René Guénon – Un monde profane comme le nôtre
René Guénon est sans doute le premier auteur français à avoir écrit sur les doctrines orientales et notamment sur l’hindouisme sans les trahir. Il faut dire que Guénon était en relation avec d’authentiques maîtres du Nord de l’Inde et qu’il connaissait bien le sanskrit.
L’œuvre de Guénon est d’une grande cohérence et c’est au nom de la Tradition qu’il rejette tous les aspects de la modernité. Mais pour bien comprendre ce qu’il dit, il est nécessaire de laisser nos conditionnements, nos préjugés, ce que nous avons appris et notamment la notion d’évolution qui est une notion très récente. La critique de Guénon est fondée sur la distinction entre, d’une part l’existence de sociétés « traditionnelles », et un monde profane comme le nôtre. Avant l’introduction de la modernité, partout dans le monde, le sacré était la préoccupation majeure de l’humanité. La vie s’ordonnait autour de lui. Les anciennes civilisations tibétaines, indiennes, sumériennes, égyptiennes, etc. étaient imprégnées par cette présence du sacré comme la nôtre est imprégnée par la publicité et l’étalement de la marchandise.
En Inde ancienne le métier revêtait un caractère sacré, rituel, contrairement à ce qu’il en est des activités desséchantes de l’homme moderne. Comme nous le rappelle Guénon, dans une société traditionnelle, outre l’artisanat, l’art, le théâtre, l’architecture, la médecine, et même la guerre étaient reliés au sacré. Le profane n’existait pas. Il n’y avait pas plus de séparation entre l’art et la vie quotidienne qu’entre la vie quotidienne et la religion. Guénon nous montre que, contrairement à ce que veulent nous faire croire les « maîtres à penser » de notre époque, ce ne sont pas les conditions économiques et sociales qui font le bonheur d’un peuple, mais quelque chose d’immatériel. Car, comme en témoigne l’existence des sociétés traditionnelles, l’essence de l’homme n’est pas la raison, mais le spirituel. Et une civilisation doit s’ordonner autour de lui. Dans une société traditionnelle, les personnes admirées ne sont pas les vedettes de la télévision ou les politiciens, mais les sages, les saints, les maîtres. Il ne faut pas oublier que, dans l’Inde ancienne, la personne qui était admirée au-delà même des rois, était le sannyasin, le moine errant.
L’homme est habité par l’infini et s’il ne répond pas à cette vocation, il ne peut trouver le véritable bonheur. C’est pour cela que partout dans le monde la modernité pèse. Elle resserre, emprisonne l’âme tout simplement parce qu’elle n’est pas faite pour l’être humain dans la mesure où elle ne tient pas compte de la dimension essentielle qui l’habite.
La publication en 1925 de l’ouvrage « L’homme et son devenir selon le Védanta » de René Guénon est une date fondamentale dans la compréhension de la spiritualité hindoue, et il demeure toujours d’actualité.
yogaesoteric
16 octobre 2017