Vidéos violentes, nos enfants sont en danger de mort (1)


Voici une version abrégée du discours prononcé le 20 février 2002 par la présidente internationale de l’Institut Schiller, Helga Zepp-LaRouche, lors d’une conférence en Virginie (Etats-Unis)

Si l’on considère la situation mondiale dans sa globalité, il est clair que nous sommes déjà au cœur d’une crise de civilisation potentiellement plus grave que tout autre effondrement social jamais subi par l’humanité.

Si je dis cela, ce n’est pas seulement à cause du chaos que pourrait provoquer l’effondrement du système financier ou à cause de la menace d’une nouvelle guerre mondiale, avec recours éventuel aux armes nucléaires, mais avant tout parce que nous sombrons dans une crise culturelle sans précédent qui nous ramène à l’état barbare. Et je n’exagère pas en parlant de barbarie, car le monde se déshumanise très rapidement et les hommes font des choses que même des bêtes ne feraient pas.

Le processus de désintégration de nations entières suit son cours et les conditions d’une confrontation stratégique entre puissances nucléaires se mettent en place. Derrière cette évolution s’active une oligarchie devenue folle, qui cherche à préserver un système condamné.

Le problème, c’est que la majorité des gens ne perçoit pas le monde dans son ensemble. Quand je suis aux Etats-Unis, notamment, la parabole de l’aveugle et de l’éléphant me vient toujours à l’esprit. Un aveugle essaie de se faire une idée ce qu’est un éléphant. Il lui tâte d’abord le tronc, ensuite la queue, puis, se mettant de côté, il lui prend une patte. Mais il n’arrive pas à réunir tous ces éléments pour appréhender l’idée d’éléphant. C’est de cette façon que beaucoup perçoivent la crise actuelle qui les frappe.

Ainsi, contrairement à ce qu’affirme le président Clinton, un sans-abri de New York ou de Washington ne croit certainement pas que le pays soit en train de vivre la plus grande prospérité de tous les temps. Un malade qui doit être hospitalisé et ne trouve pas de lit aux urgences sait très bien que le système de santé privé des Etats-Unis (HMO) est un système qui tue. Le parent d’un enfant qui vient de tirer sur ses camarades comprend que quelque chose ne va vraiment pas dans le système scolaire et la vie culturelle des jeunes. Une mère dont le bébé vient de mourir dans l’un des 33 pays pauvres d’Afrique, ne croira jamais que la globalisation soit bonne pour ce pays.

Cependant, très peu perçoivent l’ensemble du tableau, la plupart d’entre eux restent dans l’obscurité. Et c’est voulu. Un ancien philosophe chinois l’a dit très simplement : « Que le peuple reste stupide, il est plus facile de gouverner ». Comme je vais le montrer, l’oligarchie fait tout pour abrutir la population, la désensibiliser, en recourant à des méthodes de modification du comportement et même de lavage de cerveau.

La majorité des citoyens ne s’en rend pas compte parce que ce processus de déshumanisation progresse par petites étapes et que la déchéance culturelle dure depuis un certain temps déjà. Je voudrais vous montrer que la méthode utilisée est toujours la même, que ce soit dans les simulations de « jeux de guerre », dans la spéculation financière.

Cette méthode se base, pour l’essentiel, sur les « Lumières » anglaises et les propositions mécanistes de John von Neumann et de Norbert Wiener, elles-mêmes inspirées de John Locke et surtout de son Essai sur l’entendement humain, selon lequel l’esprit humain serait une tabula rasa et les idées le résultat d’expériences sensuelles. Dans son livre La Cybernétique, Wiener infère que l’esprit humain fonctionne comme le chien de Pavlov, ce qui s’applique aussi, dans le fond, aux ordinateurs.

Une fois que nous avons identifié cette méthode, nous sommes alors en mesure de réagir. (…)

Mme Helga Zepp-LaRouche analyse ensuite la situation stratégique actuelle, notamment les dangers causés par la globalisation néolibérale, les réformes économiques imposées à la Russie et à d’autres pays de l’Est et la position confrontationniste vis-à-vis de la Chine, notamment en soutenant l’indépendance de Taïwan.

Le scénario de guerre de Weinberger

Sir Caspar Weinberger [ancien ministre de la Défense du président Reagan] est co-auteur d’un livre paru en 1996 et intitulé The Next War (La prochaine guerre), dont l’introduction est de Lady Margaret Thatcher. Pour prévoir la performance des forces américaines et le résultat d’éventuelles confrontations pour les Etats-Unis et leurs alliés, les auteurs s’appuient sur les dernières évaluations les plus fiables des ressources technologiques de l’Amérique, de la disponibilité de ses troupes et de ses capacités de développement. Leurs scénarios sont modelés sur les simulations de guerre informatisées du Pentagone. (…)

Le département de la Défense met régulièrement en scène de tels jeux informatisés, dans lesquels les Etats-Unis se trouvent face à divers ennemis en différentes circonstances. Il est intéressant de constater que le livre de Weinberger prévoit des scénarios de guerre contre la Corée du Nord et la Chine, l’Iran, le Mexique, la Russie et, plus surprenant, le Japon.

