Jiddu Krishnamurti – Un maître qui a marqué les esprits et les cœurs (2)

Lisez la première partie de cet article

« Un ancien rêve est mort et un nouveau naît, comme une fleur qui traverse la terre dure. Une nouvelle vision prend naissance et une plus grande conscience se déploie… Une nouvelle force, née de la souffrance, palpite dans les veines, une sympathie et une compréhension nouvelles naissent de la souffrance passée un plus grand désir de voir les autres moins souffrir, et, s’ils doivent souffrir, de veiller à ce qu’ils le supportent noblement et en sortent sans trop de cicatrices. J’ai pleuré, mais je ne veux pas que les autres pleurent ; mais s’ils le font, je sais ce que cela signifie… »

Rompre avec le passé…

La vision nouvelle et la prise de conscience de Krishnamurti continua à se développer et atteint un sommet en 1929, lorsqu’il refusa les tentatives de Leadbeater et Besant de continuer avec l’Ordre de l’Etoile. Krishnamurti prononça la dissolution de l’Ordre au cours d’un discours abordant plusieurs autres sujets, à l’occasion de la réunion annuelle de Star Camp à Ommen en Hollande, le 3 août 1929, devant Annie Besant et plusieurs milliers de membres…

 

« Peut-être vous souvenez vous de cette histoire du diable et de son ami : Ils marchaient dans la rue quand ils virent devant eux un homme se baisser pour ramasser quelque chose et le mettre dans sa poche. L’ami dit au diable : “ Qu’est-ce que cet homme vient de ramasser ? ” “ Un petit bout de Vérité ” répondit le diable. ” Mauvaise affaire pour vous, alors ! ” remarqua l’ami. “ Oh, pas du tout ”, répliqua le diable, “ je vais l’aider à l’organiser ! ”. Je maintiens que la vérité est un pays sans chemins, que vous ne pouvez l’approcher par aucune route, quelle qu’elle soit : aucune religion, aucune secte. Tel est mon point de vue : et j’y adhère d’une façon absolue et inconditionnelle. La vérité étant illimitée, inconditionnée, inapprochable par quelque sentier que ce soit, elle ne peut pas être organisée ; on ne devrait pas non plus créer des organisations qui conduisent ou forcent les hommes à suivre un chemin particulier. Si vous comprenez bien cela dès le début, vous verrez à quel point il est impossible d’organiser une croyance. »

Et aussi : « Il n’y a rien là de tellement extraordinaire puisque je ne veux pas de disciples et je tiens à le dire. Dès le moment où l’on suit quelqu’un, on cesse de suivre la Vérité. Je ne me préoccupe pas de savoir si vous faites attention ou non à ce que je dis. Je veux faire une certaine chose dans le monde, et je la ferai avec une invariable concentration. Je ne me préoccupe que d’une seule chose essentielle : libérer l’homme. Je désire le libérer de toutes les cages, de toutes les peurs, et non pas fonder des religions, de nouvelles sectes, ni établir de nouvelles théories et de nouvelles philosophies… »

A la suite de la dissolution, Leadbeater et d’autres Théosophes se retournèrent contre Krishnamurti et se demandèrent publiquement si « Celui qui vient avait pu tomber dans l’erreur ». Mary Lutyens déclara : « après toutes ces années à annoncer la Venue, à se prémunir encore et encore contre le danger de voir l’Instructeur du Monde rejeté parce qu’il serait tenu de dire quelque chose de totalement nouveau et d’inattendu, quelque chose de contraire à la plupart des idées préconçues et des espoirs des gens, les dirigeants de la Théosophie, l’un après l’autre, tombèrent dans le piège contre lequel ils avaient si assidûment mis en garde les autres… »

Krishnamurti avait dénoncé toutes les croyances organisées, la notion de « gourou », et l’ensemble de la relation de maître à disciple, préférant se consacrer à travailler à rendre l’homme absolument, totalement libre. A partir de ce moment, il commença à se retirer de la Société Théosophique et de ses enseignements et pratiques, bien que restant en termes cordiaux avec certains de ses membres et ex-membres tout au long de sa vie. Comme le note sa biographe Lutyens, il n’a jamais démenti être l’Instructeur du Monde, disant à Lady Emily : « Vous savez Maman, je n’ai jamais nié cela [être l’Instructeur du Monde], j’ai seulement dit que cela n’avait pas d’importance ce que je suis ou qui je suis mais qu’ils devraient examiner ce que je dis, ce qui ne signifie pas que j’aie nié être l’Instructeur du Monde ». Quand un journaliste lui demanda s’il était le Christ, il répondit « Oui, dans le sens pur, mais pas dans l’acception traditionnelle du mot… »

