La conférence de Munich sur la sécurité menace d’une guerre sur tous les fronts

 

Les travaux de la 54ᵉ conférence de Munich sur la sécurité, qui s’est déroulée en Allemagne en février, montrent clairement que les puissances impérialistes entraînent l’humanité de nouveau collectivement au bord du désastre.

Les menaces directes de guerre se sont immédiatement concentrées sur la Syrie, l’Iran et la Corée du Nord. Mais les puissances américaines, européennes et autres ont clairement indiqué que leurs cibles militaires ultimes sont la Russie et la Chine. De plus, dans leur prétendue lutte collective pour s’assurer l’hégémonie mondiale, les puissances impérialistes se confrontent elles-mêmes les unes aux autres d’une manière inédite depuis la Seconde Guerre mondiale.

Washington a mené la meute dans le bellicisme envers la Syrie et la Corée du Nord, lié à des allégations de culpabilité russe et chinoise.

La conférence a été ouverte par le président Wolfgang Ischinger qui a averti que le monde se rapproche trop d’un « conflit interétatique majeur ».

Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a déclaré : « Pour la première fois depuis la fin de la guerre froide, nous sommes face à une menace nucléaire, à la menace d’un conflit nucléaire. » Ce n’était pas Washington qu’il accusait mais « le développement des armes nucléaires et des missiles à longue portée par la République populaire démocratique de Corée ».

Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a tenu à souligner dans son discours que Munich était plus proche de la capitale nord-coréenne, Pyongyang, que de Washington, avant de concentrer sa colère sur la Russie. L’OTAN cherchait prétendument à éviter une nouvelle course aux armements avec la Russie, mais « la Russie modernise ses capacités nucléaires, développe de nouveaux systèmes nucléaires et augmente le rôle des armes nucléaires dans sa stratégie militaire. C’est une cause de réelle préoccupation. »

Stoltenberg s’est vanté la semaine dernière de l’augmentation de 5 % des dépenses de défense de l’OTAN en dehors de celles américaines en 2017, de sorte que huit membres de l’alliance ont atteint l’engagement de 2 % du PIB. Cela devrait comprendre 15 États membres d’ici 2024.

Le conseiller américain en matière de sécurité nationale, H.R. McMaster, a déclaré : « Nous sommes face à une série de menaces communes. Des régimes voyous qui mettent déjà en péril la sécurité internationale au Moyen-Orient et en Asie du Nord-Est. »

Il fallait « agir contre l’Iran », a-t-il martelé, qui cultiverait un « réseau de forces par procuration » et de milices en Syrie, au Yémen et en Irak « qui devenaient de plus en plus capables, alors que l’Iran sème de plus en plus […] des armes destructives dans ces réseaux. » Le président syrien Bachar al-Assad utiliserait encore des armes chimiques contre l’insurrection islamiste soutenue par les États-Unis, a-t-il également affirmé, citant « des témoignages et des photos rendus publics ».

Citant l’Iran, mais faisant en fait une référence à peine voilée à la Russie et à la Chine, il a ajouté : « Nous savons que la Syrie et la Corée du Nord ne sont pas les seuls États voyous à développer, utiliser, propager des armes dangereuses ».

Reprenant le flambeau, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a mis en garde dimanche qu’Israël était prêt à mener une guerre multi-frontale avec l’Iran. Brandissant ce qu’il a prétendu être un morceau d’un drone iranien abattu dans l’espace aérien israélien le 10 février, il a livré « un message aux tyrans de Téhéran […] Ne mettez pas la détermination d’Israël à l’épreuve ».

« À travers ses milices chiites par procuration en Irak, les Houthis au Yémen, le Hezbollah au Liban, le Hamas à Gaza, Iran dévore d’énormes pans du Moyen-Orient », a-t-il dit. « Nous allons agir sans hésitation pour nous défendre. Et nous agirons si nécessaire non seulement contre les procureurs iraniens qui nous attaquent, mais contre l’Iran lui-même. »

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel, a ajouté qu’en ce qui concerne la Chine et la Russie, « l’Occident n’a pas de nouvelle stratégie pour gérer ces deux puissances. La Chine et la Russie “ essaient constamment de mettre à l’épreuve et de saper l’unité [de l’Union européenne] ”. » Par le biais de son initiative la nouvelle route de la soie, « la Chine développe un système concurrent complet ; un système différent du nôtre qui n’est pas basé sur la liberté, la démocratie et les droits de l’homme individuels. La Chine semble avoir une véritable idée stratégique globale et poursuit cette idée avec persévérance. »

Tout aussi frappante que la rhétorique anti-russe et anti-chinoise était la discussion de plus en plus ouverte de l’ouverture du fossé entre les États-Unis et les grandes puissances européennes. La conférence, qui devait se concentrer sur la « contribution » de l’Europe à la sécurité mondiale, a été organisée après les demandes répétées des États-Unis pour une augmentation des dépenses militaires, répétées cette semaine par le secrétaire américain à la Défense James Mattis. Mais tout au long des discussions à Munich il y a eu un différend sur les dangers d’une brèche dans l’Alliance de l’OTAN.