Prenons le cas d’une guerre entre les Etats-Unis d’une part et la Chine et la Corée du Nord de l’autre. (…) A la fin du scénario, le département de la Défense conclut que bon nombre des vies perdues auraient pu être sauvées si les Etats-Unis avaient mis au point et déployé des systèmes de défense anti-missiles. Aussi pour endiguer la Chine, les Etats-Unis devraient fournir à Taïwan des avions, des systèmes de défense aérienne et des navires modernes.

On peut prétendre, bien sûr, que tout cela n’est pas sérieux, que c’est seulement de la fiction. Mais Weinberger a tout de même été ministre de la Défense et c’est un pilier de l’establishment militaire du Parti républicain. (…) Et malheureusement, malgré le désir sincère du président Clinton d’établir un partenariat stratégique avec la Chine, la politique développée dans ce livre est activement suivie par certains responsables du Pentagone, comme le ministre de la Défense William Cohen, et toute la discussion sur la défense anti-missiles de théâtre va dans le même sens.

Les prémisses de ce scénario sont parfaitement ridicules. Les auteurs ne comprennent rien à la réalité de la Chine, à sa longue histoire, à ses belles traditions culturelles. Ils ne comprennent pas non plus que la Chine n’a aucun intérêt à se lancer dans une guerre avec quiconque, sans parler des Etats-Unis. C’est cependant ce type de logique qui peut mener à une troisième guerre mondiale.

Ce livre, comme d’autres publiés sur le même thème, montrent comment préparer des confrontations militaires avec de prétendus « pays voyous ».

Pessimisme culturel

Prenons maintenant un peu de recul pour voir les conséquences de l’unilatéralisme anglo-américain au niveau mondial. Dans un passé récent, un autre pays a cru pouvoir dominer le monde et ces douze années de nazisme ont débouché sur une catastrophe totale.

Plus tard, choqués, les gens se sont demandé comment les Allemands, les héritiers de Schiller et de Beethoven, avaient pu tomber si bas. On a de nombreuses explications sur la façon dont l’image de l’homme transmise par les classiques allemands a peu à peu été transformée en pessimisme culturel.

Aujourd’hui, il est grand temps de se demander, avant l’éclatement de la Troisième guerre mondiale, comment les Etats-Unis, la première vraie république souveraine, le « Temple de la liberté », ont pu devenir un pays redouté dans le monde entier, considéré comme le nouvel ennemi. (…)

Bien sûr, du point de vue historique, nous avons beaucoup d’éléments de réponse objectifs : le rôle de la monarchie britannique, l’assassinat [du président] McKinley, la Première Guerre mondiale, la mort prématurée de Franklin Roosevelt, etc. Mais nous devons aussi considérer de manière subjective ce qui s’est passé. Comment s’est développée cette dérive, au point que la jeunesse américaine soit devenue si violente aujourd’hui ? (…)

J’ai repensé à certains aspects historiques dont Lyn [Lyndon LaRouche] a souvent parlé. Après l’expérience de la Deuxième Guerre mondiale, par exemple, il était en quelque sorte évident pour les Américains que les Etats-Unis devaient aider le reste du monde à vaincre le sous-développement grâce à la technologie occidentale. Or Lyn a souvent évoqué la façon dont ses contemporains se sont laissés corrompre après guerre. J’ai réfléchi à cela car je pense que, pour comprendre le problème actuel, il faut identifier les erreurs commises à la fin des années 40 et au début des années 50.

J’ai donc lu quelques ouvrages, dont White Collar (Col blanc), qui décrit les mutations caractéristiques de la société américaine à cette époque. (…)

Il s’agit, en gros, des changements induits pendant la présidence Truman [1945-53) et la période maccarthyste, liés au développement du suburbia [les Américains qui en avaient les moyens quittaient alors les villes, jugées trop dangereuses et misérables, pour s’installer en banlieue] et aux valeurs afférentes, notamment la recherche du gain en tant que tel. Les gens du suburbia ne se préoccupaient que de choses tout à fait banales, qui ont changé leur façon de penser, et c’est sur les enfants de ces familles, les « baby boomers », que les parents ont projeté leurs frustrations, les accablant d’un trop plein d’indulgence, se faisant concurrence pour accaparer leur affection, ou leur imposant une sévère discipline pour qu’ils « vaillent quelque chose ». (…)

En fin de compte, l’acquisition de biens matériels devint l’aspect le plus important de toute leur vie sociale. Dans les entreprises, un nouveau type d’entrepreneurs s’imposa. Auparavant, la richesse n’était pas une valeur en soi, mais plutôt le moyen de s’assurer une vie relativement sans souci. L’ancienne classe moyenne, que décrit l’auteur W.E.H Lecky, se distinguait des autres couches sociales par son indépendance politique, sa prudence, son intelligence pratique, son industrie solide, sa grande moralité, elle était consciente de sa propre dignité. Aujourd’hui, la classe moyenne n’a plus la volonté de s’affirmer mais seulement une volonté tenace de lutter contre des menaces extérieures multiples. (…)

