste qui a perdu face au candidat pro-européen Nicușor Dan, a décrit l’ingérence comme provenant « d’acteurs étatiques et non étatiques », citant la France et la Moldavie parmi les coupables. Durov, répondant à Simion sur X, a déclaré qu’il était « prêt à venir témoigner si cela peut aider la démocratie roumaine ».

Au second tour, Dan a obtenu 53,6 % des voix, contre 46,4 % pour Simion. Simion a toutefois refusé d’accepter le résultat, estimant que sa défaite était le fruit d’efforts extérieurs coordonnés visant à saboter sa campagne.

L’entrée en scène de Durov donne une autre dimension à l’affaire. Au début de l’année, le PDG de Telegram a accusé Nicolas Lerner, qui dirige le service de renseignement extérieur de la France, d’avoir personnellement demandé à Telegram de supprimer les voix conservatrices de l’espace numérique roumain avant les élections.

Durov a affirmé que Telegram avait rejeté cette demande.

La DGSE française a nié toute tentative de censure des points de vue politiques, affirmant que sa démarche auprès de Durov était une question de sécurité et consistait à « lui rappeler fermement les responsabilités de son entreprise, et les siennes propres, dans la prévention des menaces terroristes et de la pornographie enfantine ». Durov a réagi publiquement, rejetant entièrement ce cadre.

Selon lui, « les services de renseignement français ont confirmé qu’ils m’avaient rencontré, prétendument pour lutter contre le terrorisme et la pédopornographie. En réalité, il n’a jamais été question de pédopornographie. Ils voulaient les adresses IP de personnes soupçonnées de terrorisme en France, mais leur objectif principal a toujours été la géopolitique : la Roumanie, la Moldavie, l’Ukraine ».

Il a ensuite contesté l’idée selon laquelle Telegram n’agit pas contre les contenus exploitant les enfants, en décrivant une série d’outils et d’initiatives déjà en place : filtrage basé sur les empreintes digitales, équipes de modération dédiées, partenariats avec des ONG, et rapports réguliers sur les suppressions de contenus. « Insinuer à tort que Telegram n’a rien fait pour supprimer les contenus pédopornographiques est une tactique de manipulation », a déclaré Durov.

Durov n’en est pas à sa première confrontation avec les autorités françaises. En août de l’année précédente, il a été arrêté en France à la suite d’allégations liées à l’activité des utilisateurs sur sa plateforme. Il a été libéré après avoir versé une caution de 5 millions d’euros et a quitté le pays à la mi-mars.

Entre-temps, la légitimité de l’élection reste incertaine. Le premier scrutin présidentiel organisé en Roumanie en novembre dernier avait vu la victoire surprise du candidat indépendant Călin Georgescu.

Ce résultat a été rapidement annulé par la Cour constitutionnelle, qui a invoqué des soupçons d’ingérence de la part de la Russie. Des rapports ultérieurs ont suggéré que l’élan de Georgescu pourrait avoir été alimenté par une campagne orchestrée par des agents liés au Parti national libéral au pouvoir, apparemment destinée à fracturer l’électorat de droite. Georgescu n’a pas été autorisé à se présenter aux nouvelles élections.

Les autorités roumaines ont de nouveau accusé Moscou d’avoir interféré dans le récent second tour. La Russie a rejeté ces allégations, qualifiant le processus électoral à Bucarest de désordonné et d’illégitime.

La promesse de Durov de participer à l’enquête a ajouté de l’eau au moulin d’une situation déjà marquée par des accusations de manipulation, de censure et d’influence secrète.

yogaesoteric
5 juin 2025

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