Le terrorisme comme outil de l’Etat profond – la politique intérieure (5)

 

par Franck Pengam

Lisez la quatrième partie de cet article 

Dans le cadre du terrorisme spectaculaire étatique, ce sont bien ces facteurs de précarité socio-économique, de fragilité identitaire et psychologique couplés à une jeunesse pleine de rage dans une société en crise matérielle et spirituelle, qui permettent de manipuler des individus en leur donnant une alternative transcendante permettant de justifier leurs actes. Le tout pour servir une cause d’ordre purement matérielle (politique intérieure, géostratégique, etc.) qui les dépasse complètement.

L’histoire se répète : quelques cas antérieurs

S’il est possible qu’il y ait eu un agissement isolé d’un ou plusieurs états profonds dans les sujets et profils que nous avons développés en 1ère partie, il est également possible qu’il n’y ait eu aucun agissement pour justement amener les conditions nécessaires à ce que la bêtise de certaines personnes tue des gens. À ce jour, il n’y a pas suffisamment de recul et de preuves matérielles pour pencher vers l’un ou l’autre, mais ces questions sont finalement secondaires, car les conséquences restent les mêmes. La position la plus saine serait tout simplement d’admettre que nous ne savons pas qui sont les réels commanditaires de ces différents récents attentats ni quels sont leurs objectifs profonds. Mais mettons en lumière ces faits récents avec ceux dont le recul a permis une investigation plus précise.

Rappelons avant tout que le travail du service de renseignement est d’effectuer les opérations que l’on ne peut pas faire au grand jour. C’est bien pour cela qu’il doit agir sous couverture et que le secret est la matrice même du renseignement. Ce qui veut dire que les dérives sont logiquement plus poussées, puisqu’il se caractérise par la dissimulation de ses activités réelles et l’occultation de la vraie nature des actes qui en découlent. Le service spécial travaille sur le terrain de la confusion, du clandestin et finalement de l’illégal, ce qui en fait un outil essentiel de l’État. À partir de cela, nous pouvons postuler que les acteurs du terrorisme spectaculaire connus de différents services de renseignement ont pu être approchés, engagés, manipulés, pour devenir des collaborateurs, à une certaine échelle. Les recrutements sous fausse bannière, qui consistent à engager des agents en les trompant sur la puissance qu’ils sont amenés à servir, sont fréquents dans le domaine du renseignement.

Prenons l’exemple de notre modèle à tous : Ze United States of America. Là-bas, le FBI dispose d’une armée grandissante d’informateurs infiltrés, qui sont largement accusés de pousser des personnes influençables à organiser des attentats. En effet, selon Le Monde, le FBI a « encouragé, poussé et parfois même payé » des musulmans pour les inciter à commettre des attentats sur le sol étasunien, au cours d’opérations montées de toutes pièces. Dans 30 % des cas, l’agent infiltré aurait joué un rôle actif dans la tentative d’attentat. Agissant sous couverture et jouissant d’une immunité, un agent du renseignement peut aller jusqu’à désigner une cible et fournir de l’argent et des armes, en exerçant une pression sur une personne désignée pour qu’elle y participe. Le FBI cible principalement des personnes vulnérables, souffrant de troubles mentaux et intellectuels pour les instrumentaliser. Bref, sous couvert de lutte contre le terrorisme, le FBI le crée de toute pièce afin de maintenir une stratégie de tension justifiant par exemple l’État policier en interne et l’intervention armée en externe. À ce sujet, voir également le documentaire indispensable d’Envoyé Spécial sur France 2 qui accuse également le FBI de fabriquer de A à Z des complots terroristes sur le sol étasunien. Le cas d’un Mohammed Merah et même d’un Salah Abdelslam par exemple ressemblent étrangement à ce genre de manipulations. Mais cela est bien sûr inimaginable au pays des Lumières éteintes.

Sans rentrer dans des détails trop complexes, nous pouvons rapidement évoquer d’autres affaires similaires. Prenons l’exemple du meurtre d’un soldat britannique à Londres le 22 mai 2013. Ce n’est pas vraiment un attentat en soi, mais nous l’assimilons à cette notion de terrorisme spectaculaire vu qu’il a fortement mobilisé les médias et les esprits, probablement à cause du caractère « islamique » des meurtriers. L’un d’eux s’appelle Michael Adebolajo et il a dans le passé tout simplement été « harcelé » par le MI5 (le renseignement intérieur britannique), qui a tenté de le recruter après un voyage au Nigéria. Banal quoi. Autre exemple, à propos des attentats du 15 avril 2013 au marathon de Boston perpétré par les frères Tsarnaev. Le FBI a « tenté » de recruter l’un d’eux (Tamerlan Tsarnaev) en lui proposant de devenir un informateur sur la communauté tchétchène et musulmane. Anodin également. Le journal russe Izvestia du 24 avril 2013 a aussi révélé que Tamerlan Tsarnaev avait antérieurement participé en Géorgie à un séminaire du Fonds pour le Caucase, une association paravent de la Jamestown Foundation créée par la CIA ou au moins réputée proche.