L’ancienne classe moyenne avait un esprit civique et les gens se mobilisaient volontiers pour des projets d’intérêt public. Par la suite, lorsque les grandes entreprises commencèrent à s’installer dans les petites villes et les banlieues, l’important était d’être invité à leurs événements sociaux (…). L’épouse du patron de grande entreprise devint un modèle pour la femme de l’ancienne classe moyenne. Le plus grand drame de la vie était de ne pas être invité à un événement quelconque. (…)

Puis, les anciens capitaines d’industrie ont été remplacés par des « managers ». Cette nouvelle élite était composée de ceux qui possédaient le maximum de tout ce qu’il fallait avoir. Même d’anciennes professions, comme la médecine et le droit, furent envahies par l’idéologie du « manager ». A la place du médecin de famille, s’est instaurée une bureaucratisation de la médecine et c’est ce qui a semé les graines de la corruption. Quand les décisions irresponsables prévalent et que les richesses ne sont pas proportionnellement distribuées, ceux qui prennent les décisions ont recours à la tromperie.

Les « intellectuels » employés dans ces bureaucraties se sont imposé une auto-censure pour que leurs opinions écrites et orales soient conformes à ce qu’ils pensaient être l’opinion de leur employeur. Ils sont ainsi devenus des porte-parole plutôt que des chercheurs en quête de vérité. Sans doute les intellectuels ont-ils toujours été attirés dans l’orbite de la classe dirigeante, mais au milieu du XXème siècle, la tendance à suivre cette ligne semble plus organisée et plus enracinée. (…)

L’homme politique était face à un dilemme car s’il exprimait vraiment ses convictions, il n’avait aucune chance d’arriver au pouvoir. S’il se comportait de manière réaliste, c’est-à-dire dans la ligne des grands partis, il perdait très vite son enthousiasme pour la chose politique. De même, les artistes et les intellectuels indépendants, qui sont habituellement les plus aptes à résister aux stéréotypes et donc à la mort de la créativité, ont été de plus en plus nombreux à se soumettre au pouvoir.

Les moyens de communications ont été progressivement monopolisés par les machines des partis politiques, qui contrôlaient de ce fait toutes possibilités de changements réels. Ainsi, on a minimisé les occasions d’agir politiquement. Les intellectuels ont été amenés à adopter des positions contraires à celles qu’ils auraient voulu défendre. Tout ceci a fait naître chez les gens un sentiment de défaite et d’impuissance, et ils ont inventé en réponse le culte de l’aliénation et le fétichisme de l’« objectivité ».

Chez le vendeur aussi, lui qui, auparavant, essayait d’offrir à son client une meilleure qualité et tirait une certaine fierté de son travail, on a constaté un changement d’identité. Quant aux cols blancs, en raison de la bureaucratisation, tout ce qui compte désormais pour eux, c’est la hiérarchie – qui donne les ordres ? On veut se sentir proche du patron parce que comme cela, on se sent puissant. (…)

On donne énormément d’importance au statut – c’est la lutte pour l’apparence, non pour la vérité. Les loisirs de nombreuses personnes de la classe moyenne sont entièrement consacrés à la gratification de leurs revendications statutaires. (…)

Tout comme le travail est vidé de sa substance par l’apitoiement sur son propre sort, les loisirs eux-mêmes perdent leur sens à cause du snobisme et de l’obligation de consommer d’une certaine façon. On veut impressionner les autres par sa capacité à acheter. L’apparence de succès est encore plus importante que la substance. Les émotions deviennent donc un cérémonial par lequel on revendique un statut, totalement coupées des sentiments intimes. (…).

Les vacances deviennent alors le summum du statut, car on peut s’acheter le sentiment d’un rang plus élevé, ne serait-ce que pour une semaine. Et pour éprouver un tel plaisir une fois dans l’année, on passe d’interminables journées de travail ennuyeuses. (…)

Avant d’en arriver au thème central de ma présentation, je voudrais encore ajouter une réflexion. Dans le contexte de la mondialisation et de l’effort pour établir un gouvernement mondial, on assiste à une grande offensive contre l’Etat-nation. En Europe, cela prend la forme de scandales de corruption qui, après avoir détruit l’Italie, affectent aujourd’hui l’Allemagne et la France. (…)

Je voudrais maintenant aborder le processus de corruption. S’il est vrai que des pots de vin ont été acceptés et des millions de marks distribués, il est néanmoins incroyable de voir à quel point chacun joue son rôle dans ce scénario de bas niveau, dont le but est la destruction du système politique allemand. (…)

Lisez la deuxième partie de cet article


yogaesoteric
23 avril 2020

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