Krishnamurti évoquera ses enseignements comme « les enseignements » et non comme « mes » enseignements. Son intérêt se porta toujours sur « les enseignements » : le professeur n’avait pas d’importance, et l’autorité spirituelle était dénoncée. Toute autorité de n’importe quelle sorte, spécialement dans le champ de la pensée et de la compréhension, est la plus destructive et la plus mauvaise des choses. Les meneurs détruisent les suiveurs et les suiveurs détruisent les meneurs. Vous devez être votre propre enseignant et votre propre disciple. Vous devez questionner tout ce que l’être humain a accepté comme valable, comme nécessaire…

Krishnamurti a renvoyé tous les dons en argent et propriétés offerts à l’Ordre de l’Etoile y compris un château en Hollande et environ 2000 hectares de terres – à leurs donateurs. Il passa ensuite le reste de sa vie essentiellement à tenir des dialogues et donner des conférences publiques à travers le monde, sur la nature de la croyance, de la vérité, de la douleur, de la liberté, de la mort, de la quête apparemment éternelle pour une vie spirituellement accomplie, et des sujets apparentés. En poursuivant à partir de la notion de pays sans chemins, il n’accepta ni disciple ni adorateur, voyant la relation entre disciple et maître spirituel comme un encouragement à l’opposé de l’émancipation spirituelle la dépendance et l’exploitation. Il exhorta constamment les gens à penser avec indépendance et clarté, à explorer et à discuter des sujets spécifiques avec lui, afin de « cheminer comme deux amis ». Il accepta les dons et les soutiens financiers offerts gracieusement par les gens qu’inspirait son travail, et poursuivit implacablement ses tournées de conférences et la publication de livres et de transcriptions de conférences pendant plus de cinquante ans…

Les années du milieu de la vie…


 


De 1930 à 1944, Krishnamurti se consacra à parler au cours de voyages et à éditer des publications sous l’auspice du « Star Publishing Trust » (SPT) qu’il avait fondé avec son proche collaborateur et ami de l’Ordre de l’Etoile, D. Rajagopal. La base des opérations pour la nouvelle entreprise était à Ojai, où Krishnamurti, Rajagopal, et la femme de Rajagopal, Rosalind Williams Rajagopal, résidaient dans la maison connue sous le nom de « Arya Vihara ». Les affaires et les aspects d’organisation du SPT étaient administrés principalement par D. Rajagopal pendant que Krishnamurti consacrait son temps à parler et à méditer. Tout au long des années 30, Krishnamurti parla en Europe, en Amérique latine, en Inde, en Australie et aux Etats-Unis…

En 1938, Krishnamurti fit la connaissance d’Aldous Huxley, qui était arrivé d’Europe en 1937. Ils amorcèrent une longue amitié qui dura de nombreuses années. Ils partagèrent des préoccupations communes concernant le conflit imminent en Europe qu’ils considéraient comme le résultat de l’influence pernicieuse du nationalisme…

La position de Krishnamurti sur la deuxième guerre mondiale fut souvent interprétée comme du pacifisme et même de la subversion pendant une période de ferveur patriotique aux Etats-Unis, et durant un certain temps il s’attira la surveillance du FBI. Il ne parla pas publiquement au cours d’une période d’environ quatre ans entre 1940 et 1944. Pendant ce temps il vécut et travailla tranquillement à Arya Vihara, qui pendant la guerre a fonctionné comme une ferme en grande partie auto-suffisante, faisant don de ses marchandises en surplus pour soulager les efforts en Europe…

Krishnamurti reprit la parole en public en mai 1944 avec une série d’entretiens à Ojai. Ces entretiens, et les documents suivants, furent édités par la « Krishnamurti Writings Inc » (KWINC), l’organisation qui a succédé au « Star Publishing Trust ». Ce devait être la nouvelle entité centrale de communication sur Krishnamurti dans le monde entier, dont le but unique était la diffusion de l’enseignement. C’est alors qu’en Inde après la deuxième guerre mondiale, beaucoup de personnalités éminentes vinrent pour le rencontrer, y compris le Premier Ministre Jawaharlal Nehru. Lors de ses réunions avec Nehru, Krishnamurti est longuement entré dans les détails sur les enseignements, disant par exemple, « La compréhension de soi survient seulement dans la relation, en s’observant dans le rapport avec les gens, les idées, et les choses ; avec les arbres, la terre, et le monde autour de vous et en vous. La relation est le miroir dans lequel le soi est révélé. Sans connaissance de soi il n’y a aucune base pour la pensée et l’action juste. » Nehru demanda, « Comment débute-t-on ? » à quoi Krishnamurti répondit, « Commencez là où vous êtes. Lisez chaque mot, chaque expression, chaque paragraphe de l’esprit, tel qu’il opère au travers de la pensée… »

Les dernières années…


 