Inutile d’approfondir la riche question du 11 septembre 2001, mais parlons tout de même rapidement de Khalid al-Mindhar et Nawaf al-Hazmi qui faisaient partie du commando ayant précipité le vol American Airlines 77 sur le Pentagone. Ces deux hommes ont bénéficié de protections de haut niveau au sein de la CIA, de la section anti-terroriste du FBI de New York, de la Branche Spéciale (service de renseignement de Malaisie), d’Omar al-Bayoumi (un agent saoudien présent aux États-Unis à l’époque), et de beaucoup d’autres acteurs. Cette étude a été traitée par Le Point (N° 2258-2259, 17 décembre 2015) et a quelques années de retard sur l’ancien diplomate et universitaire canadien Peter Dale Scott (La route vers le nouveau désordre mondial, Demi-Lune, 2011) qui a minutieusement traité du sujet. Les protections offertes par Washington à Riyad dans cette affaire du 11 septembre 2001 sont sans équivoque. L’Arabie Saoudite a récemment menacé de vendre une grande partie de ses actifs étasuniens si le Congrès adopte la mesure permettant de poursuivre le royaume wahhabite devant les tribunaux nord-américains, pour son rôle dans les attentats du 11 septembre 2001. À ce propos, nous attendons toujours les 28 pages classées secret-défense pour confirmer ces évidences largement étayées et sourcées, qui feront officiellement exploser en plein vol les ridicules conclusions de la commission d’enquête sur les arnaques du 11 septembre 2001.

Pour clôturer sur ce point, rappelons que des personnes appartenant à la haute administration politique française (dont des ministres) ont également protégé pendant plus de 20 ans (depuis les années 1990) des criminels recherchés par Interpol pour complicité dans des actions criminelles et terroristes (notamment membres des Frères Musulmans : Habib Mokni, Salah Karkar, Tahar Boubahri, Anouar Haddam, Saïd Hilali, etc.) sur le sol français, selon le journaliste d’investigation Jean-Loup Izambert. Les conséquences actuelles du terrorisme trouvent leur racine dans ces réseaux wahhabo-takfiristes implantés de longue date en Europe, avec la complicité des États profonds.

Des exercices de simulation d’attentats… pendant les attentats

Ce sujet est polémique et a des raisons de l’être, car il reste objectivement troublant. Ce thème est spécifique aux opérations spectaculaires de grosses envergures, voyez plutôt. Selon Éric H. May, un ancien officier de renseignement de l’armée étasunienne, « la façon la plus simple de faire un attentat sous faux drapeau est d’organiser un exercice militaire simulant exactement l’attentat que l’on veut commettre ». Gardons cela à l’esprit le temps d’une chronologie rapide.

Les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis : Lors des détournements d’avions par des pirates de l’air, la défense aérienne étasunienne a été largement affaiblie par des opérations simultanées, des simulations de guerre et des exercices militaires. Par exemple, un exercice au National Reconnaissance Office près de l’aéroport Dulles consistait à tester les réponses au cas où « un avion s’apprêtait à frapper un immeuble ». Le Secrétaire à la Défense des États-Unis, Donald Rumsfeld, annoncera au Washington Post qu’un autre exercice miliaire important se déroula ce jour-là (le Global Guardian) en mobilisant énormément de moyens. Le Toronto Star révéla également qu’une autre opération appelée Northern Vigilance incluait également « des informations simulées, ce que l’on appelle un ‘inject’ [une fausse entrée ou un spot fictif] sur les écrans radars ». Au moins l’un de ces exercices impliquait des vols fantômes, ce qui a perturbé le temps de réponse des contrôleurs aériens et de la défense étasunienne, car les radars étaient remplis d’avions fictifs dans le cadre d’exercices. Il y a donc eu un chevauchement parfait entre les détournements réels provoquant les attentats connus et des exercices de simulation en cours.

Les attentats du 11 mars 2004 à Madrid : Ils ont coïncidé avec une simulation d’attaque terroriste… la veille. Du 4 au 10 mars 2004, l’OTAN réalisait son exercice de gestion de crise annuel appelé CMX 2004. Au matin du 11 mars, près de 200 personnes meurent dans des attentats à Madrid. Selon El Mundo, « la similitude du scénario élaboré par l’OTAN avec les évènements survenus à Madrid fait froid dans le dos, et elle a impressionné les diplomates, militaires et services de renseignements qui ont participé à l’exercice à peine quelques heures plus tôt ». L’article est consultable gratuitement sur le site de Belt Ibérica, une entreprise espagnole de conseil en sécurité globale et situations d’urgence. Aucune autre information ouverte n’est disponible, les données sont confidentielles. Nous avons déjà souligné le savoir-faire de l’OTAN dans les opérations Stay-Behind de la guerre froide, inutile d’y revenir.