Stoltenberg a consacré une grande partie de sa contribution à mettre en garde contre le risque que la future coopération de l’UE en matière de défense – telle que prévue dans l’accord de coopération structurée permanente de décembre 2017, PESCO – ne menace l’unité de l’OTAN.

Renforcer « le pilier européen au sein de l’OTAN » et « mieux partager la charge », c’était bien. Cependant, après la sortie de la Grande-Bretagne de l’UE, environ 80 % du financement de l’OTAN proviendrait d’alliés non membres de l’UE, a-t-il ajouté. Le risque « d’affaiblir le lien transatlantique, le risque de dupliquer ce que l’OTAN est déjà en train de faire et le risque de discrimination contre les membres de l’OTAN qui ne font pas partie de l’UE […] doivent être évités. »

« L’UE ne peut pas protéger l’Europe à elle seule », a-t-il ajouté ostensiblement.

L’envoyé américain à l’OTAN, Kay Bailey Hutchison, a également averti que « nous ne voulons pas que le PESCO soit un véhicule protectionniste pour l’UE et nous allons surveiller attentivement car, si cela devient le cas, cela pourrait faire éclater alliance de sécurité que nous avons […] Nous voulons que les Européens aient des capacités et de la force, mais pas pour barrer la route aux produits américains. »

Stoltenberg, qui a clairement parlé pour Washington, a été peu soutenu par l’Allemagne et la France.

La ministre allemande de la défense, Ursula von der Leyen, a déclaré que l’Europe ne pouvait plus accepter une situation où elle était bloquée par la nécessité de décider des approches conjointes de la politique étrangère à l’unanimité au sein de l’OTAN.

« L’Europe doit prendre de la vitesse face aux défis mondiaux du terrorisme, de la pauvreté et du changement climatique », a-t-elle déclaré. « Ceux qui le veulent doivent pouvoir avancer sans être bloqués par des pays isolés […] Nous voulons rester transatlantiques mais nous voulons devenir plus européens. »

« Un début a été fait », a-t-elle dit. « En décembre dernier, nous avons finalement lancé des plans pour une Union européenne de défense. D’une certaine manière, nous avons commencé sur la voie politique pour travailler sur une armée européenne. »

S’exprimant sur France 24, von der Leyen est allé jusqu’à représenter collectivement « Le Brexit, la crise des migrants, une Russie plus affirmée et une Maison Blanche imprévisible » comme une « sonnette d’alarme dont nous avions besoin pour comprendre que nous devions changer quelque chose et camper sur nos propres jambes. »

La ministre des Armées de la France, Florence Parly, a également écarté les préoccupations américaines.

« Quand nous sommes menacés dans notre propre voisinage, en particulier dans le sud, nous devons être en mesure de répondre, même lorsque les États-Unis ou l’alliance (de l’OTAN) voudraient être moins impliqués », a-t-elle déclaré.

Les nations de l’UE doivent être prêtes à agir « sans demander aux États-Unis de venir à notre secours, sans leur demander de détourner d’autres missions leurs capacités ISR (renseignement, surveillance et reconnaissance) ou leurs engins de ravitaillement. »

L’Allemagne et la France se sont récemment engagées à augmenter leurs dépenses militaires – la France s’engageant à atteindre l’objectif de l’OTAN de 2 % en promettant 370 milliards de dollars d’investissements d’ici 2025.

La Première ministre britannique Theresa May a cherché à renforcer sa position dans les négociations avec l’UE en mettant l’accent sur le rôle du Royaume-Uni dans les structures militaires et de sécurité collectives de l’Europe. May a exhorté les dirigeants européens à ne pas permettre que l’intention de la Grande-Bretagne de quitter la politique étrangère et de sécurité commune de l’UE empêche un accord sur un nouveau traité de sécurité parce que cela aurait « des conséquences dommageables sur le monde réel ».

May a été pleinement soutenue par les États-Unis, qui considèrent le Royaume-Uni, qui détient le deuxième plus gros budget de défense de l’OTAN, comme un contre-pouvoir précieux par rapport à l’Allemagne et la France.

 

yogaesoteric
2 juin 2018

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