Krishnamurti continua de parler à travers le monde, dans des conférences publiques, des discussions de groupe et avec des personnes intéressées. Vers la fin de 1980, il réaffirma les éléments de base de son message dans une déclaration écrite qui finit par être considérée comme l’« Essence de l’Enseignement ». En voici un extrait : « L’Essence de l’enseignement de Krishnamurti est contenu dans la déclaration qu’il fit en 1929 où il dit : La vérité est un pays sans chemin. L’homme ne peut venir à elle par aucune organisation, par aucune foi, par aucun dogme, prêtre ou rituel, ni par aucune connaissance philosophique ou technique psychologique. Il doit la trouver à travers le miroir de la relation, par la compréhension du contenu de son propre esprit, par l’observation, et non par l’analyse intellectuelle ou la dissection introspective. L’homme a construit en lui-même des images pour améliorer son sentiment de sécurité – religieuse, politique, personnelle. Celles-ci se manifestent comme symboles, idées, croyances. Leur fardeau domine la pensée de l’homme, ses relations et sa vie quotidienne. Ce sont les causes de nos problèmes car ils séparent l’homme de l’homme dans toutes les relations… »

En avril 1985 il parla lors d’une audience des Nations Unies à New York, où il lui fut attribué la médaille de la Paix des Nations Unies pour 1984. En novembre 1985 il visita l’Inde pour la dernière fois, en donnant un certain nombre de ce qui fut appelé des entretiens et discussions « d’adieu » entre cette date et janvier 1986. Ces derniers entretiens incluaient les questions fondamentales qu’il avait posées tout au long des années, aussi bien que des préoccupations plus nouvelles liées aux avancées de la science, la technologie, et la manière dont elles ont affecté l’humanité. Krishnamurti avait expliqué aux amis qu’il ne souhaitait pas inviter la mort, mais qu’il n’était pas sûr du temps que durerait son corps (il avait déjà perdu un poids considérable), et une fois qu’il ne pourrait plus parler, il n’aurait « aucun autre but ».

Dans son dernier entretien, le 4 janvier 1986, à Madras, il invita encore l’assistance à examiner avec lui la nature de l’enquête, l’effet de la technologie, la nature de la vie et de la méditation, et la nature de la création : « … Ainsi, nous enquêtons sur ce que fait un oiseau. Quelle création y a-t-il derrière tout ceci ? Est-ce que vous m’attendez pour la décrire, pour entrer en elle ? Vous voulez que je pénètre en elle ? Pourquoi [(depuis l’assistance : Pourquoi comprendre ce qu’est la création)]. Pourquoi demandez-vous cela ? Parce que je l’ai demandé ? Aucune description ne peut jamais décrire l’origine. L’origine est inconnue ; l’origine est absolument tranquille, elle ne vrombit pas en faisant du bruit. La création est quelque chose qui est des plus saint, c’est la chose la plus sacrée dans la vie, et si vous avez fait un désordre de votre vie, changez la. Changez la aujourd’hui, pas demain. Si vous êtes incertain, découvrez pourquoi et soyez certain. Si votre pensée n’est pas droite, pensez directement, logiquement. À moins que tout cela soit préparé, que tout cela soit arrangé, vous ne pourrez pas entrer dans ce monde, dans le monde de la création… »

 

Krishnamurti fut également préoccupé par son héritage, par le fait d’être inconsciemment transformé en une certaine personnalité dont les enseignements « auraient été remis » à des individus spéciaux, plutôt qu’au monde dans son ensemble. Il voulut que personne ne se posât en « interprète » de l’enseignement. Il avertit ses proches à plusieurs occasions qu’ils ne devaient pas se présenter comme porte-paroles en son nom, ou comme ses successeurs après sa mort…

Quelques jours avant sa mort, dans une dernière communication, il déclara catégoriquement que « personne » parmi ses proches, ou le grand public, n’avait compris ce qui lui était arrivé (comme messager de l’enseignement), ni n’avaient compris l’enseignement lui-même. Il ajouta que l’« immense énergie » fonctionnant dans sa vie s’en irait avec sa mort, soulignant encore l’impossibilité d’un successeur. Cependant, il offrit de l’espoir en déclarant que les gens pourraient approcher cette énergie et obtenir la compréhension dans une certaine mesure « s’ils vivent les enseignements ».

Au cours de discussions antérieures il s’était comparé à Thomas Edison, suggérant qu’il avait effectué le plus dur du travail, et que tout ce que les autres avaient maintenant besoin de faire c’était d’appuyer sur un bouton. Dans un autre exemple il parla de Colomb accomplissant le voyage d’une traversée laborieuse à la découverte du Nouveau Monde, tandis que maintenant, on pouvait facilement s’y rendre en avion ; la suggestion ultime étant que même si Krishnamurti était d’une certaine manière « spécial », les autres n’avaient pas besoin de l’être, afin de parvenir à son niveau de compréhension…

J. Krishnamurti est mort le 17 février 1986, à l’âge de 91 ans, du cancer du pancréas. Ses restes furent incinérés et dispersés par des amis et d’anciens proches dans les trois pays où il avait passé la majeure partie de sa vie ; L’Inde, l’Angleterre et les Etats-Unis d’Amérique…

Lisez la troisième partie de cet article
 
 

yogaesoteric

11 mars 2019

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