Les attentats du 7 juillet 2005 à Londres : Peter Power, ancien officier de Scotland Yard spécialisé dans l’anti-terrorisme et directeur de Visor Consultants (une entreprise spécialisée en gestion de crise, sécurité stratégique, etc.), a décrit le 7 juillet 2005 même dans une interview à ITV News, comment il avait organisé et conduit ce jour-là un exercice de simulation d’attentats pour le compte d’une société privée anonyme. L’exercice était basé sur des bombes synchronisées, explosant précisément dans les stations de métro où se sont produites les vraies explosions des attentats… qui se sont produits simultanément. Troublant, isn’t it ? Le MI5 avait malencontreusement abaissé le niveau de sécurité quant à la menace terroriste quelques jours avant les attaques. Aussi, selon The Guardian, le plus grand exercice anti-terroriste transatlantique, appelé Exercice Atlantic Blue, organisé par le Royaume-Uni et les États-Unis, a été effectué à Londres en avril 2005. L’exercice simulait des attaques explosives dans les bus et le métro londonien, 3 mois avant les vrais attentats dans le même métro.

Les attentats du 13 novembre 2015 à Paris : La simulation d’attaques terroristes effectuée par le SAMU de Paris le 13 novembre 2015 au matin était très proche de la réalité qui surviendra dans la soirée (onze heures plus tard) selon Slate. Le scénario de la simulation était basé sur une attaque terroriste composée de trois équipes agissant simultanément sur treize sites, faisant au total 50 morts et 150 blessés. Le docteur Nicolas Poirot, responsable du SAMU de Paris, n’a pas manqué de souligner son malaise concernant ces coïncidences. À noter également que plan de secours pour faire face à un afflux massif de blessés a heureusement été actualisé à peine 3 jours avant les attentats selon Le Monde.

Les conséquences sécuritaires en France

A continuation, l’article est consacré aux nombreuses conséquences de la menace terroriste et de ces attaques réelles, qui se confondent avec les intérêts de l’État profond. Voulu ou non voulu, peu importe : le terrorisme est un levier, une pièce maitresse d’un échiquier mondial.

Comprendre le terrorisme spectaculaire étatique n’est finalement utile que pour refuser le contrecoup de la société de surveillance scientifique centralisée intégrale décrite par George Orwell dans 1984, visant à enrayer toute critique du système politico-économique et contenir les actions qui en découlent. Retour sur le cas étasunien.

Le Patriot Act, la loi qui a instauré l’état d’urgence aux USA, a été mis en place le 26 octobre 2001 en conséquence aux attentats du 11 septembre 2001. Cette loi a créé le statut d’ennemi intérieur, ce qui a instauré l’espionnage généralisé, la possibilité de perquisitionner des suspects et de fouiller leur domicile sans mandat et la détention tout individu soupçonné d’activités terroristes sans limite de durée, entre autres. Concrètement, il s’agit d’un accroissement du pouvoir étatique diminuant de facto les contre-pouvoirs tels que la liberté d’expression ou le droit à la défense (droit à un avocat, à un procès équitable, etc.), en abolissant intégralement la vie privée par la surveillance étatique de toute communication électronique via la NSA. Le Patriot Act qui permet de lutter contre le « terrorisme « (un concept très vague) a donc donné à l’État le moyen de persécuter comme premiers terroristes nuisibles… les écologistes radicaux ! Les lanceurs d’alerte et autres dissidents politiques suivront par la suite.

Ce Patriot Act n’est pas né spontanément en réaction au 11 septembre 2001. Ce sont notamment les néocons étasuniens Dick Cheney et Donald Rumsfeld qui ont travaillé pendant 20 ans sur les principes majeurs composant cette loi de 2001 dans le cadre d’un programme appelé Continuity Of Government (COG). En effet, ces lois sécuritaires semblent être des projets murement réfléchis. Il en a été de même dans les 24h suivant l’assassinat du président Robert Fitzgerald Kennedy, où le Congrès étasunien adopta « dans l’urgence » une loi similaire, qui avait été en fait patiemment préparée. Même schéma pour la Résolution du golfe de Tonkin de 1964 ayant permis notamment au président Lyndon Johnson l’intervention étasunienne au Viet Nâm, sans la permission du Congrès et sous un prétexte aujourd’hui démontré fallacieux (opération sous faux drapeau).

Le Patriot Act actuel est en fait une reprise du Plan Huston de 1970, qui souhaitait plus de coordination du renseignement intérieur dans le domaine de la collecte d’informations sur la gauche radicale et le mouvement pacifiste, ainsi que du programme du COG. Le Patriot Act est donc le résultat d’un processus initié dans les années 1950, développant secrètement et de façon ininterrompue des mesures d’exception censées répondre à des situations de crise.

Le maccarthysme ciblait les communistes, le FBI de Hedgar Hoover ciblait les gauchistes et la NSA ciblait encore récemment le monde entier avec son programme PRISM. Le terrorisme spectaculaire islamiste étatique n’est que la nouvelle hystérie du XXIe siècle qui permettra d’établir définitivement cette surveillance complexe généralisée dont nous voyons déjà les prémices. La loi « exceptionnelle » du Patriot Act est toujours en vigueur aujourd’hui, car il en va de « la sécurité des américains ». Bannissons donc dès à présent cette légende des lois sécuritaires prises sous le coup de l’émotion en réponse à des attentats : il n’y a rien de plus faux.


Lisez la sixième partie de cet article

 

yogaesoteric
24 novembre 2019

 

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