Comprendre le jeûne (épisode 3) : Jeûner en marchant
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Le jeûne a essentiellement été popularisé en France par la combinaison jeûne et randonnée. Pour le grand public, le type de jeûne qui se démarque le plus reste celui qui le combine à la randonnée. Car ces deux activités semblent non cumulables pour bon nombre de personnes. La simple idée de se priver volontairement de nourriture provoque déjà souvent un véritable effroi, alors imaginer qu’il faudrait le faire en marchant plusieurs heures, c’est encore plus violent ! Et pourtant, c’est ce que pratiquent des milliers de gens chaque année en France.
L’expérience suédoise
Pour comprendre le phénomène, il faut remonter à 1954 et se rendre plus au nord. En 2018, en Suède, eut lieu une marche durant laquelle dix médecins relièrent Göteborg à Stockholm (520 km) en ne buvant que de l’eau pendant dix jours. Leur but : montrer que le jeûne est non seulement sans danger pour l’organisme, mais qu’il peut aussi être utilisé de manière thérapeutique. Après cette première démonstration concluante, les médecins eurent l’opportunité d’ouvrir une clinique au sein de laquelle ils purent entreprendre de traiter leurs patients par le jeûne.
En 1964, ils récidivèrent sur le même trajet, en incluant dans leur marche des jeûneurs suivis médicalement. À l’arrivée, les 20 participants furent testés : ils se trouvaient clairement dans un meilleur état de santé ! La publication des résultats de cette étude reçut un vif intérêt de la part des médias et du grand public. Les conditions étaient réunies pour que l’association du jeûne et de la randonnée puisse éclore internationalement.
Gisbert et Gertrud Bölling, les pionniers
En France, les débuts de cette forme de jeûne furent lents et compliqués. Pendant longtemps, seul le Dr Yves Vivini, qui dirigeait une clinique spécialisée, faisait pratiquer ces deux activités de manière combinée. Mais son livre Le jeûne et les traitements naturels n’eut qu’un écho mitigé, et son travail sur le jeûne actif demeura somme toute marginal. Il fallut attendre de nombreuses années pour que le jeûne en randonnant prenne vraiment son essor, importé par l’Allemand Gisbert Bölling et son épouse Gertrud, qui bénéficièrent du travail de fond et des formations données par leur compatriote Christoph Michl. On peut dire que la méthode Jeûne et Randonnée est véritablement née en France en 1990 à l’occasion du premier séjour organisé par les époux Bölling. Ils initièrent et formèrent depuis des dizaines d’encadrants, qui représentent à présent un vaste réseau à travers le pays.
Si le jeûne était déjà pratiqué en France, notamment par les hygiénistes depuis vingt-cinq ans, l’élan apporté par le jeûne en randonnant fut considérable pour la diffusion de la démarche dans l’Hexagone. Il existe dorénavant près de 150 lieux dédiés, où des dizaines de milliers de personnes ont franchi leur barrière mentale et découvert que oui, il était possible de mener de front pendant plusieurs jours une activité physique – modérée – et un régime alimentaire liquide très limité en calories.
Jeûne et randonnée, comment ça marche ?
Vue de loin, concilier marche et abstinence de nourriture solide reste une idée saugrenue. Pourtant, de près, on s’aperçoit que l’organisme possède suffisamment d’énergie pour la marche grâce aux réserves graisseuses, rendant ainsi possible un effort moyen de quelques heures. Et l’activité pédestre va mobiliser les fluides du corps, comme le sang et la lymphe, qui charrieront les déchets métaboliques stockés en direction des organes-filtres que sont les reins, les poumons et la peau.
Pour mener à bien la pratique, des calories et des sucres seront apportés au cours de la journée par des jus de fruits frais, et des sels minéraux à travers des bouillons de légumes. Aussi, à l’opposé du jeûne hygiéniste, purges et lavements pourront être pratiqués, et massages, soins de thalassothérapie, hammam et sauna, être associés.
Le célèbre ouvrage du Dr Helmut Lutzner, Comment revivre par le jeûne, présente en détail cette méthode. Si le sous-titre mentionne qu’il s’agit d’un « Guide du jeûne autonome », la plupart des personnes préfèrent jeûner dans un centre et en groupe. Et marcher ensemble est un moyen d’occuper le temps d’une journée de jeûne, qui peut sembler longue et fastidieuse.
Qu’attendre du jeûne en marchant ?
Les attentes des jeûneurs ne concernent généralement pas la santé au sens strict, mais plutôt un mieux-être : perdre du poids, faire une pause dans son quotidien, se recentrer, apaiser son mental, être au grand air sans penser à la nourriture, régénérer ses cellules, éliminer des toxines… Au contraire du jeûne hygiéniste, à l’objectif plus ou moins avoué de guérison, le jeûne en randonnant vise davantage la détente, pendant laquelle les intestins sont laissés au repos et où l’on profite de paysages splendides.
C’est aussi une façon pédagogique d’appréhender le fonctionnement de son corps et d’expérimenter en sécurité l’arrêt de l’alimentation solide sur une semaine. D’ailleurs, la charte de la Fédération française de jeûne et randonnée indique que le jeûne diététique s’adresse à des personnes en bonne santé, et qu’après la marche sont proposés des échanges et des activités créatives, ludiques et culturelles. Le but des stages est bien de combiner la découverte du jeûne à la transmission d’informations de santé naturelle.
Il existe des différences notables entre jeûne hygiéniste et jeûne en marchant, faisant subsister çà et là des querelles de chapelle entre ces deux approches. En définitive, on constate plus de rapprochements que de divergences pour ce qui est d’œuvrer à un but commun : populariser le jeûne.
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yogaesoteric
5 mars 2019